- Malgré une loi de 2005 censée garantir une égalité de droits pour les personnes handicapées, leur insertion dans le monde du travail reste souvent problématique.
- Seules 30% des entreprises concernées par cette loi respectent les 6% de handicapés au sein de leurs effectifs.
- Les freins à l'insertion des handicapés dans les entreprises tiennent à des préjugés sur leur capacité à s'adapter à certaines missions.
C’est une loi que seule une minorité d’entreprises respecte: un texte adopté en février 2005 permet de garantir l'égalité des droits et des chances pour les personnes handicapées, notamment en matière d’inclusion professionnelle. Pourtant, selon Anne-Marie Lemessager, directrice handicap chez VYV3, sur les 70% d’entreprises concernées (principalement celles qui emploient plus de 20 personnes), "moins de 30% répondent à l’obligation du taux de 6% de porteurs de handicap au sein de leurs salariés".
Une proportion plutôt faible au regard des 11% de personnes handicapées au sein de la population active en France. Les explications à ce décalage seraient essentiellement liées à la persistance de préjugés et au manque de sensibilisation des entreprises sur ce sujet. Mais le résultat est que, selon l’observatoire des inégalités, le taux de chômage des handicapés était en 2022 de 12%, près du double de celui enregistré pour l’ensemble des actifs.
Des préjugés sur la productivité des handicapés
"Le regard social sur les personnes en situation de handicap fait qu’elle sont vues prioritairement sur ce handicap plutôt que sur leurs compétences, c’est une forme de stigmatisation, on ne résume pourtant pas le statut des autres personnes au fait qu’elles sont mariées, parents de jeunes enfants ou aidants de séniors dépendants !", s’étonne Anne-Marie Lemessager.
Voilà pour les préjugés qui entraînent des craintes des employeurs sur le niveau de productivité des personnes handicapées, sur le décalage qui pourrait exister entre les besoins de l’entreprise et les compétences de ces personnes ou sur le niveau et le coût des adaptations nécessaires des postes de travail pour permettre leur inclusion professionnelle. Et cela quel que soit la nature du handicap : "Ceux-ci sont très hétérogènes… mais très homogènes dans leurs conséquences !", déplore Anne-Marie Lemessager. Résultat, de nombreux employeurs concernés par la loi de 2005 préfèrent assumer le versement d’une contribution financière annuelle auprès de l’AGEFIPH (Association Nationale de Gestion des Fonds pour l’Insertion Professionnelle des Handicapés) plutôt que respecter le seuil minimum de 6% de salariés porteurs de handicap.
Des aides pour faciliter l'insertion des handicapés
"Certes, il peut parfois y avoir une réelle incompatibilité entre l’activité d’une entreprise et la présence parmi ses salariés de personnes touchées par certains handicaps", reconnait Anne-Marie Lemessager. Mais dans la plupart des cas, ces incompatibilités pourraient être levées grâce aux dispositifs qui existent pour faciliter l’insertion des handicapés dans le monde du travail. Que ce soit dans le secteur public avec le FIPHFP (Fonds pour l’Insertion des personnes handicapées dans la Fonction Publique) ou pour le privé avec l’AGEFIPH, des prestations d’appui spécifiques et des aides techniques à l’organisation ou à l’aménagement des postes de travail peuvent être accordées aux entreprises.
La présence de salariés handicapés peut bénéficier à l'entreprise
De quoi inciter, alors que les entreprises accordent désormais une place importante à leur responsabilité sociale (RSE), à ouvrir davantage les portes du monde du travail aux personnes porteuses de handicap. Avec, à la clé et à l’inverse de ce que laissent penser quelques préjugés, des bénéfices à attendre de leur présence dans les équipes professionnelles. "Ces salariés assurent souvent une meilleure cohésion au sein de l’entreprise, ils sont pour la plupart très engagés, très ponctuels, ce sont des personnes sur lesquelles on peut compter", souligne Anne-Marie Lemessager.