- La maladie d'Alzheimer peut entraîner l'accumulation d'une forme de cholestérol spécifique dans le cerveau.
- Dans un essai sur des souris, un traitement a permis de réduire le taux de ce cholestérol et de limiter les dommages cérébraux liés à Alzheimer.
- Les souris ont pu conserver leur capacité à effectuer des tâches basiques.
Plus de 35 millions de personnes souffrent de la maladie d’Alzheimer, selon les chiffres de la Fondation Recherche Alzheimer. Aujourd’hui, les traitements disponibles permettent uniquement de ralentir l’évolution de la pathologie neurodégénérative. Mais de récents travaux scientifiques apportent l’espoir de nouveaux médicaments capables de bloquer cette démence. Dans la revue Neuron, des chercheurs de la Washington University School of Medicine présentent leurs découvertes : elles concernent une forme de cholestérol cérébral associé à Alzheimer.
Maladie d’Alzheimer : des liens entre cholestérol et lésions cérébrales
Dans la maladie d’Alzheimer, le déclin cognitif est provoqué par la suraccumulation d’une protéine cérébrale appelée tau. "Partout où la protéine tau s’accumule, les tissus cérébraux voisins commencent à dégénérer et à mourir", précisent les auteurs dans un communiqué. Or, dans des travaux sur des souris de laboratoire atteintes d’une forme de maladie d’Alzheimer, ils ont constaté que ces dépôts de tau conduisent à l'accumulation d'une forme de cholestérol dans le cerveau, connue sous le nom d'esters de cholestérol. Selon leurs conclusions, la réduction de leurs niveaux aide à prévenir les lésions cérébrales et les changements de comportement chez les souris.
"Le lien entre le cholestérol et la démence n’est pas aussi farfelu qu’il y paraît, développent-ils. Le plus grand facteur de risque génétique de la maladie d’Alzheimer est l’APOE, un gène impliqué dans l’activation des cellules immunitaires du cerveau." Des défauts dans l’activation de ces cellules engendrent des dommages dans les tissus cérébraux. Mais APOE est aussi responsable du transport du cholestérol et d’autres lipides dans le sang.
Alzheimer : un excès de lipides avec certaines variantes génétiques
Pour mieux comprendre les liens entre l’APOE et les lésions cérébrales, les auteurs ont étudié des souris avec une prédisposition génétique forte à l’accumulation de la protéine tau. Les scientifiques américains ont aussi modifié génétiquement des rongeurs : ils ont remplacé leur gène APOE par une variante présente chez l’humain, APOE3, qui est associée à un risque moyen de maladie d’Alzheimer ou par APOE4, qui double voire triple le risque. Chez certaines souris, aucune modification n’a été réalisée.
"L'enquête a révélé qu'APOE4 est liée à un métabolisme lipidique déformé dans le cerveau, observent les auteurs. Chez des souris âgées de 9 mois et demi porteuses d'APOE4, les mêmes zones cérébrales qui se sont atrophiées et endommagées, ont également accumulé un excès de lipides." Les microglies, des cellules immunitaires, étaient remplies d’esters de cholestérol. "Les microglies remplies de lipides deviennent hyperinflammatoires et commencent à sécréter des choses qui ne sont pas bonnes pour le cerveau", explique David M. Holtzman, auteur principal de l’étude.
Alzheimer : un traitement baissant le taux de lipides semble efficace
Les scientifiques ont alors supposé que l’élimination des lipides pourrait potentiellement réduire l’inflammation cérébrale et la neurodégénérescence. Dans un second essai, ils ont administré un médicament ciblant les LXR (liver X receptors) qui abaisse les niveaux de lipides dans les cellules, aux souris ayant une prédisposition génétique à la protéine tau et porteuses d’APOE4. Chez les animaux non-traités, les dommages cérébraux sont très importants après 9 mois : ils ne peuvent plus accomplir de tâches basiques, comme la construction d’un nid.
En revanche, "les souris ayant reçu le médicament ont conservé davantage de volume cérébral que celles ayant reçu un placebo, observent les auteurs. Elles avaient également des niveaux de tau plus faibles, moins de cellules inflammatoires et moins d’inflammation, moins de perte de synapses dans leur cerveau et étaient plus douées pour construire des nids." En somme, ce traitement a permis de réduire les effets de la maladie d'Alzheimer sur le cerveau.
Maladies neurodégénératives : vers un traitement possible ?
"Ce qui est passionnant, c'est que nous constatons tous ces effets dans un modèle animal qui partage de nombreuses caractéristiques avec les maladies neurodégénératives humaines, se réjouit David M. Holtzman. Ce type d’approche pourrait être très prometteur."
Pour l’heure, la communauté scientifique doit contourner un obstacle : le traitement a des effets sur la métabolisation des lipides dans le foie et peut entraîner une stéatose hépatique.
Si les chercheurs y parviennent, le médicament pourrait avoir des effets bénéfiques non seulement sur les pathologies neurodégénératives mais aussi sur les maladies cardiaques. "Il existe de nombreuses similitudes entre le mécanisme qui pousse les cellules immunitaires à endommager le cerveau dans la maladie d’Alzheimer et celui qui pousse les mêmes types de cellules immunitaires à provoquer des dommages vasculaires dans l’athérosclérose", ajoute David M. Holtzman. "Dans les deux cas, les lipides s’accumulent dans les cellules immunitaires, les rendant hyperinflammatoires et endommageant les tissus voisins. Se débarrasser de cette accumulation de lipides peut avoir un double effet pour la santé humaine."