Sclérose latérale amyotrophique, maladie de Parkinson ou de Huntington… De nombreuses personnes atteintes de pathologies neurodégénératives perdent souvent la capacité à communiquer, ce qui nuit à leur qualité de vie. "Les outils actuellement disponibles pour leur permettre de parler sont généralement très lents et fastidieux", a déclaré Gregory Cogan, professeur de neurologie à l'Université Duke (États-Unis), dans un communiqué. Selon lui et son équipe, la solution pour rétablir la communication consiste à décoder les signaux directement du cerveau pour permettre la création de prothèses neuronales.
Cerveau : l'implant abrite 256 minuscules capteurs
Cependant, le décodage a été limité par des enregistrements neuronaux qui ne capturent pas de manière adéquate la riche structure spatio-temporelle des signaux du cerveau. Selon les scientifiques, le meilleur taux de décodage vocal actuellement disponible est d’environ 78 mots par minute, tandis que les personnes utilisent environ 150 mots par minute. Le décalage entre les débits de parole parlée et décodée est en partie dû au nombre relativement restreint de capteurs d’activité cérébrale au sommet de la surface du cerveau. En clair, moins de capteurs fournissent des informations moins déchiffrables à décoder.
Afin de pallier le problème, les chercheurs américains ont décidé de créer un implant cérébral. Pour cela, ils ont emballé 256 capteurs cérébraux microscopiques sur un morceau de plastique flexible de qualité médicale de la taille d'un timbre-poste. Les neurones distants d'un grain de sable peuvent avoir des modèles d'activité très différents lors de la coordination de la parole. "Il est donc nécessaire de distinguer les signaux des cellules cérébrales voisines pour aider à faire des prédictions précises sur la parole."
Dans 40 % des cas, le décodeur de l’implant était précis
Après avoir fabriqué le dispositif, ils ont voulu le tester auprès de quatre patients. Dans le cadre d’une étude, publiée dans la revue Nature Communications, les auteurs ont temporairement placé l’implant chez des personnes qui subissaient une intervention chirurgicale au cerveau. Au cours de l’intervention, qui a eu lieu au bloc opératoire, les participants ont entendu une série de mots absurdes, comme "ava" ou "kug", puis ont prononcé chacun d'eux à haute voix. L'appareil a enregistré l'activité du cortex moteur de la parole de chaque volontaire, car il coordonnait près de 100 muscles qui bougent les lèvres, la langue, la mâchoire et le larynx.
Ensuite, l’équipe a pris les données neuronales et vocales du bloc opératoire et les a introduites dans un algorithme d'apprentissage automatique pour voir avec quelle précision il pouvait prédire quel son était émis sur la seule base des enregistrements de l'activité cérébrale. Pour certains sons et participants, le décodeur fonctionnait 84 % du temps lorsqu'il s'agissait d’examiner le premier son. En revanche, la précision a diminué à mesure que le décodeur analysait les sons au milieu ou à la fin d'un mot absurde. Il était également difficile si deux sons étaient similaires, comme le "p" et le "b". Dans l’ensemble, le décodeur était précis dans 40 % des cas.
Une version sans fil du dispositif
Désormais, les scientifiques vont créer une version sans fil de l’implant. "Vous serez capable de vous déplacer et vous n'aurez pas besoin d'être attaché à une prise électrique", a précisé Gregory Cogan. Bien que leur travail soit encourageant, ils savent qu’il reste encore un long chemin à parcourir pour que la prothèse soit bientôt disponible. "Nous en sommes au point où la parole est encore beaucoup plus lente que la parole naturelle, mais vous pouvez voir la trajectoire vers laquelle vous pourrez y arriver", a ajouté Jonathan Viventi, qui a participé à ces travaux.