- Mireille a découvert qu'elle était atteinte d'une Dégénérescence Maculaire Liée à l’Âge de forme sèche, il y a vingt ans. Cette maladie se caractérise par une atrophie progressive des cellules de la macula, la zone centrale de la rétine.
- La progression de la maladie a été très lente. Elle n'a quasiment pas été gênée la première décennie, mais sa perte d'acuité visuelle est désormais importante et complique son quotidien.
- La DMLA est la première cause de handicap visuel chez les plus de 50 ans. La maladie touche environ 30 % des plus de 75 ans.
"Je souffre de DMLA atrophique, aussi appelée sèche. Cette maladie se caractérise par une atrophie progressive des cellules de la macula (centre de la rétine, NDLR). Ainsi, à l'intérieur de celle-ci, j’ai une zone atrophiée qui se développe et qui envoie de moins en moins d'informations à mon cerveau. Au fur et à mesure que les cellules visuelles meurent, la perte de la vision centrale devient de plus en plus importante", explique Mireille Martin.
Si la maladie oculaire avec laquelle elle vit depuis 20 ans n’a plus vraiment de secret pour elle, la Francilienne a découvert qu’elle en souffrait… presque par hasard.
DMLA : "Je suis tombée des nues"
Ayant très régulièrement des mouches dans son champ de vision, Mireille a décidé de consulter son ophtalmologue qu’elle voyait très régulièrement puisqu’elle porte des lunettes depuis l’âge de 10 ans. Mais la médecin s’est montrée très rassurante : ces corps flottants du vitré ne sont pas graves.
"Elle a toutefois profité de ma présence pour faire un fond d'œil. Et là, elle m’a dit : je vois des drusens", se souvient Mireille. À l'époque, elle ne savait pas ce que c’était. Il s’agit de dépôts issus de la destruction de cellules de la macula. Cette information n’a pas inquiété la patiente sur le moment. "J’avais compris que c’était un signe que peut-être un jour une maladie pourrait survenir, mais pas qu’il s’agit du premier symptôme de la DMLA." Elle a réalisé sa méprise deux ans plus tard lors de sa visite de routine. Pendant la consultation, l'ophtalmologue lui a indiqué qu’elle allait vérifier la progression de sa DMLA. "Je suis tombée des nues, car je n’avais pas du tout compris deux ans plus tôt que j’avais cette maladie." Des examens approfondis ont confirmé qu’elle souffrait d’un début de DMLA sèche.
Comment avait-elle pu vivre ces deux années sans réaliser son trouble ? Cette forme de DMLA évolue généralement très lentement. Et ce fut le cas pour Mireille. "À ce moment, je n’étais absolument pas gênée dans ma vie quotidienne. En effet, tant que l’atrophie n’est pas importante, le cerveau est capable de compenser le manque d’information. La vision est très peu perturbée."
Perte d'acuité visuelle : "Le problème de ce déni a été la conduite automobile"
La DMLA de Mireille a connu une évolution particulièrement lente. Pendant 10 ans, la maladie n’a quasiment pas freiné ses activités, ni perturbé son quotidien. Lecture, travaux manuels, déplacements… elle restait totalement autonome. Cette dégradation très lente de l’acuité visuelle a nourri une certaine forme de déni du trouble. "Comme cela ne me gênait pas beaucoup, je n’en tenais pas compte. Le problème de ce déni a été la conduite automobile. J’ai eu un accident de voiture il y a 10 ans à cause de ma mauvaise vue. J’avais l’impression qu’il n’y avait pas de signes, mais je commençais vraiment à avoir des problèmes de vue."
"Quelque part au fond de moi, je savais que la conduite était devenue difficile. Que je devais me concentrer pour lire les panneaux. Mais je ne voulais pas le voir. C’est très dur d’accepter la perte d’une certaine forme d’indépendance. Je l’ai vécu brutalement."
DMLA : "Ce n’est pas de la cécité, car j’ai la vision périphérique"
La maladie a poursuivi sa progression. Aujourd’hui, Mireille n’a plus que 0,5 d'acuité visuelle à un œil et 2,5 à l’autre. "Ce n’est pas de la cécité, parce que j’ai la vision périphérique. Si je ne vois plus les détails, ni ce qui est en face de moi, je perçois l’environnement".
Mais cette perte d'acuité visuelle partielle a bouleversé son quotidien. En plus de ne plus conduire, elle ne peut plus lire. "Sauf dans des conditions très particulières, précise-t-elle. Souvent les gens me disent que je n’ai qu’à grossir les lettres. Mais en fait, ce n’est pas efficace, car mon champ visuel restant est petit. Si la lettre est trop grosse, il n’y aura qu’un morceau dans mon champ visuel. En réalité, il me faut une police épaisse et un texte contrasté. Je ne peux plus lire sur du blanc comme les magazines ou les livres par exemple. Je ne peux lire que sur ma liseuse ou ma tablette où les lettres sont blanches sur un fond noir."
Faire ses courses, se déplacer seule dans un lieu inconnu, mettre une clé dans une serrure, une fiche dans une prise… tout ce qui semble acquis aux voyants est devenu compliqué. "Quand je vais au restaurant, je dois demander à mes amis de me lire la carte, mais aussi de m’expliquer ce qu’il y a dans mon assiette, car je n’arrive pas à l’identifier."
"J’ai mis des années à me dire que j'étais handicapée. C’est lorsque que je me suis approchée de l’association DMLA que j’ai commencé à l’accepter. Travailler avec l’organisation et rencontrer des personnes connaissant les mêmes difficultés m’a beaucoup aidé."
Verre renversé, pommes de terre mal épluchées… Mireille préfère désormais rire avec sa famille des travers de sa pathologie. “Il faut accepter que les choses ne soient pas faites parfaitement, sinon on ne les fait plus du tout”, prévient-elle.
Toutefois, elle déplore que la société ne prenne pas en compte davantage les difficultés des malvoyants. "Pour la société, on est soit voyant, soit aveugle. Alors qu’il y a des choses élémentaires qui nous faciliteraient vraiment le quotidien. Par exemple, les feuilles de sécurité sociale sont blanches et oranges. Pour quelqu’un comme moi, il n’y a pas assez de contraste entre le fond et l’écriture, on ne peut pas lire le document. Si c’était blanc et noir, je pourrais voir, mais avec ces couleurs, non. Rien n’est pensé pour les malvoyants."
"Il y a un dépistage extrêmement simple de la DMLA"
Si la DMLA est la première cause de handicap visuel chez les plus de 50 ans et touche environ 30 % des plus de 75 ans, elle reste peu connue du grand public. Pour Mireille, il est essentiel de consulter l'ophtalmologiste à partir de 50 ans, âge où les premiers signes de la pathologie apparaissent. Par ailleurs, il existe un test simple pour dépister les symptômes de la DMLA appelé grille d’Amsler. “C’est une grille avec des lignes verticales et horizontales et un point au centre. Vous fixez le point en vous cachant un œil, puis avec l’autre. Si les lignes se tordent ou se déforment, même légèrement, vous avez de la DMLA. C’est simplissime."
Et même, si la maladie a une évolution lente, il est préférable d’agir au moindre doute. "Pour la DMLA sèche, une prise en charge précoce ne change pas grand-chose, car il n’y a pas de traitement", reconnaît Mireille. "Mais pour les personnes qui ont de la DMLA humide, l’autre forme de la maladie, c’est important. Plus elle est traitée tôt, plus les patients ont de chance de la ralentir ou de la stopper pour un certain temps."
"Il ne faut surtout pas rester seul dans son coin avec sa maladie", conclut Mireille.