Pourquoi docteur : Qu’est-ce que la mastectomie ?
Dr. Myriam Deloménie : La mastectomie c’est le fait d’enlever complètement toute la glande mammaire, c'est-à-dire d’enlever complètement le sein. La majorité des tumeurs du sein, des cancers du sein, se traitent très bien. Le premier traitement est la chirurgie. Dans certains cas, on essaye le plus possible de garder le sein, c’est ce qu’on appelle une mastectomie partielle ou tumorectomie. Mais malheureusement dans 30 % des cas, si la tumeur est trop volumineuse ou s’il y a plusieurs tumeurs dans le sein, nous sommes obligés de faire une mastectomie totale.
"La mastectomie totale se fait quand la tumeur est trop volumineuse par rapport à la taille du sein de la patiente"
La mastectomie totale se fait quand la tumeur est trop volumineuse par rapport à la taille du sein de la patiente et qu’on se rend compte qu’il n’y a pas assez de glande mammaire saine pour pouvoir garder le sein. Mais également s’il y’a des tumeurs à deux endroits différents du sein complètement éloigné. Dans ces cas-là nous sommes obligés d’enlever complètement la glande mammaire par sécurité.
Quand peut-on parler de reconstruction ?
Dans ce cadre-là nous travaillons en collaboration avec un chirurgien reconstructeur, un chirurgien plasticien qui va redonner du volume et faire une reconstruction dont on essaye le plus possible d’effectuer pendant la même opération que la mastectomie totale. Nous sommes dans quelque chose où l’on redonne du volume et lorsqu’on le peut, si la tumeur est éloignée du mamelon, on essaye de garder la peau et le mamelon.
"Se réveiller à plat" peut entraîner "un gros traumatisme psychologique"
Dr Benjoar Marc-David : Dans la majorité des cas, on la fait en même temps que la mastectomie car ça évite à la patiente de se réveiller à plat, ce qui peut être un gros traumatisme psychologique et même physique. L’idéal c’est de reconstruire l’intérieur de la glande mammaire, le volume de la glande mammaire et la peau si l’on a besoin de peau. Deux méthodes se font : la prothétique, avec un implant mammaire rempli de silicone ou d’eau et les méthodes naturelles ou autologues, où on prend des tissus de la patiente que l'on transfère vers le sein pour le reconstruire.
Le robot est une méthode nouvelle qui vient d’être autorisée, et avec le Dr Deloménie nous avons été précurseurs sur son utilisation en Ile-de-France. L’intérêt c’est de pouvoir retirer la glande mammaire en laissant la totalité de la peau et de l’aréole en passant par l’aisselle pour une cicatrice très courte.
Dr Myriam Deloménie : Le robot est un prolongement de nos mains et de nos bras car on arrive à faire une cicatrice cachée sous le bras, très éloignée de la mastectomie. Or, habituellement, elle se situe sur la partie supérieure du sein ou en-dessous, ce qui la rend souvent très visible.
Et la reconstruction du téton ?
Dr Benjoar Marc-David : Il y a trois méthodes pour reconstruire le téton et l’aréole. Tout dépend de si l’on a utilisé une prothèse ou un lambeau de peau. En général, si l’on n’a pas apporté de peau, nous n’avons pas de laxité pour recréer le téton. Donc soit nous allons prendre le téton de l’autre côté que l’on greffe sur le nouveau sein ; mais le problème c’est que cela abîme un peu le sein naturel et beaucoup de femmes refusent. Soit nous faisons un tatouage avec un effet 3D du téton, qui est assez saisissant car nous avons vraiment l’impression d’avoir un téton. Le seul problème de cette technique c’est qu’il n’y a pas de volume et dans un t-shirt moulant par exemple, il n’y aura pas le relief du téton. Il y a aussi la solution de l’implant de téton qui a été proposée et que l’on va essayer de tester. C’est un implant en silicone que l’on met juste sous la peau pour recréer la forme du téton. Dans l'autre cas de figure, on remplace de la peau par de la peau. Donc on va recréer un téton à partir de la peau du ventre ou de la fesse et ensuite on va la tatouer pour donner la couleur, et on obtient un résultat quasi parfait.
@pourquoidocteur Aujourd’hui en France, on estime que 30% des femmes concernées par une mastectomie totale s’engageraient dans une reconstruction du sein. À l'annonce de l’opération, plusieurs décisions importantes sont à prendre : reconstruire chirurgicalement le volume du sein enlevé ou conserver le buste plat, réaliser la reconstruction dans le même temps que la mastectomie ou en différé, choisir la technique chirurgicale qui convient le mieux... (Source : PourquoiDocteur par Mathilde Debry) Piurquoi Docteur a rencontré le Docteur Benjoar, chirurgien plasticien à l’Institut Français du Sein et le Dr Delomenie, chirurgien spécialisée en chirurgie cancérologique du sein et robotique. #octobrerose #drbenjoar #drdelomenie #reconstructionmammaire #implantmammaire #institutfrancaisdusein ♬ son original - pourquoidocteur
Don de seins : "cela impliquerait un traitement antirejet qui est contre-indiqué dans un cancer"
Pourquoi ne pouvons-nous pas faire de dons de seins ?
Nous ne pouvons pas faire de dons de seins parce que cela impliquerait un traitement antirejet, ce qui est contre-indiqué dans un cancer. Donc il n’y a jamais eu de cas où l’on va chercher un sein chez un patient en mort cérébrale pour le donner. En revanche, il y a eu déjà plusieurs cas décrits de dons entre jumelles car si vous êtes jumelles homozygotes, vous avez une compatibilité parfaite et donc certaines jumelles ont donné un ventre ou de la graisse lors de lipofilling à une sœur plus mince par exemple.
Dr Myriam Deloménie : C’est rare ! Cela reste vraiment exceptionnel.
Dans le cadre d’un traitement par radiothérapie, comment se passe la reconstruction ?
Dr Benjoar Marc-David : Nous ne pouvons rien faire pendant la radiothérapie car cela crée une sorte de brûlure et toutes les méthodes ne marchent pas. Classiquement, nous demandions à la patiente d’attendre 1 an après le dernier rayon parce qu’on utilisait majoritairement les prothèses, donc pour éviter toute complication, il fallait patienter. Maintenant, nous faisons les rayons avant d’enlever le sein (séquence inversée). Dans le cas d’un lipofilling, je commence généralement à partir de 6 mois pour espérer avoir une reconstruction finie au bout d’un an/un an et demi.
"Toutes ne veulent pas rester amputée et avoir un buste à plat"
Il y a la même demande chez les femmes jeunes que chez des femmes de 60 ans. Toutes ne veulent pas rester amputée et avoir un buste à plat. L’importance que l’on a à travailler en binôme avec le chirurgien cancérologue c’est de leur proposer un plan de traitement. L’intérêt est de dire ce qu’il va se passer, les étapes à suivre et expliquer si la reconstruction sera immédiate ou au contraire remise à plus tard sur les indications du chirurgien cancérologue. Dès le départ les modalités de reconstruction seront exposées à la patiente qui aura toutes les informations nécessaires avant la mastectomie.
Quel chirurgien prend la première décision ?
Dr Myriam Deloménie : C’est souvent le chirurgien cancérologue qui décide dans un premier temps, qui pose l’indication chirurgicale cancérologique : est-ce qu’on peut garder le sein ou pas ? Est-ce une tumeur dont on peut éventuellement garder le mamelon ou pas ? Dans la majorité des cas nous pouvons faire une reconstruction mammaire immédiate. Il y a quelques cas où ce n’est pas possible avec des tumeurs très agressives avec une atteinte de la peau par exemple. Mais si nous sommes dans un cas où l’on peut le faire, on demande à la patiente de consulter dans la foulée le chirurgien plasticien qui, lui, va décider en fonction de la morphologie et des éventuels traitements quelle reconstruction sera la meilleure.
Dr Benjoar David : C’est toujours un choix de la patiente. Certaines patientes choisissent de ne pas se faire reconstruire ou de prendre le temps. D’autres veulent séparer la prise en charge initiale du cancer de celle de la reconstruction parce qu’elles veulent prendre plusieurs avis ou qu'elles ne sont pas forcément prêtes à envisager un processus de reconstruction. Nous leurs proposons les techniques et ce sont les patientes qui décident.