Pourquoi docteur – Vous êtes la porte-parole de la nouvelle campagne "Tackle HIV", qui se déroule tout au long de la Coupe du monde de rugby. Quel est le but de cette initiative ?
Corinne Voisin-Fructuoso – C’est une initiative de sensibilisation et d’éducation du grand public au VIH.
Qui en est à l’initiative ?
C’est le joueur de rugby Gareth Thomas, ancien capitaine du XV gallois et commandeur de l’ordre de l’Empire britannique. Homosexuel et porteur du VIH, il a fait son coming out et lancé cette nouvelle campagne de communication en partenariat avec ViiV Healthcare et Terrence Higgins Trust.
En quoi consiste-t-elle concrètement ?
Pendant toute la Coupe du monde de rugby, un bus est présent sur les fans zones de Paris, Toulouse et Nice. Concrètement, les bénévoles interpellent les supporters et les médias pour leur parler de prévention et de dépistage.
A l’intérieur du véhicule, il y a aussi des écrans qui informent sur le VIH et des casques de réalité virtuelle qui permettent de faire l’expérience de la stigmatisation liée à cette pathologie.
Enfin, il est aussi possible d’échanger avec des représentants de l’association Aides.
Coupe du monde de rugby et VIH
Pourquoi avoir rattaché cet événement à la Coupe du monde de rugby ?
Parce qu’il y a encore très peu de sportifs qui parlent de leur homosexualité, et encore moins de leur VIH s’ils sont porteurs du virus. Cela faisait donc sens pour Gareth Thomas.
Vous mentionnez des casques de réalité virtuelle pour sensibiliser à la stigmatisation. Pourquoi ce choix ?
Parce qu’il y en a encore beaucoup en France. L’enquête "positive perspective" montre que 82 % des personnes qui vivent dans notre pays avec le VIH ont subi au moins une forme de stigmatisation liée à leur maladie au cours de cette année 2023.
Quels peuvent être les idées fausses et préjugés qui circulent encore aujourd’hui ?
On pense encore beaucoup que si on a le VIH, on est forcément homosexuel et forcément contagieux, ce qui est totalement faux. De ce fait, certains patients sont malheureusement encore rejetés par leur famille et/ou leur communauté lorsqu’ils verbalisent leur maladie.
30.000 personnes ne savent pas qu’elles ont le VIH en France
Un autre axe de votre campagne de prévention porte sur le dépistage. Pouvez-vous nous en dire un mot ?
Environ 30.000 personnes ne savent pas qu’elles ont le VIH en France, ce qui est encore beaucoup trop. Cette insuffisance du dépistage au sein de notre pays s’explique notamment par l’arrivée de la Covid-19 et par le fait que certaines communautés très précaires sont difficilement atteignables malgré le travail remarquable des associations fait en ce sens.
Faudrait-il selon vous mettre en place d’autres initiatives pour lutter contre le VIH en France ?
On devrait à mon avis mieux communiquer sur l’existence méconnue des laboratoires sans ordonnance, qui permettent de se faire dépister même si la personne n’a pas vu de médecin au préalable.
Il faudrait aussi de nouveau renforcer les campagnes de prévention auprès des jeunes générations, car il y en a beaucoup moins qu’avant.
VIH : où en est l'épidémie en France ?
Où en est l’épidémie de VIH en France ?
Elle est plutôt stable depuis une dizaine d’années. Environ 170.000 personnes ont le VIH aujourd’hui en France, et on dénombre à peu près 6.000 nouveaux diagnostics chaque année.
Comment traite-t-on le VIH aujourd’hui ?
Différents traitements existent et nécessitent un suivi régulier par son médecin. Cela peut être des médicaments que l’on prend quotidiennement ou des injections faites tous les deux mois.
Ces médicaments ont-ils des effets secondaires ?
Oui, même s’il y en a beaucoup moins qu’avant.
Peut-on guérir du VIH ?
Aujourd’hui, les traitements permettent de vivre normalement et aussi longtemps que les autres, mais on ne sait pas encore guérir le VIH. Les six cas de rémission récemment médiatisés sont encore bien trop rares pour pouvoir donner cet espoir aux patients infectés.