- Pourquoidocteur : L’ASMR, un acronyme signifiant "Autonomous Sensory Meridian Response" que l'on pourrait traduire par "Réponse autonome du méridien sensoriel" et qui désigne une technique de relaxation grâce à des sensations déclenchées par un stimulus, la plupart du temps auditif, est-il réellement efficace pour améliorer le sommeil ?
- Dr Marc Rey : La difficulté, c’est que les études scientifiques sérieuses manquent pour prouver ou non la réelle efficacité de ces pratiques. Ce qui est sûr, c’est que, pour leurs adeptes, elles participent à un rituel qui leur permettent de se relaxer avant de dormir, ce qui favorise l’endormissement. C’est en cela que ces pratiques sont réputées favorables au sommeil. Néanmoins, nous n’avons pas la preuve qu’elles améliorent la qualité du sommeil en dehors de l’endormissement. De plus, cela ne fonctionne pas sur tout le monde : il faut que l’auditeur soit réceptif à la relaxation suscitée par l’ASMR. Si le stimulus sensoriel (le son de quelqu’un qui chuchote et/ou fait de légers bruits avec des objets très près du micro) stresse ou met mal à l’aise l’auditeur, cela ne risque pas de l’aider à s’endormir. Bien souvent, les adeptes de l’ASMR sont entrés dans la pratique progressivement, avec un certain temps d’habituation avant que cela ne soit vraiment efficace pour se relaxer. C’est pourquoi, en consultation, je ne recommande pas en premier lieu de se tourner vers l’ASMR pour lutter contre les troubles du sommeil, puisqu’il y a des pratiques dont l’efficacité a été bien plus éprouvée par la recherche, comme les thérapies cognitivo-comportementales ou la méditation. S’endormir est un phénomène très progressif : on a besoin d’une transition relaxante entre l’activité de notre journée et le sommeil. Le plus important, c’est d’avoir un rituel de relaxation avant de dormir, quel qu'il soit, pour se préparer efficacement à l’endormissement. Si l’ASMR peut jouer ce rôle de manière efficace chez les patients qui y sont réceptifs, c’est une très bonne chose.
Bruit blanc : quels sont les bénéfices et quels sont les risques ?
Et pour les bruits blancs (un fond sonore continu combinant des sons de toutes les fréquences, similaire au son qu'émettent les statiques d'une télévision non réglée) ?
Les bruits blancs fonctionnent de façon similaire à l’ASMR : c’est un moyen de se relaxer pour favoriser l’endormissement, notamment en distrayant le dormeur de ses pensées stressantes. Ce n’est d’ailleurs pas si nouveau : écouter des bruits relaxants naturels, comme la pluie ou l’eau qui coule, est une pratique qui existe depuis la nuit des temps. Il y a peut-être un avantage supplémentaire : ce son continu permet aussi, durant la nuit, de masquer les autres sons que l’on peut entendre dans son environnement, évitant ainsi au dormeur d’être perturbé par ces derniers comme des sirènes de pompiers ou autres. Il faut cependant faire attention à ne pas l’écouter trop fort durant la nuit, au risque de perturber l’audition et de continuer à entendre le son durant la journée.
Sommeil : tout dépend de ce que le dormeur préfère pour se relaxer
Quelles sont les différences entre bruits blancs, bruits bruns et bruits roses ?
Les acousticiens répondront mieux que moi, mais il me semble que c’est une analogie avec la lumière. Tout comme la lumière blanche, qui comprend toutes les fréquences lumineuses, le bruit blanc est un bruit composé de sons de toutes les fréquences. Le bruit rose a des allures plus naturelles et donc peut paraître plus agréable à l’oreille de certains. Et le bruit brun a des fréquences plus basses et est donc plus profond que le bruit blanc, comme un rugissement ou le bruit de chutes d’eau, même s’il lui ressemble.
Par contre, la recherche n’a pas déterminé si l’un est plus efficace que l’autre pour le sommeil, je pense que cela dépend encore une fois de la réceptivité de l’auditeur : de ce qui lui sied le mieux pour se relaxer.
- Au-delà de l’endormissement et du masquage des bruits ambiants, ces types de sons ont-ils des effets sur le cerveau qui pourraient démontrer une réelle amélioration de la qualité du sommeil ?
C’est un sujet sur lequel la science doit davantage se pencher : il y a très peu d’études et c’est très difficile de l’étudier sur des sujets humains. Et même si le cerveau des souris a des mécanismes similaires au nôtre, il sera difficile d’avoir la preuve scientifique d’un effet particulier sur le cerveau humain. Certes, dans la pratique, beaucoup constatent que cela les relaxe. Mais, pour les personnes qui sont atteintes de troubles du sommeil persistants, cela ne pourrait sans doute malheureusement pas suffire et il vaut mieux se pencher sur les causes à l'origine de ces troubles, comme une perturbation du rythme veille-sommeil, une anxiété persistante, etc, et les traiter en priorité.