En France, la sclérose en plaques touche 120.000 personnes. Sa prise en charge s'est considérablement améliorée au cours des dix dernières années. Cependant, il n'existe toujours pas de traitement curatif, ni de solution thérapeutique pour les 15 % de patients atteints d'une forme progressive.
"L'une des difficultés majeures de la sclérose en plaques est que l'on n'observe pas de correspondance stricte entre la sévérité des lésions sur les fibres nerveuses et les symptômes des patients. Cela limite considérablement notre capacité à prédire l'évolution de la maladie. (…) Le défi aujourd'hui est de détecter la maladie le plus tôt possible, bien avant que les lésions ne soient visibles à l'IRM, dans l'espoir de retarder l'apparition du handicap", a déclaré le Pr Céline Louapre, neurologue à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière, dans un communiqué.
Définir la "phase prodromique" de la sclérose en plaques
De nombreuses recherches ont déjà suggéré que, chez certains patients, des symptômes, "notamment des troubles de l'humeur ou des signes génito-urinaires", étaient présents jusqu'à dix ans avant le diagnostic. Cependant, ce phénomène n’a pas été quantifié à l’échelle de la population. Afin de définir le moment exact où débute le processus inflammatoire à l'origine des lésions du système nerveux central, Céline Louapre et des chercheurs de l’Institut du Cerveau, du CNRS et de l’Inria ont réalisé une étude, dont les résultats ont été publiés dans la revue Neurology.
Pour les besoins des travaux, les scientifiques ont comparé les données médicales de 20.174 patients souffrant de sclérose en plaques, de 54.790 personnes en bonne santé et de 37.814 adultes atteints de deux maladies auto-immunes qui, comme la sclérose en plaques, touchent principalement les femmes et les jeunes adultes, à savoir 30.477 personnes touchées par la maladie de Crohn et 7.337 patients atteints de lupus. L’équipe a analysé le parcours de santé des participants, en se concentrant sur la fréquence de 113 symptômes et maladies courants au cours des cinq années précédant et des cinq années suivant le diagnostic.
"La maladie commence bien avant l’apparition des symptômes neurologiques classiques"
Selon les résultats, cinq symptômes sont associés à un diagnostic de sclérose en plaques cinq ans plus tard. Ces derniers sont la dépression, les troubles sexuels, la constipation, la cystite ainsi que d'autres infections urinaires. Cependant, ils sont également apparus dans la phase prodromique du lupus et de la maladie de Crohn, ce qui signifie qu'ils ne sont pas spécifiques à la sclérose en plaques. Autre constat : ces manifestations étaient également répandues chez les personnes en bonne santé.
"À eux seuls, ces signes ne suffiront pas à poser un diagnostic précoce, mais ils nous aideront certainement à mieux comprendre les mécanismes de la sclérose en plaques — dont les causes sont multiples — et à reconstituer son histoire naturelle. Enfin, ces nouvelles données nous confortent dans l’idée que la maladie commence bien avant l’apparition des symptômes neurologiques classiques", a conclu Céline Louapre.