Un quart des adultes dépassent les recommandations de consommation concernant l’alcool, selon des chiffres de l’Inserm. "Ces personnes s’exposent dès lors à des complications hépatiques, cardiovasculaires, neurologiques ainsi qu’à un risque majoré de cancers", prévient l’organisme. Par ailleurs, elles sont aussi plus susceptibles de développer une addiction, qui aggravera encore davantage ces différents risques.
S’il existe des traitements pour prendre en charge cette dépendance, l'alcoolisme reste difficile à combattre, car les personnes concernées ont un risque élevé de rechute. De nombreux scientifiques travaillent ainsi sur des méthodes plus efficaces pour lutter contre cette maladie. Une équipe américaine, a présenté dans la Nature Medicine le 14 août 2023, un traitement innovant pour soigner l’addiction à l'alcool : une thérapie génique.
Alcoolisme : un traitement qui cible le circuit de la récompense
"Actuellement, il n'existe aucune thérapie ciblant les circuits cérébraux qui sont altérés par une consommation soutenue et importante d'alcool", explique la co-autrice, Kathleen Grant, professeure de neurosciences comportementales. Or, les personnes atteintes de troubles liés à la consommation d'alcool connaissent généralement des cycles répétés d'abstinence suivis de rechutes, même lorsqu'elles utilisent l'un des rares traitements médicamenteux existants.
"La consommation excessive d'alcool altère certaines voies nerveuses dans le cerveau qui impliquent la libération de la dopamine, un neurotransmetteur, indiquent les auteurs. Ces neurones constituent la voie mésolimbique de la récompense, qui joue un rôle majeur dans l'alcoolisme et la toxicomanie." Plus l’addiction se développe, plus ces altérations des voies nerveuses cérébrales se multiplient. Cela entraîne une réduction des niveaux de dopamine. Pour les scientifiques cet état "hypodopaminergique" peut pousser les consommateurs excessifs d'alcool à recommencer à boire après des périodes d’abstinence.
La thérapie génique pour limiter le risque de rechute en cas d’alcoolisme
Dans leurs travaux, ils ont cherché à démonter les effets d’une modification de la libération de la dopamine dans le cerveau. Pour y parvenir, ils ont utilisé un groupe de primates afin de "montrer que la libération prolongée du facteur neurotrophique dérivé de la glie (hGDNF) dans une région du cerveau appelée la zone tegmentale ventrale (VTA) peut empêcher un retour à une consommation excessive d'alcool après une période d’abstinence". Plus précisément, quatre macaques ont reçu un virus modifié porteur d’un gène capable d’agir sur ce circuit cérébral de la récompense. Tous avaient été précédemment accoutumés à l’alcool. Quatre autres singes constituaient le groupe témoin.
Leurs conclusions montrent que l’administration de cette thérapie génique a permis de réduire la consommation d’alcool chez les singes, même après des cycles d’abstinence puis de réintroduction de l'alcool.
"Nos résultats suggèrent que ce médicament peut prévenir les rechutes sans nécessiter une adhésion à long terme au traitement par les patients", conclut le co-auteur de l’étude Krystof Bankiewicz, professeur de chirurgie neurologique.