- L'émail est la couche dure à la surface de la dent. Son rôle est de protéger la dentine et la pulpe dentaire.
- Une maladie auto-immune pourrait être responsable du développement défectueux de l’émail dentaire chez les enfants.
- Les maladies auto-immunes sont causées par un dysfonctionnement du système immunitaire.
L’émail dentaire caractérise la substance la plus dure et la plus minéralisée de l’organisme. Il participe à la protection de la dentine et de la pulpe dentaire. Il est donc important d’en prendre soin pour empêcher son érosion. Mais, une équipe de l'Institut Weizmann des sciences (États-Unis) a révélé avoir découvert une maladie auto-immune qui entraverait le développement correct de l’émail dentaire chez les enfants.
Lors de leurs travaux publiés dans la revue Nature, ils ont constaté que cette maladie est fréquente chez les enfants atteints d'un syndrome génétique rare et/ou souffrant de la maladie cœliaque, autrement dit l’intolérance au gluten.
Le système immunitaire attaquerait les protéines aidant à la formation de l’émail
Les chercheurs sont partis d’un constat : les personnes atteintes par l’APS-1, une maladie génétique rare, présentent un développement défectueux de leur émail dentaire dans leurs dents définitives alors que leurs dents de lait se sont formées normalement. Comme les patients atteints par ce syndrome présentent généralement diverses maladies auto-immunes, les scientifiques ont supposé que les défauts de l'émail observés pourraient également être de nature auto-immune. Cela signifie que le système immunitaire pourrait attaquer ses propres protéines ou cellules, qui sont nécessaires à la formation de l’émail.
Normalement, pour éviter que le système immunitaire vise ses propres tissus, les cellules ou lymphocytes T, qui se développent dans le thymus, doivent être "éduquées", afin de faire la distinction entre les protéines propres à l'organisme et celles d'origine étrangère reconnues comme infectées. Mais comme l’ont expliqué les chercheurs, cette étape d’éducation des lymphocytes T est altérée chez les patients présentant l’APS-1 en raison d’une mutation dans le gène régulateur auto-immun (Aire). Ce dernier joue un rôle essentiel au processus d’éducation des cellules T : il produit une protéine responsable de la collecte des autoprotéines présentées aux cellules T dans le thymus.
Maladie auto-immune : pourquoi seules les dents définitives sont touchées ?
Les chercheurs ont ensuite tenté de comprendre comment les mutations du gène Aire conduisent à une production déficiente d'émail dentaire. En l’absence du gène Aire, les protéines, qui jouent un rôle clé dans le développement de l'émail, ne sont pas présentées aux cellules T dans le thymus. Les lymphocytes T sont alors libérés du thymus, ce qui favorise la production d’anticorps dirigés contre les protéines de l’émail.
Toutefois, une question subsiste : pourquoi ces auto-anticorps endommagent-ils les dents permanentes et non les dents de lait ? Cela s'explique par le fait que les dents de lait se développent au stade embryonnaire. Pendant la grossesse, le système immunitaire n'est donc pas encore complètement formé et ne peut pas créer d’auto-anticorps. En revanche, il est suffisamment mature pour empêcher le développement de l'émail des dents définitives, qui commence à la naissance et se poursuit jusqu'à l'âge de six ans environ.
Selon les scientifiques, ces résultats pourraient contribuer à l'élaboration de stratégies de détection précoce et de prévention de cette maladie auto-immune.
Les défauts de l'émail des dents sont fréquents, pas seulement chez les personnes atteintes de la maladie cœliaque ou de l'APS-1. "Beaucoup de gens souffrent d'une altération du développement de l'émail dentaire pour des raisons inconnues", explique Pr Jakub Abramson, auteur principal de l'étude, dans un communiqué. "Il est possible que le nouveau trouble que nous avons découvert, ainsi que la possibilité de le diagnostiquer dans un test de sang ou de salive, donnent un nom à leur état. Plus important encore, le diagnostic précoce chez les enfants peut permettre un traitement préventif à l'avenir."