Vous avez réalisé une action assez souvent et pourtant, cela ne vous dit rien ? Ce phénomène, appelé "jamais-vu", est l’opposé du déjà-vu, qui est l’impression d’avoir déjà vécu un moment pendant qu’il se passe.
Jamais-vu : "trouver subjectivement inconnu quelque chose que nous savons être familier"
Des chercheurs de l’Université St Andrews (Ecosse) et de l’Université de Grenoble ont mené une étude sur le déjà-vu. Pour ce travail publié dans la revue Memory, ils ont remporté le prix lg Nobel, prix aux auteurs de travaux improbables qui font rire, puis réfléchir.
"Le jamais-vu est un phénomène opérationnalisé comme l'opposé du déjà vu, c'est-à-dire trouver subjectivement inconnu quelque chose que nous savons être familier", expliquent les chercheurs. Pour leur expérience, ils ont retenu un exemple de jamais-vu : répéter un mot plusieurs fois et, en cas de jamais-vu, trouver qu’il n’a plus de sens ou avoir un doute dessus. Ainsi, ils ont demandé à 94 étudiants en première année de psychologie à l’Université de Leeds, au Royaume-Uni, d’écrire 120 fois un mot donné. Au total, ils avaient douze mots différents à écrire. Chacun d’entre eux était écrit en gras en haut de la page.
Pour que les participants ne soient pas influencés, les scientifiques ne leur ont pas dit l’objectif réel de l’expérience. La seule consigne était d’écrire le plus vite possible. Les étudiants pouvaient s’arrêter s’ils en ressentaient le besoin mais, dans ce cas, ils devaient indiquer la raison aux auteurs en choisissant une des quatre options prévues : le mot semble étrange - qui équivaut à la notion de jamais-vu pour les auteurs, l’ennui, une douleur à la main et autre.
L'existence du phénomène de jamais-vu est confirmée
Résultat : 70 % des participants se sont arrêtés au moins une fois pour cause de jamais-vu. Au total, il y a eu 326 arrêts. Les chercheurs ont observé que l’arrêt avait généralement lieu après une minute à écrire, après plus de 30 répétitions en moyenne.
Les 326 arrêts ont été justifiés par les étudiants en sélectionnant une ou plusieurs descriptions. Ainsi, 141 (43,3 %) ont opté pour "je savais que c'était bien orthographié, mais cela semblait faux”, 128 (39,3 %) pour "l'écriture manuscrite semblait étrange”, 80 (24,5 %) "l'écriture manuscrite ne semblait pas réelle” et 47 (14,4 %) "c'était comme si je le voyais pour la première fois”.
Dans une deuxième phase de l’expérience, 120 étudiants ont dû écrire "le". Cette fois, 66 % des participants ont arrêté d'écrire à cause d’une sensation de "jamais-vu". Ainsi, les chercheurs concluent que la répétition peut rendre singulier quelque chose de familier, ce qui conforte donc l’hypothèse selon laquelle le jamais-vu existe.