C’est à présent au président de trancher. Après la fin des travaux de la Convention citoyenne sur la fin de vie, qui s'est prononcée en faveur de la mise en place d'une “aide active à mourir” sous d'importantes conditions ce dimanche 2 avril, le dossier revient entre les mains du président Emmanuel Macron.
Le chef de l'Etat a reçu ce lundi à partir de 9 heures les 184 Français tirés au sort pour cette convention et est revenu lors d'un discours sur ses intentions. Il a dit vouloir un projet de loi "d’ici la fin de l’été 2023" mais ne s’est pas engagé à reprendre les recommandations des 184 tirés aux sorts. Sur le fond, Emmanuel Macron est resté assez prudent. S’il a déclaré vouloir renforcer l’accès aux soins palliatifs avec un "plan décennal national pour la prise en charge de la douleur et pour les soins palliatifs" qui s'accompagnera des "investissements qui s'imposent", il est resté évasif sur l’aide active à mourir, déclarant seulement que le cadre fixé par la convention citoyenne devait servir de "lignes rouges".
76 % des citoyens favorables à l'aide active à mourir
Cela fait un moment qu'Emmanuel Macron réfléchit à revoir le cadre législatif actuel et la loi Claeys-Leonetti, de 2016, comme l'explique l'AFP. Celle-ci permet aux soignants de mettre sous sédation irréversible des patients proches de la mort, dont le cas est désespéré et les souffrances intolérables. Mais elle ne va pas jusqu'à autoriser une aide active à mourir, c'est-à-dire un acte d'euthanasie ou une assistance au suicide (pour laquelle, à la différence de l'euthanasie, c'est la personne elle-même qui accomplit le geste fatal, et non un tiers).
Une majorité de citoyens de la convention a justement plaidé pour ouvrir cette possibilité, à la manière de ce qu'avait déjà préconisé en septembre dernier le Comité consultatif national d'éthique pour les sciences de la vie et de la santé (CCNE). Mais il s'agit d'une sorte de “oui mais”, suspendu au fait que le patient doive auparavant bénéficier d'un accompagnement approfondi, et qu'il ait pu à tout moment exprimer sa volonté. “Le discernement de la personne est une condition essentielle”, souligne le rapport.
Dans le détail, 76 % des citoyens sont donc favorables à cette aide active à mourir quand 23 % y restent opposés. Dans cette majorité, on retrouve une grande part de personnes (40 %) considérant que le suicide assisté et l'euthanasie doivent être indifféremment proposés, tandis que pour une autre frange (28 %) le suicide assisté doit prévaloir et l'euthanasie demeurer une exception, notamment afin d'éviter une implication trop grande des soignants qui ne veulent pas être associés à un tel acte jugé contraire à leur mission.
Euthanasie ou suicide assisté pour les mineurs : les avis sont très partagés
En revanche, les 184 membres de la Convention n'ont pas réussi à s'entendre sur certaines questions épineuses. Que faire quand un patient n'est plus en mesure de dire quel est son choix ? Sur ce sujet, faute de position majoritaire, la convention ne tranche pas. Et c'est la même chose sur un volet très sensible : l'ouverture de l'euthanasie ou du suicide assisté aux mineurs. “Les avis demeurent très partagés” à ce sujet, résume le texte final.
Au-delà de cette question très sensible de l'aide active à mourir, la Convention citoyenne formule également de nombreuses recommandations pour développer les soins palliatifs. Le gouvernement a prévu d'insister sur ce point, puisqu'Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'Organisation territoriale et des Professions de santé, est attendue sur le sujet d'ici à l'été. Un rapport de la Cour des comptes est également prévu.
La prise de position d'Emmanuel Macron sera également scrutée à travers un prisme politique. "Il est temps que la parole citoyenne soit pleinement prise en compte", ont exhorté les porte-parole de la Convention citoyenne. Le sort fait aux travaux de la précédente Convention citoyenne - sur le Climat - avait suscité de nombreuses critiques après le rejet de plusieurs propositions. Cette fois, le chef de l'Etat avait pris soin de prévenir qu'il ne s'engageait pas à reprendre tels quels les travaux des 184 Français tirés au sort. “Ce qui importe à ces citoyens, c'est que leurs conclusions soient prises en considération et qu'on explique la façon dont celles-ci sont traduites ou pas”, insiste-t-on à l'Elysée, qui veut voir dans cette nouvelle expérience “la pérennisation d'un nouvel outil démocratique”.