Si la prise en charge des femmes enceintes et parturientes s’est améliorée ces dernières années, l’accouchement reste une épreuve pour le corps des femmes. Une étude parue dans The Lancet Global Health et présentée par l’OMS le 7 décembre, révèle que chaque année, au moins 40 millions de mamans sont susceptibles de souffrir d’un problème de santé à long terme causé par l’accouchement. Cela représente une femme sur 3.
Plus d’un tiers des femmes souffrent lors des ébats sexuels après un accouchement
La majorité des quelque 140 millions de femmes qui accouchent chaque année dans le monde ne présentent aucune morbidité dans les six semaines suivant l'accouchement, rappellent les auteurs de l’étude. Toutefois, leurs travaux montrent que les affections postnatales qui persistent dans les mois, voire les années, qui suivent la naissance d’un enfant restent importantes. Parmi les complications les plus souvent relevées par les scientifiques, on peut citer :
- les douleurs pendant les rapports sexuels (appelés dyspareunies) : elles touchent 35 % des femmes dans la période du post-partum ;
- les lombalgies (32 %) ;
- l’incontinence anale (19 %) ;
- l’incontinence urinaire (8 à 31 %) ;
- l’anxiété (9 à 24 %) ;
- la dépression (11 à 17 %) ;
- les douleurs périnéales (11 %) ;
- l’infertilité secondaire (11 %) ;
- une peur de l’accouchement : entre 6 et 15 % des mamans développent ce trouble appelé tocophobie après un accouchement traumatique.
Malgré ces complications tout de même conséquentes, les auteurs notent que "ces affections ont été largement négligées dans la recherche clinique, la pratique et les politiques".
Le communiqué de l’OMS précise : "Au cours d’une revue de la littérature couvrant les 12 dernières années, pour 40 % des 32 affections prioritaires analysées dans leur étude, les auteurs n’ont recensé aucune ligne directrice de qualité récente susceptible d’appuyer un traitement efficace et n’ont trouvé aucune ligne directrice de qualité émanant d’un pays à revenu faible ou intermédiaire. Les lacunes dans les données sont également importantes : pour aucune des affections identifiées dans le cadre de la recherche, il n’existe pas d’études représentatives à l’échelle nationale ou mondiale".
"De nombreuses affections post-partum causent des souffrances considérables dans la vie quotidienne des femmes longtemps après l’accouchement, tant sur le plan émotionnel que physique, et pourtant elles sont largement sous-estimées, insuffisamment reconnues et déclarées », déplore la Dre Pascale Allotey, Directrice du Département Santé sexuelle et reproductive, et recherche à l’OMS. « Tout au long de leur vie, et au-delà de la maternité, les femmes doivent avoir accès à une gamme de services dispensés par des prestataires de soins de santé à l’écoute de leurs préoccupations et qui répondent à leurs besoins — afin qu’elles puissent non seulement survivre à l’accouchement, mais aussi jouir d’une bonne santé et d’une bonne qualité de vie."
Santé des femmes : pour une meilleure prise en charge
Pour les auteurs de l’étude, il est essentiel que les institutions et les professionnels de santé prennent en considération ces problèmes courants, “dont beaucoup surviennent après le moment où les femmes ont généralement accès aux services postnataux”. Ils appellent aussi à la mise en place de soins efficaces tout au long de la grossesse et de l’accouchement pour prévenir les risques de complications susceptibles d’entraîner des problèmes de santé durables après l'accouchement. Pour eux, il faut porter une plus grande attention à la santé des femmes et des filles après mais aussi avant la grossesse, et également à leurs conditions sociales, économiques et environnementales qui peuvent avoir un impact.
“Le manque d’attention portée à ces questions fondamentales explique en partie pourquoi 121 pays sur 185 n’ont pas réussi à faire des progrès significatifs dans la réduction de la mortalité maternelle au cours des deux dernières décennies”, déplore le rapport.
"La santé maternelle n’est pas quelque chose dont nous devrions seulement commencer à nous préoccuper lorsque le ventre de la future mère s’arrondit", ajoute Joao Paulo Souza, directeur du Centre d’information sur les sciences de la santé pour l’Amérique latine et les Caraïbes (BIREME) pour l’OPS/OMS et l’un des auteurs du premier article. "De nombreux facteurs influent sur la probabilité d’une grossesse en bonne santé pour une femme, depuis l’environnement qui l’entoure jusqu’aux systèmes politiques et économiques dans lesquels elle vit, en passant par l’accès à des aliments nutritifs et le niveau d’autonomie qu’elle a dans sa vie — tous ces facteurs doivent être pris en compte pour améliorer sa santé, parallèlement à l’accès à des soins de santé de qualité tout au long de la vie."