Et si un geste aussi anodin que boire l’eau d’une bouteille en plastique était à l’origine d’une migraine ? Une théorie pas si absurde que cela aux yeux d'une équipe de l’université du Kansas (Etats-Unis). Selon les résultats d'une publiée récemment dans la revue Toxicological Sciences, le bisphénol A des emballages plastiques explique une partie de ces maux de tête invalidants. En France, la migraine touche 11 millions de personnes. Les femmes sont trois fois plus touchées que les hommes.
Des rats migraineux
Le bisphénol A est très largement utilisé. On le trouve dans les tableaux de bord de voiture, les rideaux de douche, les tickets de caisse, les cosmétiques, les plastiques alimentaires… Il a déjà été relié à de nombreux troubles de santé comme l’obésité, l’infertilité et les crises cardiaques. De nombreux pays, dont la France, l’ont interdit dans les emballages alimentaires destinés aux bébés. Mais on trouve toujours le bisphénol A dans de nombreux produits destinés aux adultes, signalé par des triangles contenant les chiffres 7, 6 et 3.
Les chercheurs américains ont mené une étude sur des rats. La moitié du groupe a été exposée au bisphénol A une fois par jour pendant 3 jours. L’équipe de l’université du Kansas a observé le comportement des rats après l’exposition au bisphénol A. Ils ont utilisé comme référence des comportements que l’on observe chez les êtres humains atteints de migraine.
« Actuellement, la migraine n'a pas de biomarqueurs spécifiques. L'analyse des symptômes est le seul moyen de diagnostiquer ce trouble », explique Nancy Berman, chercheur principal. Les rats exposés au bisphénol A ont présenté tous les symptômes d’un mal de tête intense : ils sont devenus moins actifs, ils se sont éloignés du bruit et de la lumière forte, la tête était tendue et les animaux s’effarouchaient facilement.
Amplification des symptômes
Les chercheurs ont également observé des changements dans les niveaux d’œstrogène dans le cerveau des rats exposés au bisphénol A. Or, les crises de migraines ont été reliées à des changements soudains dans les niveaux de ces hormones sexuelles féminines. Le bisphénol A, surnommé « oestrogène environnemental », imite justement les œstrogènes, ce qui en fait un perturbateur endocrinien.
« Ces résultats impliquent que le bisphénol A a la capacité d’amplifier les symptômes qui sont utilisés pour diagnostiquer le trouble chez les patients humains », conclut le rapport. Ce produit chimique pourrait donc augmenter l’incidence et la prévalence des migraines.
Ces chercheurs évoquent une petite étude clinique, réalisée en 2011 par l'Institut Silent Spring de Newton (Massachussetts, Etats-Unis) qui démontre qu’une baisse significative de l’exposition au bisphénol A améliore la vie des personnes migraineuses. Substituer des aliments frais aux plats préparés était efficace dès 3 jours, selon cette étude. Les scientifiques suggèrent donc aux personnes souffrant de migraines de bannir les sources potentielles de bisphénol A de leur environnement : plastiques qui passent au micro-ondes, bouteilles en plastique personnelles ou collectives, aliments préparés. Pas besoin pour cela de médicament, ni d'accord des autorités sanitaires.