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Fin de vie

Drame du Lutetia : 3000 personnes âgées se suicident tous les ans

Par Bruno Martrette

Les deux octogénaires qui se sont suicidés au Lutetia réclamaient le droit à une mort douce. La France n'autorise que la fin de l'acharnement thérapeutique pour les maladies incurables.

Jacques Brinon/AP/SIPA
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C'est une découverte macabre qu'a fait le personnel de l'hôtel parisien de luxe, le Lutecia (VIème), vendredi matin vers 9h30. Un garçon de chambre a retrouvé ce jour-là, sur le lit d'une des chambres de cet hôtel, main dans la main, un couple d'octogénaires qui venait de se donner la mort. Il s'agissait de Georgette et Bernard, tous deux âgés de 86 ans. Ce couple arrivé la veille avait décidé de passer leur dernière nuit dans cet établissement. Car, d'après les premiers indices, ce double suicide ressemble à un choix mûrement réfléchi de la part de ce couple. Deux lettres ont, en effet, été retrouvées à côté des corps inanimés, et dans l'une d'elles, le couple expliquait son geste en détails.


La France autorise seulement l'arrêt de l'acharnement thérapeutique
Dans une interview qu'il a accordé au Parisien, le fils de Georgette et Bernard, encore très ému, a confié au Parisien que ses parents « craignaient la séparation et la dépendance bien plus que la mort ». Il a raconté aussi, au passage, que le choix du palace parisien n'était pas non plus dû au hasard. C'est dans cet établissement que la défunte avait retrouvé, à la Libération, son père, de retour d'un camp de prisonniers en Allemagne. 
Par ailleurs, le fils du couple marié depuis plus de six décennies, a indiqué que ses parents avaient laissé derrière eux deux lettres.
La première, manuscrite, était destinée à la famille. La seconde, pour sa part, était à remettre au procureur de la République, selon les dernières volontés du couple. Dans ce courrier, Georgette dénonce l'absence de loi permettant de mourir « sereinement », et dit vouloir porter plainte pour non-respect de sa liberté. « La loi interdit l'accès à toute pastille létale qui permettrait une mort douce », écrit-elle.

A l'heure actuelle, la législation sur la fin de vie ne concerne que les personnes atteintes de maladies incurables. Votée en 2005, la « Loi Léonetti » empêche l’acharnement thérapeutique en autorisant le patient, selon certaines conditions, à demander l’arrêt d’un traitement médical trop lourd. Mais elle maintient l’interdiction d’une aide active à mourir. Jusqu'à quand ?
La question se pose, en effet, car en décembre dernier, la commission Sicard écartait l'euthanasie dite « active », estimant qu'elle franchirait la barrière d'un interdit ». Elle recommandait, néanmoins, « dans le sillage de la loi Léonetti », dans les cas de fin de vie difficiles où le malade demande clairement que sa vie cesse, que la médecine puisse lui apporter « une sédation terminale sans violence ni hypocrisie avec une fin de vie douce et adaptée à son état ».

4 fois plus de suicides chez les octogénaires
Par ailleurs, il faut rappeler que le suicide n'est pas un phénomène mineur chez les seniors. Tous les ans, en France, 3000 personnes âgées mettent fin à leurs jours. « Les plus de 65 ans représentent 25 % de la population française, mais 30 % des suicides », précisait au mois de juillet dernier, dans Le Parisien, Michèle Delaunay, ministre chargée des Personnes âgées. Un risque qui augmente avec l’âge. Chez les plus de 85 ans, le nombre de suicides est 4 fois plus important que dans le reste de la population.
La dépression en est la principale cause et les méthodes utilisées pour en finir sont souvent radicales : armes à feu, pendaison ou défenestration. « Il ne s’agit pas d’appels au secours », rappelait à cette occasion la ministre. Et cette dernière d'indiquer que face à ce phénomène, l’important est de repérer les premiers signes de dépression.