"Lorsque j’étais petite, je souffrais souvent de troubles digestifs et d'une toux incessante. Après plusieurs années d’errance, les médecins ont diagnostiqué une mucoviscidose, j'avais 8 ans", confie Estelle, qui est aujourd’hui âgée de 32 ans. À cette époque, cette maladie génétique, qui se caractérise par des sécrétions visqueuses au niveau de plusieurs organes (essentiellement les poumons et le pancréas), n’était pas systématiquement dépistée à la naissance. Mais, depuis 2002, un dépistage néonatal est fait chez les nourrissons à la maternité au troisième jour de vie.
"Dans ma famille, je ne suis pas la seule à être touchée par la mucoviscidose. J’ai trois frères dont un également atteint de cette pathologie rare et évolutive. Tout cela est le fruit du hasard, il y a un risque sur quatre d’avoir un enfant souffrant de mucoviscidose lorsque les deux parents sont tous les deux porteurs d’une mutation du gène CFTR, responsable de la maladie", explique la pharmacienne. D’après elle, il existe actuellement 2.000 mutations recensées du gène CFTR. Selon la nature de la mutation portée par un patient, la mucoviscidose, qui affecte plus de 7.600 personnes, sera plus ou moins sévère.
Mucoviscidose : "j’étais épuisée, chaque effort était calculé dans mon quotidien"
Chez la trentenaire, cette maladie était de plus en plus présente avec l’âge. "Au fil des années, les problèmes respiratoires étaient de plus en plus importants. Je développais souvent des infections pulmonaires, qui nécessitaient la prise d’antibiotiques par voie orale et intraveineuse. La toux ne me quittait plus, jour et nuit, je n’avais pas de répit. Je ne dormais plus, j’étais épuisée, chaque effort était calculé dans mon quotidien. Je ne voyais plus mes amis. La mucoviscidose a pris beaucoup de place dans ma vie et a conduit à mon isolement social", raconte Estelle. À ce moment-là, son premier objectif était de privilégier et préserver sa vie professionnelle. "Je voulais garder mon emploi à temps plein, car il représentait la stabilité, que je n’avais plus et c’était un moteur pour moi." Durant cette période de sa vie, la Parisienne a été très soutenue par sa famille et ses amis. "C’est ce qui m’a fait tenir dans les moments compliqués pour moi mais aussi pour mon frère dont l’état de santé s’est dégradé à cette époque", ajoute la membre de l’association Vaincre la mucoviscidose.
Kaftrio : "j’ai retrouvé l’énergie d’une personne de mon âge"
En 2020, la patiente a commencé à bénéficier d’un médicament, appelé "Kaftrio", qui a amélioré sa qualité de vie et son pronostic. "Grâce à ce traitement innovant (composé de trois molécules), qui vise à rétablir une activité de la protéine CFTR, je tousse moins, j'ai moins d'infections pulmonaires sévères et j’ai retrouvé l’énergie d’une personne de mon âge. De plus, la charge thérapeutique a été considérablement allégée", déclare Estelle, avant de spécifier qu’il faut cependant rester prudent sur l’efficacité et la sécurité sur le long terme de ce médicament récent, pour lequel les connaissances scientifiques se construisent avec le temps.
"Ce traitement a changé ma vie, mais j’espère que des solutions seront trouvées pour les personnes qui ne peuvent pas en bénéficier. Car oui, 35 % des patients ne sont pas éligibles à ce médicament, soit en raison de leur âge, soit parce qu’ils présentent un profil génétique rare ou ont subi une transplantation pulmonaire", signale la pharmacienne, qui est actuellement suivie par différents spécialistes (pneumologue, kinésithérapeute, diététicien…) dans un Centre de Ressources et de Compétences de la Mucoviscidose (CRCM).
Pour maintenir et même développer sa capacité respiratoire, elle a entamé une réhabilitation respiratoire. "Le sport va de pair avec le Kaftrio. Lorsque l’on vit avec cette maladie héréditaire, il faut être rigoureux avec ses traitements mais l’activité physique est aussi essentielle. Il faut s’astreindre chaque jour à bouger pour garder une condition physique satisfaisante".