- Le molnupiravir a été le premier traitement recommandé contre la Covid-19, par l'Organisation mondiale de la Santé.
- Une étude parue dans la revue Nature montre qu'il peut augmenter les mutations du virus.
- Le médicament n'est pas autorisé en France.
Le molnupiravir suscite les inquiétudes des scientifiques. Premier traitement antiviral contre la Covid-19, recommandé par l’Organisation mondiale de la Santé, il a récemment fait l’objet d’une nouvelle étude. Des chercheurs du Francis Crick Institute, de l'université de Cambridge, de l'Imperial College de Londres, de l'université de Liverpool, de l'université du Cap et de l'UKHSA ont découvert que le médicament du laboratoire Merck pouvait accélérer les mutations du virus. Leurs conclusions sont publiées dans la revue Nature.
Covid-19 : le molnupiravir agit sur le virus en le modifiant
Le fonctionnement du molnupiravir repose sur ces modifications du virus : il agit en induisant des mutations dans l’information génétique du virus, ou génome, lors de la réplication de celui-ci. "Beaucoup de ces mutations endommageront ou tueront le virus, réduisant ainsi la charge virale dans le corps", précisent les auteurs. Mais le médicament aurait aussi entraîné des mutations spécifiques, qui se sont répandues par la suite. "Il appartient à une classe de médicaments qui peuvent provoquer une mutation du virus telle qu’il est mortellement affaibli, résume Christopher Ruis, du département de médecine de l'université de Cambridge. Mais ce que nous avons découvert, c’est que chez certains patients, ce processus ne tue pas tous les virus et que certains virus mutés peuvent se propager."
Molnupiravir : une corrélation entre le début de son utilisation et la multiplication des mutations de la Covid-19
Pour leurs travaux, les scientifiques ont utilisé des bases de données mondiales de séquençage du Sars-CoV-2 pour cartographier les mutations du virus au fil du temps. Ils ont analysé un arbre généalogique de 15 millions de séquences du Sars-CoV-2 pour pouvoir déterminer précisément les moments d’apparition de chacune des mutations. "Bien que les virus mutent tout le temps, les chercheurs ont identifié des événements mutationnels dans la base de données mondiale de séquençage qui semblaient très différents des modèles typiques de mutations de la Covid-19, et qu’ils étaient fortement associés à des individus ayant pris du molnupiravir", notent-ils dans un communiqué. Ils observent une hausse de ces mutations à partir de 2022, moment où le médicament a été introduit sur le marché. "Les mutations étaient également plus susceptibles d'être observées dans les groupes d'âge plus âgés, ce qui est cohérent avec l'utilisation d'antiviraux pour traiter les personnes plus à risque, et dans les pays connus pour avoir une forte utilisation du molnupiravir", précisent-ils.
Covid-19 : doit-on continuer à utiliser le molnupiravir ?
Les scientifiques restent prudents face à leurs conclusions, en rappelant qu’elles démontrent une association et non un lien de cause à effet. "Il est difficile de comprendre l’impact du traitement par le molnupiravir sur les risques de nouveaux variants et leur impact éventuel sur la santé publique, estiment-ils. Il est également important de considérer que les infections chroniques par la Covid-19, pour lesquelles le molnupiravir est utilisé, peuvent elles-mêmes entraîner de nouvelles mutations." Pour Christopher Ruis, ces conclusions doivent être prises en compte lors de "l’évaluation des bénéfices et des risques globaux du molnupiravir et des médicaments similaires". En France, la Haute Autorité de Santé n’a pas autorisé le traitement, dans un avis rendu en décembre 2021.