- Des chercheurs ont identifié des bactéries intestinales et des acides biliaires spécifiques qui deviennent plus répandus dans les intestins des souris nourries avec un régime riche en graisses.
- Ces deux éléments sont liés à un risque accru de cancer colorectal.
- Les chercheurs comptent mener de nouvelles études pour mieux comprendre les mécanismes en jeu.
Selon une étude américaine publiée par l’American Cancer Society, une hausse de 9 % des cas de cancers du côlon a été observée chez les moins 50 ans entre 2020 et 2023. Une raison des suspectées par les scientifiques est le taux croissant d'obésité et une alimentation riche en graisses. Une étude de l'institut Salk et d'UC San Diego, publiée dans la revue Cell Reports le 22 aout 2023, semble confirmer cette piste.
Comment les régimes riches en graisses altèrent le microbiome
Lors de l'expérience, l'équipe a examiné les microbiomes et les métabolomes (des collections de petites molécules alimentaires et d'origine microbienne) dans les voies digestives des souris à un régime riche en graisses. Si ces rongeurs avaient une plus grande. quantité de bile dans leurs intestins, la substance était moins diversifiée et contenait un plus grand nombre d'acides biliaires modifiés par les bactéries intestinales. Les chercheurs ont également remarqué que ces acides biliaires modifiés impactaient la prolifération des cellules-souches dans le système digestif. "Lorsque ces cellules ne se reconstituent pas fréquemment, elles peuvent accumuler des mutations, une étape clé pour encourager la croissance des cancers, qui proviennent souvent de ces cellules souches", écrivent les auteurs dans un communiqué.
Il y avait également des différences importantes dans les microbiomes des souris soumises à un régime riche en graisses. Les bactéries intestinales présentes dans leur tube digestif étaient moins diversifiées et contenaient des bactéries différentes de celles des rongueurs n'ayant pas eu une alimentation grasse. Deux de ces bactéries—Ileibactérie valens, Ruminococcus gnavus– étaient capables de produire ces acides biliaires modifiés.
Les chercheurs pensent que les régimes riches en graisses modifient la composition du microbiome, favorisant ainsi la croissance de bactéries comme I. valens et R. gnavus. À son tour, cela augmente les niveaux d'acides biliaires modifiés. Dans un cercle vicieux, ces acides biliaires créent un environnement plus inflammatoire qui peut modifier davantage la composition des bactéries intestinales.
"Nous avons identifié comment un régime riche en graisses influence le microbiome intestinal et remodèle la composition d'acides biliaires, poussant l'intestin dans un état inflammatoire associé à la maladie", explique le co-premier auteur Ting Fu, ancien chercheur postdoctoral au laboratoire de l'institut Salk dans le communiqué.
Cancer colorectal : vers de potentielles interventions pour réduire les risques
"Nous avons déconstruit pourquoi les régimes riches en graisses ne sont pas bons pour la santé et identifié des souches spécifiques de microbes qui se propagent avec les régimes riches en graisses", explique Ronald Evans, directeur du laboratoire d'expression génique de l'institut Salk. "En sachant quel est le problème, nous avons une bien meilleure idée de la façon de le prévenir et de l'inverser".
Les chercheurs prévoient de mener de nouvelles expériences pour déterminer la vitesse avec laquelle le microbiome et les acides biliaires changent lorsqu'un animal commence à suivre un régime trop gras. Ils souhaitent également étudier les moyens d'inverser les effets d'une alimentation riche en graisses associés au cancer en ciblant FXR, la protéine qu'ils ont précédemment découverte comme étant associée aux modifications des acides biliaires.
Cette recherche souligne aussi l'importance de maintenir un régime équilibré, riche en fruits et légumes, et de limiter la consommation d'aliments riches en graisses saturées et en acides gras trans. De plus, elles mettent en lumière le potentiel de futures interventions thérapeutiques ciblant la composition du microbiome intestinal pour réduire le risque de cancer colorectal.