- L’antibiorésistance est responsable de la mort de nouveau-nés atteints de septicémie.
- Ce constat concerne davantage les pays à faible revenu ou à revenu intermédiaire.
- Les médecins ont été obligés de donner des antibiotiques de dernier recours.
Le taux de mortalité varie entre 1,6 % et 27,3 %, en fonction de l’hôpital où les nouveau-nés sont pris en charge pour leur sepsis. C’est le résultat d’une étude publiée dans la revue PLOS Medicine. Lors de ces travaux, les chercheurs ont aussi découvert que près d'un nourrisson sur cinq dans le monde meurt à cause de cette infection bactérienne... et ces décès sont en grande partie liés à l’antibiorésistance.
Sepsis : l’antibiorésistance responsable de décès de nouveau-nés
Pour leur étude, les scientifiques ont récolté, entre 2018 et 2020, les données de plus de 3.200 nouveau-nés atteints de sepsis dans 19 hôpitaux de onze pays (Bangladesh, Brésil, Chine, Grèce, Inde, Italie, Kenya, Afrique du Sud, Thaïlande, Vietnam et Ouganda). Résultats : les décès des bébés sont liés à l’antibiorésistance, c’est-à-dire le fait que les antibiotiques utilisés ne soient plus aussi efficaces pour lutter contre les bactéries. Les taux de mortalité étaient plus importants dans les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire.
“Les organismes évoluent, la résistance aux médicaments change. C'est pourquoi les directives cliniques pour la septicémie néonatale doivent être constamment adaptées, explique le Dr Wolfgang Stöhr, l’un des auteurs de ces travaux. Cette étude observationnelle est une étape importante vers un meilleur traitement.”
L’objectif est de fournir des éléments à l’Organisation mondiale de la santé (OMS) pour améliorer les directives en ce qui concerne le traitement des nouveau-nés atteints de septicémie. En effet, la publication de cette étude s’inscrit dans un contexte d’augmentation des cas de sepsis sévère associé à un nouveau variant d’un entérovirus chez des nourrissons en France. Au 5 mai, sur neuf cas, sept étaient décédés et deux étaient toujours hospitalisés en unité néonatale selon un communiqué de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS).
“L'étude a révélé la réalité criante des infections résistantes aux antibiotiques, en particulier dans les hôpitaux des pays à faible revenu ou revenu intermédiaire, où nous sommes souvent confrontés à une pénurie d'infirmières, de lits et d’espace, indique Le professeur Sithembiso Velaphi, l’un des auteurs. Le risque d'infections est très élevé et la plupart des infections sont résistantes aux antibiotiques. Si un antibiotique ne fonctionne pas, le bébé meurt souvent. Cela doit changer de toute urgence. Nous avons besoin d'antibiotiques qui couvriront toutes les infections bactériennes.”
Septicémie : des antibiotiques de dernier recours pour traiter l'infection
Si ces résultats sont inquiétants, c’est aussi parce que plus de 200 combinaisons d'antibiotiques différentes ont été utilisées par les hôpitaux dans l'étude, avec des changements fréquents d'antibiotiques en raison de la forte résistance aux traitements. Cela signifie qu’il n’y a pas qu’une classe d’antibiotiques qui est concernée par l’antibiorésistance, mais tout un panel.
À cause de cette antibiorésistance, plusieurs médecins de l’étude ont aussi dû utiliser des antibiotiques de dernier recours, comme les carbapénèmes qui doivent, selon la Haute Autorité de Santé (HAS) “être limité [au] milieu hospitalier aux infections nosocomiales graves et/ou dues à des bactéries multirésistantes sur documentation microbiologique.” Dans l’étude, 15 % des bébés atteints de sepsis ont reçu des antibiotiques de dernière intention.
Klebsiella pneumoniae [qui peut être à l’origine d’un sepsis] était l'agent pathogène le plus courant chez les nouveau-nés de l’étude. Il s’agit d’une entérobactérie que l’OMS a placée tout en haut de sa liste de bactéries contre lesquelles il est urgent d’avoir de nouveaux antibiotiques. “Ces bactéries [Klebsiella pneumoniae et d’autres] sont devenues résistantes à un grand nombre d’antibiotiques, y compris les carbapénèmes et les céphalosporines de troisième génération, les meilleurs produits disponibles pour traiter les bactéries multirésistantes.”