L'équipe, dirigée par le professeur Jacob Hanna de l'Institut Weizmann, a réussi à créer des modèles complets d'embryons humains, et à les faire croître jusqu'à 14 jours, sans qu'aucun spermatozoïde, ovule ou utérus ne soit impliqué. Les chercheurs ont détaillé leurs travaux qui pourraient ouvrir la porte à de nouvelles voies de recherche sur l'infertilité et les maladies congénitales dans la revue Nature du 6 septembre 2023.
Des modèles d'embryon humains créés avec des cellules souches
Pour créer ces "similis" embryons humains, les chercheurs ont fait appel à des cellules souches pluripotentes. Ces dernières sont capables de se transformer en différents types de cellules de l'organisme. Dans cette expérience, certaines ont été sélectionnées pour être l'embryon lui-même, tandis que d'autres ont vu des gènes spécifiques activés pour devenir l'un des trois types de tissus nécessaires au développement embryonnaire : le placenta, le sac vitellin et la membrane extra-embryonnaire du mésoderme (qui crée le sac chorial).
Environ 1 % des cellules souches réunies en amas se sont auto-organisées et développées formant des "modèles d'embryons" synthétiques. Ils présentaient toutes les particularités d'un embryon humain, y compris le placenta. Leur croissance a été stoppée à 14 jours, ce qui est la limite légale dans de nombreux pays pour la recherche embryonnaire.
Embryon à partir de cellules souches : une avancée pour la recherche
Pour les chercheurs, cette découverte va permettre d'étudier les premiers stades méconnus du développement embryonnaire. "Ce premier mois (de développement embryonnaire, NDLR) reste en grande partie une boîte noire. Notre modèle d’embryon humain dérivé de cellules souches offre un moyen éthique et accessible d’examiner cette boîte. Il imite fidèlement le développement d’un véritable embryon humain, en particulier l’émergence de son architecture d’une finesse exquise", explique le Pr Jacob Hanna dans un communiqué.
Les modèles d'embryons synthétiques pourraient aussi aider à mieux comprendre l'origine de l'infertilité, les malformations congénitales ou encore les effets de certains médicaments. Ils ont d'ailleurs déjà permis une première avancée.
Lors de leurs travaux, les scientifiques ont constaté que si l'embryon n'est pas correctement enveloppé par les cellules formant le placenta, d'autres parties de l'embryon ne peuvent pas se former. Cela pourrait expliquer certaines cas de fausses-couches précoces.
Embryon synthétique : pas de grossesse à l'horizon
Si ces embryons synthétiques peuvent aider la science, peuvent-ils devenir des êtres humains ? Pour le Dr Peter Rugg-Gunn, spécialiste du développement embryonnaire à l'Institut Babraham (Royaume-Uni), invité par le Guardian à donner son avis sur cette étude, la réponse est non. "Ce modèle d'embryon ne pourrait pas se développer s'il était transféré dans un utérus, parce qu'il contourne l'étape nécessaire pour s'attacher à la paroi de l'utérus", a-t-il expliqué au journal britannique.
Toutefois, il a reconnu que les expériences de ce type "soulèvent d'importantes considérations éthiques", et la nécessité pour les scientifiques d'avoir une réflexion sur ce domaine de recherche.