Pourquoi Docteur : L’hypnose médicale, qu’est-ce que c’est ?
Dr Marie-Charlotte Desmaizières : C’est un outil de gestion de la douleur et de l’anxiété principalement. Sa définition exacte est un « état modifié de la conscience ». Le terme médical est important car l’hypnose existe dans différents domaines, dont celui du spectacle pour lequel on utilise les mêmes principes de base mais avec un objectif différent. Dans l’hypnose médicale, cet objectif est à définir avec le patient pour l’aider, par exemple, à surmonter la douleur ou des effets indésirables de traitement.
Comment ça se passe ?
L’hypnose correspond à la dissociation de l’état de conscience avec la cohabitation de la conscience critique et la conscience imaginaire ou virtuelle. Cette dernière permet d’aller vers des choses qui font du bien. Mais la personne n’est pas endormie. La conscience critique est d’ailleurs toujours là pour réagir en cas de danger. La personne n’est pas bloquée dans l’imaginaire.
Cela ressemble à ce qui est ressenti lors de la « conduite automatique » : nous sommes concentrés sur la route mais en même temps assez perdus pour ne pas savoir combien de temps on a été plongé dans nos pensées. Mais la conscience critique est toujours là si un danger survenait. Nous réagirions et c’est plutôt rassurant !
Concrètement, il y a un entretien préalable entre le patient et le soignant, puis pendant la séance, une phase d'induction hypnotique (état de conscience modifiée), ensuite une phase de travail (avec des suggestions hypnotiques), puis la phase de retour d'hypnose.
Hypnose : « il est préférable que l’hypnose soit exercée par des médecins ou des soignants »
Quelle différence entre hypnose médicale et hypnose de spectacle ?
Il existe une réticence à l’hypnose car l’hypnose médicale est souvent confondue avec l’hypnose de spectacle qu’on rattache souvent à de la manipulation. D’ailleurs dans ce cas, c’est plus un problème de conditionnement (les spectateurs sont motivés et se sont déjà préparés au fait qu’ils sont susceptibles de monter sur scène, de participer) et d’autant plus que l’intervenant est connu. Cela part aussi d’une motivation initiale du patient (une suggestion en quelque sorte). Ce n’est pas une manipulation, mais plutôt l’utilisation des envies des gens.
Il faut savoir que si certains se disent non réceptifs à l’hypnose de spectacle cela ne signifie pas qu’ils ne le seront pas pour l’hypnose médicale.
Il existe 10 % de personnes qui sont hyper réceptives à l’hypnose, 10 % qui sont hypo réceptives et les 80 % restants peuvent être réceptives.
Il est préférable que ce soit des soignants (médecins, sages-femmes, infirmiers…) qui pratiquent l’hypnose car il s’agit d’un outil, d’une aide, et il faut être en capacité de proposer autre chose si ça ne fonctionne pas. Ces praticiens sont d’ailleurs formés par des professionnels de santé dans des établissements reconnus.
C’est reconnu scientifiquement ?
En fait, il y a tout un historique de l’hypnose. Et ça débute en –6000 avant JC, avant l’arrivée des anesthésiques. Et son utilisation a permis de moins utiliser de gaz anesthésiant, puis de produits anesthésiants, et ainsi d'en diminuer les effets secondaires.
Et de nombreuses études scientifiques ont prouvé leur efficacité. L’hypnose est ainsi progressivement arrivée dans les hôpitaux.
Hypnose : « s’adapter au patient et à ses envies »
-L’hypnose est utilisée dans quels domaines ?
Elle est utilisée en maternité, au bloc-opératoire, dans les services de médecine, en psychiatrie (mais dans ce cas en psychothérapie), en radiologie (quand on passe une IRM par exemple), en kinésithérapie (pour diminuer la douleur et l’appréhension), en oncologie (pour diminuer les nausées, les vomissements, accompagner les familles…), au laboratoire (pour atténuer la douleur de la piqûre), dans les centres d’évaluation et de traitement de la douleur (douleurs chroniques).
L’hypnose médicale permet d’accompagner les patients dans le cadre des effets secondaires de chimiothérapie, de l’anxiété, de l’annonce de mauvaises nouvelles, la pose d’un PAC (boitier positionné sous la peau et relié à un cathéter utilisé principalement en chimiothérapie, NDLR), etc. Dans ce cas elle apporte un soulagement le jour du geste ou en amont en contrôlant l’anxiété. L’auto-hypnose (apprise lors de séances en groupe ou individuelles) peut également être utilisée, notamment pour la douleur, en préparation de l’accouchement, lors de la pose de péridurale, afin d’apprendre à gérer et vivre avec.
Au bloc opératoire, l’hypnose peut être utilisée en accompagnement d’une anesthésie générale afin de diminuer les doses d’anesthésiques et donc les effets secondaires. Cela permet un réveil dans le calme comme à l’endormissement, avec une diminution des douleurs.
La seconde manière d’utiliser l’hypnose au bloc est l’hypnosédation qui est couplée avec une anesthésie locale et une sédation adaptée du patient. Cette pratique est réservée à des interventions plus « superficielles » mais réalisées habituellement sous AG (coloscopie, ablation d’une tumeur mammaire…). Le patient pourra faire signe au praticien au moindre problème.
Mais tout cela se prépare en amont en consultations au cours desquelles le professionnel explique le déroulement.
Y-a-t-il des effets secondaires ?
Il n’y a pas de contre-indications ni d’effets secondaires si le professionnel de santé est bien formé. Les effets secondaires ne sont que positifs sur le patient, mais aussi le personnel médical et les accompagnants. Ce qui est important est de s’adapter au patient et à ses envies.
A noter que l’hypnose n’est pas remboursée par la sécurité sociale mais peut l’être par certaines mutuelles.