À l’échelle mondiale, on estime que 5 % des adultes souffrent de dépression, selon l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), une maladie qui se caractérise par une succession d’épisodes dépressifs, avec des symptômes tels que la tristesse pathologique, la perte de plaisir, d’élan vital, etc. D’après l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), entre 10 et 20 % des personnes souffrant de cette maladie meurent par suicide.
Des biomarqueurs de la dépression et des pensées suicidaires
Pouvoir identifier en amont les personnes les plus à risque de dépression et de pensées suicidaires est donc un enjeu important. C’est ce sur quoi les chercheurs de l'Université de Californie, à San Diego aux États-Unis, ont travaillé. Leurs travaux ont été publiés dans la revue Translational Psychiatry. Les scientifiques ont découvert que les personnes souffrant de dépression et d’idées suicidaires avaient des biomarqueurs spécifiques, c’est-à-dire des composés détectables dans leur sang.
Lors de leurs travaux, les scientifiques ont analysé le sang de 99 participants souffrant de dépression pour qui les traitements n’étaient pas efficaces et qui avaient des idées suicidaires. Ils les ont comparés aux analyses sanguines de 93 patients sains. Ainsi, ils ont découvert cinq biomarqueurs de la dépression et des idées suicidaires chez les hommes et cinq chez les femmes.
Parmi eux, les biomarqueurs du dysfonctionnement mitochondrial étaient les mêmes chez les deux sexes. Les mitochondries sont des organites qui jouent un rôle central dans le métabolisme énergétique cellulaire. Elles produisent de l’énergie sous la forme d’une molécule dite ATP pour Adénosine-Tri-Phosphate. Selon les scientifiques, c’est cette fonction qui est la plus déréglée chez les personnes ayant des pensées suicidaires.
Mieux dépister les personnes à risque de dépression
"Lorsque l'ATP est à l'intérieur de la cellule, elle agit comme une source d'énergie, mais à l'extérieur de la cellule, c'est un signal de danger qui active des dizaines de voies de protection en réponse à un facteur de stress environnemental, détaille Robert Naviaux. Nous émettons l'hypothèse que les tentatives de suicide pourraient notamment venir d'une impulsion physiologique plus large visant à mettre fin à une réponse au stress devenue insupportable au niveau cellulaire." Pour les scientifiques, cette découverte pourrait permettre la mise au point de traitements plus ciblés pour les patients atteints de dépression et de pensées suicidaires, en agissant notamment sur le dysfonctionnement mitochondrial.
"De nombreuses maladies chroniques sont associées à la dépression, car c’est très stressant de faire face à une maladie pendant des années, indique Robert Naviaux. Si nous pouvions trouver des moyens de traiter la dépression et les idées suicidaires au niveau métabolique, nous pourrions également contribuer à améliorer les résultats pour les nombreuses maladies qui conduisent à la dépression. (...) Si la métabolomique pouvait être utilisée pour identifier les personnes les plus à risque, elle pourrait à terme nous aider à sauver davantage de vies.”