Huit millions de personnes meurent du tabac chaque année, selon l’Organisation mondiale de la Santé. C’est la principale "cause évitable" de décès dans le monde. "Mais aucun nouveau médicament de sevrage tabagique n'a été approuvé par la Food and Drug Administration des États-Unis depuis près de deux décennies", rappelle Nancy Rigotti, directrice du centre de recherche et de traitement du tabac du Massachusetts General Hospital. Un futur médicament pourrait l’être bientôt : avec une équipe de recherche, elle travaille sur un traitement de sevrage, qui a fait ses preuves dans un essai clinique à grande échelle. Les résultats de ces travaux sont publiés dans JAMA.
Arrêt du tabac : qu’est-ce que la cytisinicline ?
"Il y a un besoin urgent de nouveaux médicaments pour traiter le tabagisme, car les produits existants n'aident pas tous les fumeurs à arrêter et peuvent avoir des effets secondaires inacceptables", explique Nancy Rigotti. Or la cytisinicline, le produit sur lequel elle travaille, est très bien tolérée d’après les premiers tests réalisés. Ce médicament est un "alcaloïde naturel à base de plantes qui se lie sélectivement aux récepteurs nicotiniques du cerveau qui régulent la dépendance à la nicotine, atténuant l'envie de fumer et réduisant la gravité des symptômes de sevrage à la nicotine", précisent les auteurs de l’étude.
Tabagisme : un traitement efficace en douze semaines
Pour cet essai clinique de phase 3, la scientifique et son équipe ont recruté 810 adultes, tous fumeurs quotidiens et désireux d’arrêter. Deux durées de traitement ont été comparées : six et douze semaines, dans chaque cas, un autre essai avec un placebo a été réalisé. "Le critère de jugement principal était l'abstinence tabagique continue, confirmée biochimiquement au cours des quatre dernières semaines de traitement", précisent les auteurs. Dans le groupe qui a pris la cytisinicline pendant douze semaines, 32,6 % des participants étaient abstinents à l’issue de l’étude, contre 7 % de ceux ayant pris le placebo. Pour le groupe de six semaines, l'abstinence était de 25,3 % pour la cytisinicline contre 4,4 % pour le placebo pendant les dernières semaines. "Les participants prenant de la cytisinicline ont également connu une baisse rapide et soutenue des envies de fumer au cours des six premières semaines de traitement", notent les auteurs.
Un arrêt du tabac à long terme
À plus long terme, l’essai a permis de démontrer une augmentation "statistiquement significative" de l'abstinence et de façon continue pendant six mois, quelle que soit la durée de traitement. De la neuvième semaine de l’étude jusqu’à la semaine 24, 21,1 % des participants, du groupe ayant pris le médicament pendant douze semaines, avaient arrêté de fumer, contre 4,8 % pour le placebo. Dans le groupe de six semaines, l'abstinence durant les semaines 3 à 24 était de 8,9 % pour la cytisinicline contre 2,6 % pour le placebo. "La cytisinicline a démontré des résultats impressionnants en tant que médicament de sevrage tabagique dans un essai clinique rigoureux, qui a utilisé un nouveau schéma posologique scientifiquement fondé, ainsi qu'une durée de traitement plus longue que celle traditionnellement pratiquée, conclut Nancy Rigotti. Ce produit a le potentiel d'aider un nombre incalculable de personnes à arrêter de fumer et, ce faisant, de réduire le nombre énorme de décès prématurés et d'invalidités dus au tabagisme aux États-Unis et dans le monde."