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Etude de l'opéra Siegfried

Les opéras de Wagner suivent le rythme de ses migraines

Par Audrey Vaugrente

Le succès de Wagner est en partie dû à ses migraines. Une étude publiée dans le BMJ de Noël révèle qu'il a utilisé ses douleurs pour composer ses opéras.

Siegfried (Ben Heppner) et Mime (Ulrich Burkhard) dans l'opéra Siegfried en 2008 (Claude Paris/AP/SIPA)

Troubles fonctionnels, maladie de peau, infections, maladie cardiaque... Le génie de l'opéra allemand, Richard Wagner, est aussi connu pour ses problèmes de santé. Plusieurs chercheurs se sont déjà penchés sur l'état de santé du compositeur. Mais dans son édition de Noël, le British Medical Journal, s'intéresse à ses migraines.
Cette étude allie histoire de la musique et médecine : ses migraines auraient influencé la composition de ses opéras. Ce que le compositeur nommait « la peste de mon existence » s'est finalement avéré être un outil de travail. Une équipe de chercheurs allemands a voulu savoir à quel point l'homme a utilisé sa souffrance pour écrire l'opéra Siegfried, troisième volet du cycle de « L'Anneau de Nibelung ». Ce handicap ne semble pas avoir nui à son génie.

 

Richard Wagner traduit dans Siegfried les différentes caractéristiques d'une migraine. Selon les chercheurs, l'opéra évoque une phonophobie à certains endroits, et la composition donne des « indices importants » sur le tempo des migraines qu'il a subies. Dans ses correspondances, le compositeur décrit en détail ses douleurs. Récemment, deux mises en scène retracent ces épis : Anthony Pilavchi donne au personnage principal, Mime, les symptômes de la migraine. Claus Guth présente le même Mime souffrant d'une overdose à l'aspirine, dans le but d'atténuer le mal de tête.

 

Une « pulsation presque douloureuse »

Les personnages ne sont pas les seuls à souffrir des maux de tête de Wagner. Plusieurs morceaux de l'opéra Siegfried font revivre à l'auditeur l'expérience d'une migraine avec aura. La scène 1 de l'acte I, intitulée « Swangvolle Plague » en reproduit les sensations physiques. La musique commence par un battement pulsé, à peine audible, qui s'intensifie jusqu'à atteindre « une pulsation presque douloureuse ». A l'apogée du morceau, Mime s'écrie « Peste compulsive ! Douleur sans fin ! »

 

 

La scène 3 de l'acte I reprend quant à elle l'expérience visuelle d'une « migraine nerveuse », que Wagner décrit dans ses mémoires comme une « ligne mélodique scintillante, clignotante, brillante, avec un motif en zig-zag ». Les manifestations d'une migraine opthalmique. Mime, lui, présente tous les symptômes de la photosensibilité. Il chante : « Immonde lumière ! L'air est-il en flammes ? »

 

La souffrance « au coeur de la musique »

Dernier trait de génie du compositeur allemand : la fréquence sonore utilisée dans Siegfried. Les chercheurs ont analysé celle du scintillement vécu lors d'une migraine. Il est en moyenne de 17,8 hertz. Wagner utilise régulièrement cette fréquence dans son opéra. Le tempo d'origine lui-même reproduisait une crise de migraine, mais il n'a pas été respecté lors de la première. Ce qui n'empêche pas les chercheurs que considérer que cette souffrance est « au coeur de la musique » du compositeur.

 

Richard Wagner, conclut l'étude, était « sévèrement handicapé » par ses migraines, mais a utilisé sa douleur de manière créative, en « laissant les générations futures prendre part à ses émotions et à ses perceptions. » Ils s'interrogent sur ce qu'aurait été la musique de Wagner s'il avait suivi un traitement.