Deux chercheurs américains auraient identifié un moyen de dépister les signes précoces de l’autisme chez les nouveaux-nés entre deux et six mois. « Même si elle reste à confirmer, c’est une découverte très intéressante », explique le Pr Richard Delorme, pédopsychiatre et coordonnateur du centre expert du syndrome d’Asperger à l’hôpital Robert Debré à Paris.
« La précocité de prise en charge de l’autisme est un élément déterminant pour le parcours du malade : plus on s’en occupe tôt, plus il a des chances d’éviter l’apparition de graves troubles du comportement. » Jusqu’à présent, les spécialistes ne peuvent poser un diagnostic fiable de la maladie qu’à partir de 36 mois. Et en général le dépistage est plus tardif, en moyenne après l'âge de 4 ans, ce qui réduit d'autant les chances d'améliorer la santé des jeunes concernés.
Ecouter le Pr Richard Delorme, pédopsychiatre et coordonnateur du centre expert du syndrome d’Asperger à l’hôpital Robert Debré : « C’est la première fois qu’on a un indicateur non clinique qui permet de déterminer le risque d’apparition de la maladie, et en plus c’est un indicateur très précoce. »
Quelle est la technique de dépistage ? C’est grâce à « l’eye tracking », une technique d’analyse des mouvements oculaires, qui permet de déterminer à quel moment se manifeste l’absence de contact visuel, d’intérêt pour les interactions sociales, une caractéristique des troubles autistiques. « Cette technique permet de voir si le bébé confronté à un adulte qui lui parle, regarde sa bouche, ses yeux, son nez ou les objets environnants », explique le pédopsychiatre qui utlise la technique à l’hôpital Robert Debré dans le cadre de recherches.
Les deux chercheurs américains, Ami Klin et Warren Jones du Children's Healthcare of Atlanta et de l'Emory University à Atlanta, ont suivi deux groupes d'enfants de 2 mois à 2 ans, 59 considérés à risque élevé d'autisme, car ayant tous un frère aîné ou une soeur avec un trouble du spectre de l'autisme, et 51 à faible risque, sans parent atteint d'autisme aux premier, second et troisième degrés. Et ils ont comparé leur évolution tous les mois au test « d’eye tracking ».
Le diagnostic d'autisme a été confirmé chez 13 enfants à 3 ans. Et ils ont constaté que les enfants devenus autistes présentent assez rapidement une régression de l’attention visuelle. Cependant, les chercheurs notent qu’il existerait « une chance d'intervenir précocément » avant 6 mois puisque ces enfants diagnostiqués présentaient avant 6 mois une attention visuelle – même si elle décline ensuite -, et non une absence totale de contact visuel ». Cela ouvrirait la possibilité de traiter encore plus précocément ces enfants.
Ecouter le Pr Richard Delorme. « Ce sont des stratégies éducationnelles, on demande à la famille d’interagir plus intensément avec l’enfant. "
Cependant, à la suite de cette publication, les spécialistes de l’autisme insistent sur deux points. Premièrement, ces résultats doivent être confirmés dans d'autres études de plus grande taille avant que ce type de comportement soit considéré comme une caractéristique clinique de cette maladie. Deuxièmement, les signes d'évitement observés requièrent une technologie sophistiquée et de nombreuses mesures pendant des mois : ils sont impossibles à repérer à l'oeil nu.