Plus de 7,3 millions d’injections de Botox ont été réalisées dans le monde en 2021. D’après l’International Society of Aesthetic Plastic Surgery, leur nombre a augmenté de 45,3 % par rapport à 2017. Ces injections de toxine botulique ont généralement pour objectif de combler les rides. Mais quelles sont leurs conséquences à long terme ? D’après une nouvelle étude, parue dans Scientific Reports, elles pourraient avoir un impact sur la chimie du cerveau et sur l’interprétation des émotions. Cette recherche scientifique a été réalisée par des chercheurs de l’université de Californie et d'AbbVie, une entreprise qui fabrique du Botox.
Botox et cerveau : des IRM pour comprendre les effets des injections
Leurs travaux portent sur un petit groupe de participantes : dix femmes âgées de 33 à 40 ans. "Nous avons limité l’effectif aux femmes uniquement parce que la réceptivité émotionnelle varie pour les hommes et les femmes et nous voulions réduire la variabilité compte tenu de la petite taille de notre échantillon", précisent-ils dans leur étude. Entre 4 et 14 jours avant l’injection, ils ont réalisé des IRM (imagerie par résonance magnétique), puis ces examens ont été renouvelés entre deux et trois semaines après l’administration du Botox.
Injections de Botox : des modifications de l’activité cérébrale
Pendant ces examens, les scientifiques ont donné un exercice aux participantes : des images de visages leur ont été montrées. "Au cours de chaque test, les participantes ont utilisé une boîte avec des boutons pour indiquer si elles pensaient que les visages étaient joyeux ou en colère pour s'assurer que les participants évaluaient l'expression émotionnelle du visage." Ils n’ont pas observé de différences concrètes entre les deux sessions, avant et après les injections. En revanche, les examens par IRM ont révélé des différences au niveau cérébral.
Les chercheurs ont constaté qu'après avoir reçu du Botox, l'activité cérébrale des femmes était altérée dans leur amygdale. Or, cette partie du cerveau est impliquée dans les émotions, elle réagit fortement à la peur ou à l’excitation, par exemple. "Nous avons constaté une augmentation de l'activité de l'amygdale pour les visages heureux et en colère après des injections (…), notent les auteurs. Ce changement net de l'expression faciale peut réduire l'expérience interne des émotions négatives et favoriser les émotions positives." Des modifications ont été aussi observées au niveau du gyrus fusiforme, qui est important pour l’analyse des visages et des expressions faciales, lorsque les participantes regardaient des visages heureux. Selon eux, les injections ont bloqué certains muscles ce qui a "empêché le froncement des sourcils et réduit la création d'expressions souriantes ou heureuses, entraînant des altérations de l'activité de l'amygdale pour les visages heureux et en colère".
Botox : de futures études pour connaître les effets sur l'interprétation des émotions
Pour les chercheurs, ces résultats confirment l'hypothèse de la rétroaction faciale : les individus reflètent instinctivement les expressions faciales des autres dans le but d'identifier et de ressentir leurs émotions. "Ces données contribuent à un nombre croissant de publications suggérant que l'inhibition de la stimulation faciale des muscles peut modifier l'activité neuronale pour le traitement émotionnel." Ils suggèrent de réaliser des études plus poussées, avec davantage de participants, plus d’émotions différentes, mais aussi avec des personnes qui ne sont pas en bonne santé. "Des études sur la modulation émotionnelle chez des individus cliniquement déprimés, connaissant déjà des altérations du traitement émotionnel, peuvent révéler des effets plus forts des injections de Botox sur l'activité neuronale liée aux émotions", précisent-ils.