- En 2016, personne ne prend au sérieux la jeune maman quand elle évoque ses doutes au sujet de son fils. “C’était instinctif, pour moi c’était clair que dans son comportement il y avait des choses qui ne collaient pas”, explique-t-elle.
- Son fils Sasha est finalement diagnostiqué autiste à 16 mois, ce qui est rare en France, puisque le diagnostic n'arrive bien souvent qu'entre 3 et 5 ans.
- Très vite, face au manque de prise en charge du monde médical, Valentine s’informe et se forme pour décider quel “protocole” utiliser pour aider son fils à “sortir de l’autisme”.
Sasha a 9 ans et demi, il va à l’école tous les jours de 8h30 à 16h et termine sa journée avec des activités extra-scolaires. Un enfant, comme n’importe quel autre jeune de son âge, pourrait-on dire, sauf que le jeune garçon a été diagnostiqué autiste à l’âge de seize mois. “Vous devez faire le deuil de votre fils”, avait alors déclaré froidement un médecin à sa maman, Valentine.
Ce diagnostic qui est tombé “comme un couperet” pour la famille, fut également une chance. En effet, les enfants autistes sont souvent diagnostiqués trop tardivement en France, entre 3 et 5 ans (selon les données de la Haute Autorité de Santé), entraînant une moins bonne prise en charge. “C’est assez exceptionnel de vous en être aperçue si tôt”, lui a d’ailleurs fait remarquer une psychologue à l’époque.
Enfant autiste : “pour moi c’était clair que dans son comportement il y avait des choses qui ne collaient pas”
C’est d’autant plus exceptionnel qu’en 2016, personne ne prend au sérieux la jeune maman quand elle évoque ses doutes au sujet de son fils. “Fichue crèche, où tous me prennent pour une folle lorsque je demande si c’est normal que mon fils n’arrive pas à s’adapter au bout de plusieurs semaines…”, écrit Valentine dans son livre. Même constat du côté des amis qui, malgré leur bienveillance, tentent tout de même de la raisonner. Idem chez la pédiatre, qui “ne voit rien d’anormal”, lui répliquant : “on est toujours angoissé pour le premier !” - fameuse phrase, presque insultante, que beaucoup de mères entendent encore aujourd’hui quand elles s’inquiètent “un peu trop” pour leur enfant. Et même quand Valentine en parle pour la première fois au papa de Sasha, qui est aujourd’hui son ex-mari, ce dernier lui rétorque qu’elle “psychote”, qu’elle est “stressée” et “angoissée” et que c’est elle qui “rend cet enfant nerveux”.
Malgré ça, la maman ne démord pas. “C’était instinctif, pour moi c’était clair que dans son comportement il y avait des choses qui ne collaient pas”, se justifie-t-elle. “Quand votre enfant ne regarde pas dans votre direction quand vous faites du bruit ou que vous l’appelez, alors que vous savez qu’il n’est pas sourd, c’est forcément qu’il y a un problème quelque part. Et il y avait d’autres signes très clairs : par exemple à un an, un bébé commence un peu à parler normalement, ce qui n’était pas du tout le cas de Sasha.” Le bébé n’aimait ni les câlins, ni les caresses, il ne pointait pas les objets pour les montrer, etc. “Dès que j’ai trouvé sur Internet la checklist pour savoir si un enfant est dans le spectre autistique, je me suis aperçue que le comportement de mon fils cochait toutes les cases. Il n’y avait plus aucun doute possible.”
Après le diagnostic, le début d’une course folle commence pour la maman
La pose du diagnostic n’est que la première marche d’une longue ascension pour la jeune maman. En effet, Valentine se rend très vite compte que les professionnels de santé eux-mêmes, ne savent pas très bien comment prendre en charge son enfant. Il faut dire qu’en 2016, les troubles autistiques sont encore peu étudiés. “Je me sens complètement perdue et j’ai l’impression que les professionnels ne sont pas d’accord entre eux”, note Valentine qui refuse de faire entrer son fils dans une case. “Tous, médecins et thérapeutes, délivrent juste des pistes comportementales qui permettent de mieux vivre avec la pathologie.”
Méthode des 3-i, Son-Rise… En cheffe d’entreprise aguerrie, la maman se lance alors dans de nombreuses recherches. Elle s’informe et se forme pour décider quel “protocole” utiliser pour aider son fils à “sortir de l’autisme”. Très vite, elle met en place une thérapie intensive de 40 heures par semaine, les weekends en supplément : la méthode Son-Rise est devenue une hygiène de vie au quotidien pour la famille. “C'est un état d'esprit applicable chaque minute.” Pour ce faire, elle transforme en moins d’un mois une pièce de son appartement en “salle de jeux” neutre, où le “non” n’existe pas, et dans laquelle tous les jouets figurent en double. Le principe ? Entrer dans la bulle de Sasha en l’imitant, en le rejoignant dans son monde, sans élément perturbateur autour. L’idée ici est de ne pas forcer l’enfant à s’ouvrir au monde, mais de le laisser s’y intéresser à son rythme, comme lui l'entend.
“Je cherchais des personnes avec des bonnes intentions et une énergie positive”
Le très jeune garçon voit alors plus d’une vingtaine de bénévoles défiler dans cette salle, à raison d’une heure de séance chacun. “J’ai commencé avec des bénévoles puis des professionnels qui ne venaient pas spécifiquement du monde de l’autisme pour ne pas être dans un carcan. Je cherchais des personnes avec des bonnes intentions et une énergie positive ! Par exemple, j’ai demandé à un musicien de venir jouer de la musique pour mon fils…”
Au fil des mois, des années, Valentine Lecêtre créé presque sa propre méthode, en piochant par-ci par-là tout ce qui existe, et en l’adaptant aux besoins de son fils, en fonction de son évolution. Elle raconte son parcours dans son livre “Sortir de l’autisme”, publié aux Éditions ideo. Un livre qu’elle a écrit pour aider les autres parents qui se retrouveraient dans sa situation à avoir la force et trouver le courage d’accompagner leur enfant. Elle reconnaît qu’aujourd’hui, elle ne peut pas savoir comment serait son fils si elle avait simplement suivi les conseils des professionnels de santé à l’époque, mais les résultats de son protocole sont plus que probants. “Aujourd’hui Sasha va si bien ! C’est le bonheur tous les jours ! C’est un enfant avec qui j’ai de vrais échanges. Alors il y encore quelques rattrapages à faire, notamment au niveau des expériences, parce qu’il n’a pas pu avoir les mêmes que les autres enfants de son âge… Mais aujourd’hui, Sasha est bon en classe et bon au niveau social. Il n’a plus d’intervenant avec lui, il ne voit plus qu’une pédopsychiatre une fois par semestre, une psychomotricienne une fois par semaine et une ergothérapeuthe pour lui faire travailler sa motricité fine et son écriture.”
Suspicion de troubles autistiques : “les parents doivent se faire confiance”
“Si un parent a un doute concernant son enfant, il faut : 1 se faire confiance, 2 agir vite et 3 garder espoir, insiste Valentine. Il faut vraiment se rendre compte de l’urgence de la situation et avancer quels que soient ses moyens, avec au moins une petite équipe de personnes pour être aidé !”
“Je conseille aux parents de se former au moins à Son-Rise pour comprendre la méthode, car si on prend plus l’enfant en considération en appliquant des méthodes bienveillantes, il pourra maturer de manière plus sereine. Les enfants autistes qui s’auto-mutilent, qui se tapent la tête contre les murs, c’est surtout des conséquences liées à leur environnement et aux interactions qui sont très envahissantes pour eux, y compris le regard des parents qui peut être très dur à supporter pour ces enfants.”
Pour aider les parents, Valentine a également lancé le site internet https://www.sortirdelautisme.fr/ dans lequel on retrouve bon nombre de conseils et de contacts importants.