- La résistance aux antibiotiques peut avoir des conséquences sur tout le monde, quel que soit l’âge ou le pays de résidence.
- D’après l’OMS, un nombre croissant d’infections, comme la pneumonie, la tuberculose ou la gonorrhée, la salmonellose, sont plus difficiles à traiter à cause de l’antibiorésistance.
La résistance des bactéries aux antibiotiques est principalement liée à une utilisation excessive ou non-adaptée de ces médicaments. Selon une équipe de l’université du Queensland, située en Australie, d’autres produits pharmaceutiques pourraient provoquer l’antibiorésistance : les antidépresseurs. Les résultats de leur recherche sont publiés dans Pnas.
Quels liens entre la résistance des bactéries aux antibiotiques et les antidépresseurs ?
En 2014, l'un des auteurs de cette recherche, Jianhua Guo, a remarqué que les bactéries dans les eaux usées domestiques semblaient développer une résistance aux médicaments antibactériens plus rapidement que les bactéries présentes dans les eaux usées des hôpitaux. Cette découverte l’a surpris car la consommation d’antibiotiques est plus importante parmi les personnes hospitalisées, en comparaison à la population globale.
Il a alors émis une hypothèse : la résistance peut être provoquée par autre chose que les antibiotiques. Avec son équipe, le scientifique a observé que les antidépresseurs, qui sont parmi les médicaments les plus prescrits au monde, tuaient ou retardaient la croissance de certaines bactéries. Jianhua Guo explique qu’ils engendrent "une réponse SOS" : ils déclenchent des mécanismes de défense cellulaire qui, à leur tour, rendent les bactéries plus aptes à survivre à un traitement antibiotique ultérieur. Dans une étude parue en 2018, le groupe de recherche a révélé que la bactérie Escherichia coli est devenue résistante à plusieurs antibiotiques après avoir été exposée à la fluoxétine, une molécule couramment vendue sous le nom de Prozac®.
Antidépresseurs : un impact multiple sur l’antibiorésistance
Dans leur dernière recherche parue dans Pnas, les chercheur ont examiné cinq autres antidépresseurs et 13 antibiotiques pour observer le développement de la résistance d'E. coli. Ils ont constaté que lorsque les molécules étaient mises en contact dans des environnements très oxygénés, cela poussait les bactéries E.Coli à créer des mutations, réactives à l’oxygène, et davantage capables d’activer leur système de défense. Or ce système est le même que celui utilisé par les bactéries lorsqu’elles développent leur antibiorésistance. Les chercheurs ont aussi découvert que l'exposition à certains antidépresseurs faisait augmenter le taux de mutation d'E. coli, ce qui accélère le processus de développement de la résistance. Ils ont également noté que cela conduisait à la sélection de gènes liés à la résistance, ce qui augmentait le risque de bactéries totalement résistantes. Enfin, l’équipe a remarqué qu'un type d'antidépresseur, lorsqu'il était exposé à certaines bactéries, provoquait le transfert de gènes entre les cellules, un autre mécanisme de développement de la résistance.
Antibiorésistance : de quoi parle-t-on ?
"Les antibiotiques sont des médicaments utilisés pour traiter et prévenir les infections bactériennes, explique l’Organisation mondiale de la santé. La résistance survient lorsque les bactéries évoluent en réponse à l’utilisation de ces médicaments." En somme, les bactéries engendrent alors des infections plus difficiles à soigner. Selon l’OMS, la résistance aux antibiotiques entraîne une augmentation des dépenses médicales, une prolongation des hospitalisations et une hausse de la mortalité. Elle considère le phénomène comme l’une des plus graves menaces pesant sur la santé mondiale.