Avant Simone Veil et sa loi sur l’avortement, il y avait Lucien Neuwirth et sa loi sur la contraception. Le père de la pilule est mort à 89 ans à l’hôpital Rossini-Sainte-Périne (Paris), dans la nuit de 25 au 26 novembre. Son épouse l’a annoncé au site du Figaro. Une infection pulmonaire a eu raison de ce gaulliste et féministe.
Le combat des premiers jours
Le combat de Lucien Neuwirth pour la contraception commence très tôt. Pendant la Seconde Guerre mondiale, il a 17 ans et découvre le contraceptif féminin Gynomine. Il fournit ses amis et y gagne un surnom : « Lulu la pilule. » Ce surnom préfigure le combat qu’il mènera toute sa vie pour la libération sexuelle des femmes.
Elu local après la guerre, Lucien Neuwirth s’intéresse de nouveau à la contraception. Il découvre les drames familiaux que peuvent causer une naissance non désirée ou un enfant illégitime. L’homme politique rencontre des associations et quelques – rares – médecins en faveur des contraceptifs. En 1957, vingt ans avant l’adoption de sa loi, Neuwirth découvre le mouvement féministe « Maternité heureuse » (futur « Mouvement français pour le planning familial »).
Une loi polémique
Cet ancien résistant devient député, puis sénateur de droite. En 1965, il soumet une proposition au général de Gaulle en personne : permettre aux femmes de contrôler leur fécondité. Convaincu, le président soutient Lucien Neuwirth. A leurs côtés, le ministre des Affaires sociales, Jean-Marcel Jeanneney. Dans le camp opposé, le Garde des Sceaux et l’Eglise, qui fait le siège du gouvernement et des parlementaires.
En décembre 1967, le combat d’une vie est couronné de succès : sur les bancs de l’Assemblée nationale, la proposition est votée à main levée. Seuls quelques élus de la majorité, à droite, y sont hostiles. La France est alors très conservatrice, mais la loi relative à la régulation des naissances est adoptée. Lucien Neuwirth reçoit des menaces, des insultes jusque dans le palais du Luxembourg. Qualifié de « malfaiteur public », il doit ferrailler jusqu’en 1972, date à laquelle les derniers décrets d’application sont pris.
Les contraceptifs peuvent désormais être fabriqués ou importés. Ils sont vendus en pharmacie, sur ordonnance médicale, et pour les mineures l'autorisation des parents n'est plus obligatoire.