L’éco-anxiété, une anxiété provoquée par les menaces environnementales qui pèsent sur notre planète, a pris une toute autre dimension depuis la crise de la Covid. “La pandémie avec les images des villes confinées mais sans pollution est venue rappeler que les questions environnementales ne sont pas purement théoriques et a fait prendre conscience de l’impact de nos actions sur le climat, réveillant des peurs dont les conséquences se font encore sentir aujourd’hui”, analyse ce mardi 14 mars le docteur Marc Rey, président de l’Institut national du sommeil et de la vigilance (INSV), lors d’une conférence de presse destinée à annoncer les résultats de la nouvelle enquête INSV/MGEN sur le sommeil des Français.
14 % des Français déclarent mal dormir à cause de l'éco-anxiété
L’enquête, réalisée par l’entreprise de sondages Opinion Way, confirme que de plus en plus de Français (68 %) se disent inquiets des conséquences du dérèglement climatique pour les générations futures. 64 % se disent d’ailleurs frustrés par le manque de considération des décideurs politiques à l’égard des travaux scientifiques sur ces sujets et 61 % sont préoccupés par l’augmentation du nombre de catastrophes naturelles.
Or, quand cette inquiétude évolue en ce qu’on appelle l’éco-anxiété "avec conséquences négatives", elle se répercute sur le sommeil et la santé mentale. Ainsi, 14 % des sondés déclarent dormir mal, perturbés par ces angoisses liées à la crise climatique qui tournent en boucle dans leur tête. Cette nouvelle forme d'anxiété est plus forte chez les jeunes adultes, les personnes déjà anxieuses, dépressives et qui prennent des médicaments pour dormir : le score d’éco-anxiété "avec conséquences négatives" est de 8,4 chez les 25-34 ans, 8,9 chez les anxiodépressifs et 8,6 pour le dernier groupe contre 6,8 pour l’ensemble des répondants. “Depuis 2 ans, l’insomnie a augmenté chez les jeunes adultes ; une partie de cette hausse peut être attribuée à l’anxiété liée à la situation écologique qui engendre un sentiment d’insécurité et d’inquiétude quant à leur avenir”, commente la Dre Sylvie Royant-Parola, psychiatre et présidente du Réseau Morphée.
"Pour le sommeil, la société doit prendre des mesures pour protéger l’environnement”
“L’enquête confirme l’intérêt que portent les Français aux questions climatiques et environnementales” déclare le professeur Jean- Arthur Micoulaud, mais elle montre que des études complémentaires sont nécessaires sur la relation entre éco-anxiété et sommeil. “Dans la mesure où le sommeil est un levier qui permet de réguler l’état émotionnel d’une personne, il existe un véritable enjeu à poursuivre les recherches sur l’impact de l’amélioration du sommeil sur la santé mentale”, estime le professeur Jean-Arthur Micoulaud, médecin du sommeil au CHU de Bordeaux.
Les conséquences du dérèglement climatique sur le sommeil ne se limitent pas qu’à l'éco-anxiété. En France, si rien n’est fait pour inverser la tendance, les épisodes de canicule (entre autres) vont s’intensifier et se multiplier, selon les prévisions des scientifiques. Or, il est plus difficile de bien dormir quand il fait chaud.
“L’approche écologique de la santé est une démarche essentielle en médecine du sommeil. Le sommeil est à l’interface de la physiologie et de l’écologie car il est modulé à la fois par des mécanismes propres à chaque individu et par le milieu extérieur”, souligne le professeur Jean-Arthur Micoulaud. “Bien dormir nécessite de vivre dans un environnement sain, préservé des stimuli que sont le bruit, la chaleur, la lumière. Cela implique également une bonne hygiène de vie qui respecte ses propres besoins”, ajoute-t-il, avant de conclure : “pour protéger le droit de chacun au sommeil, la société doit prendre des mesures pour protéger l’environnement”.