« Pour une reconnaissance urgente de la pénibilité », c'est le message lancé ce jeudi par les anesthésistes réanimateurs français. Dans un communiqué , le Syndicat national des praticiens hospitaliers anesthésistes réanimateurs élargi (SNPHAR-E) a maintenu son préavis de grève pour ce jeudi. Résultat, au CHU de Nantes, par exemple, où le Dr Yves Rébufat, vice-président du syndicat, travaille, 17 anesthésistes sur 30 feront grève. Une quinzaine d'entre eux seront toutefois assignés.
La prise en compte du travail de nuit
L’objectif du syndicat est d’obtenir une reconnaissance de la pénibilité du travail des médecins des hôpitaux, en particulier celle liée au travail de nuit. « Il n’est pas supportable pour ces médecins d’être exclus de tous les dispositifs de prévention ou de réduction de la pénibilité au prétexte qu’ils n’exercent pas dans le secteur privé et n’appartiennent à aucune fonction publique. Cette demande est juste car il ne s’agit nullement d’une faveur réclamée mais de l’application de la Loi à tous au nom de l’égalité. »
Car dans cette histoire, ce que ces professionnels dénoncent, c'est l'exclusion des médecins hospitaliers du compte pénibilité prévu dans le projet de loi de réforme des retraites. Ce dispositif est prévu, en effet, pour ne concerner que les salariés du secteur privé, selon 10 facteurs de pénibilité, comme le rappelle le site officiel de la réforme des retraites : les manutentions manuelles de charges lourdes, les postures pénibles, les vibrations mécaniques, les agents chimiques dangereux, les activités exercées en milieux hyperbare, les températures extrêmes, les bruits, le travail de nuit, le travail en équipes successives alternantes et le travail répétitif.
Si la loi est votée par le Parlement, à partir de 2015, les salariés exposés à des facteurs de pénibilité bénéficieront d’un compte personnel de points, à convertir en formation, temps partiel ou départ anticipé à la retraite.
Un tiers des anesthésistes menacés par le burn-out
Ces médecins souhaitent donc obtenir la reconnaissance de leur surcharge de travail à l'hôpital. Ce constat a, en effet, des répercussions néfastes sur la santé des hospitaliers et leurs patients. Selon une étude de l’association Asspro scientifique, menée fin 2012 auprès de 1024 spécialistes (chirurgiens orthopédistes, anesthésistes ou gynécologues), 30% des spécialistes de bloc opératoire (en établissements privés ou publics) ont un niveau de stress supérieur à 8 sur 10.
Cette situation est évidemment lourde de conséquence, tant pour les soignants que pour leurs patients. Alors que l’on dénombre chaque année de 60 000 à 95 000 « événements indésirables graves » sur un total de 1,5 million d'interventions chirurgicales (soit 4 à 6 %), le stress des professionnels de santé est « un signal susceptible d'alerter sur un risque potentiel d'augmentation des accidents ».
Enfin, les conséquences d’un burn-out sont également ravageuses pour la santé du médecin lui-même : des études américaines font état d’un taux impressionnant de mises en invalidité pour cause de troubles psychiques parmi les professionnels de la santé, dont le taux de suicide (6 %) est presque deux fois plus élevée que celui du reste de la population.