L'infertilité affecte désormais un couple sur six en âge de procréer dans le monde. Dans environ la moitié des cas, les difficultés de conception d'un enfant viennent de l'homme. Ce constat a conduit un consortium international de 26 experts, dirigé par le professeur Moira O'Bryan de l'Université de Melbourne, à tirer la sonnette d'alarme et à présenter 10 recommandations pour améliorer la prise en charge de l'infertilité masculine.
La fertilité des hommes a baissé au cours des dernières décennies
Le rapport, publié dans la revue Nature Reviews Urology, rappelle que la fertilité masculine - déjà à l'origine de la moitié des difficultés de procréation - a chuté au cours des dernières décennies. "La diminution de la qualité du sperme et la fréquence croissante du cancer des testicules et des malformations congénitales dans le système urogénital indiquent que, globalement, la santé reproductive masculine a diminué au cours des dernières décennies. Des recherches sont nécessaires pour comprendre pourquoi et comment cette tendance peut être inversée", estime la Pr O'Bryan dans un communiqué.
Outre le besoin d'études scientifiques supplémentaires, les experts notent que les hommes et leurs partenaires devraient pouvoir bénéficier de "diagnostics précis et de traitements ciblés, mais ceux-ci ne sont actuellement pas disponibles dans la plupart des cas en raison d'un financement insuffisant, de lacunes dans la recherche et de pratiques cliniques non standardisées".
Le co-auteur du rapport, le professeur Robert McLachlan, ajoute que ce manque de connaissance et de prise en charge de l'infertilité masculine "pousse les procédures lourdes et invasives (de la procréation médicale assistée) et les risques associés sur les femmes" et provoque "une détresse émotionnelle" importante.
Infertilité masculine : un dépistage génétique sera nécessaire
Les médecins déplorent que le diagnostic d'infertilité chez un homme ne conduise pas à davantage d'examens et de recherches sur les causes de ce trouble. "Contrairement à de nombreuses autres conditions médicales, le dépistage génétique pour diagnostiquer l'infertilité masculine est extrêmement limité parce qu'il n'est pas couvert par les soins de santé ou l'assurance publique, et parce que la recherche sur les causes génétiques de l'infertilité masculine n'a pas été financée", a déploré la professeure O'Bryan. "Compte tenu des preuves convaincantes que l'infertilité masculine peut être un biomarqueur d'autres maladies, cela semble être une occasion manquée d'améliorer la santé des hommes à plusieurs niveaux".
"Par rapport aux hommes fertiles, les hommes infertiles semblent connaître un taux plus élevé d'une série de troubles de santé chroniques, et même une durée de vie plus courte", ajoute le Pr Robert McLachlan. "Nous avons besoin de plus de recherches sur ces questions et sur la question de savoir si leur progéniture peut hériter de ces caractéristiques".
Infertilité : 10 recommandations pour améliorer la prise en charge
Pour remédier à cette situation préoccupante, les 26 experts ont formulé dix recommandations clés. Elles comprennent :
- La reconnaissance par les autorités gouvernementales et sanitaires que l'infertilité masculine est une condition médicale courante et grave et que les patients ont droit à des diagnostics précis et à des traitements ciblés.
- La création d'une « biobanque » mondiale des tissus et de données cliniques d'hommes fertiles ou infertiles, de leurs partenaires et de leurs enfants pour aider les chercheurs à comprendre les causes génétiques et environnementales de l'infertilité.
- Le développement de protocoles pour normaliser la collecte de tissus dépersonnalisées et de données cliniques/de style de vie.
- Le financement de recherches internationales et collaboratives pour comprendre les interactions et les impacts des facteurs génétiques, de mode de vie et environnementaux sur la fertilité masculine dans diverses populations.
- L'intégration du séquençage génomique dans le diagnostic de l'infertilité masculine.
- Le développement de tests supplémentaires pour améliorer le diagnostic de l'infertilité masculine.
- Etudier l'impact sur la fertilité masculine des composés - en particulier des substances chimiques et perturbateurs endocriniens - dans les produits, sur le lieu de travail et dans l'environnement. Puis, mettre en œuvre des règlements et des politiques et développer des alternatives sûres.
- Tester rigoureusement les stratégies de reproduction médicalement assistée avant qu'elles ne soient intégrées dans la pratique clinique.
- La mise en place de campagnes de sensibilisation sur l'infertilité masculine.
- L'amélioration de la formation des professionnels de santé aux problématiques de l'infertilité masculine.