"Il y a cinq ans, j’ai commencé à ressentir une douleur au niveau du ventre, si intense qu’elle me réveillait la nuit", se rappelle Sandra Dupont, aujourd’hui âgée de 50 ans. Direction la gastro-entérologue : la prise de sang ne montre rien de particulier, mais sur les soupçons de la médecin, Sandra se voit prescrire un Fibroscan, un examen qui permet de mesurer le degré d'élasticité du foie, et donc les éventuelles lésions de l’organe. Alors qu’elle souffrait déjà depuis quelques années d’un syndrome de l’intestin irritable, le nouveau diagnostic tombe : "On s’aperçoit que j’ai un foie gras." Autrement dit, une stéatose hépatique non alcoolique, une pathologie qui se développe lorsque le foie accumule trop de graisses, d’où son surnom de "maladie du foie gras". Un diagnostic qui vient notamment expliquer pourquoi cette mère de trois enfants n’arrivait pas à perdre du poids depuis sa ménopause précoce, à 43 ans : "C’était comme si j’étais toujours enceinte de quatre mois !"
"J’ai consulté une diététicienne et je me suis mise sérieusement au sport"
Pour Sandra, d’abord "soulagée" d’avoir enfin mis le doigt sur la maladie, puis évidemment "inquiète" pour la suite, le verdict est une "prise de conscience". "J’ai décidé de consulter une diététicienne et je me suis mise sérieusement au sport", avec au programme trois séances par semaine dans une salle de gym, beaucoup de course à pied et du vélo pour aller au travail. "La maladie m’a alertée sur la nécessité de prendre soin de moi, ce que je ne faisais pas auparavant : j’allais rarement chez le médecin, je ne faisais pas de sport, je ne mangeais pas sainement, beaucoup d’aliments transformés dans l’assiette." La faute notamment à une vie parisienne "très active" : "Je devais courir partout, avec ma vie de famille et mon travail je n’avais tout simplement pas le temps !"
Aujourd’hui, fini la malbouffe et son triptyque gras-sucre-sel, place au fait-maison. "Je ne mange plus du tout d’aliments transformés, je cuisine des produits frais et des recettes à IG bas [faible index glycémique] et j’essaie de consommer le moins de sucre possible." Un régime rigoureux, adopté par toute la famille, qui exige une certaine logistique : "C’est un effort d’anticipation des courses, d’autant que je suis végétarienne, donc je dois prendre garde à ne pas manquer de protéines, de vitamines, etc. Je fais mes menus à la semaine, je sais ce dont j’ai besoin et je n’y déroge pas. Ça demande une organisation."
Compliqué certes, mais indispensable car, à cause de son syndrome de l’intestin irritable qui provoque gonflements, constipation ou encore diarrhée, le corps de Sandra n’hésite pas à lui signaler le moindre écart. "Dès que mon intestin ne supporte pas un aliment, transformé ou trop sucré par exemple, il tire immédiatement la sonnette d’alarme. Au moins c’est radical ! Mon ventre, c’est mon thermomètre."
Comme toutes les addictions, éviter le sucre est un "combat de tous les jours"
"Le plus gros sacrifice à mes yeux, c’est l’arrêt du sucre", reconnaît la mère de famille. Accoutumée "depuis [sa] tendre enfance", elle avait en effet "l’habitude de manger très, très sucré" : paquets de biscuits avec ses enfants pour le goûter, plats industriels bourrés de sucres raffinés pour les repas, confiseries... "Très peu d’alcool et aucun soda" en revanche, alors que la maladie du foie gras est aussi surnommée la "maladie du soda".
Dire non au sucre est, comme toutes les addictions, un "combat de tous les jours", selon Sandra, encore en proie régulièrement à des "petites pulsions de sucre". "Il suffit parfois d’une fatigue passagère ou d’une mauvaise nouvelle au travail pour que je me reporte sur le sucre. Maintenant, c’est une addiction surtout psychologique, donc une question de volonté, mais c’est difficile d’arriver à se raisonner tout le temps." D’autant plus quand les tentations sont partout au supermarché.
Sans compter que le sucre appelle le sucre : "Il suffit de faire un écart sucré un jour pour avoir de nouveau envie de sucre deux ou trois jours plus tard. Ce n’est que lorsque j’arrive à ne pas en prendre durant deux ou trois semaines que l’envie disparaît, qu’il y a comme un déclic." Pendant ce temps, pour tromper ses sens et rassasier son désir de sucre, Sandra trouve quelques stratagèmes, comme deux clémentines pour le quatre-heures. "Mais bon...", souffle-t-elle. Comprendre : ce n’est pas pareil...
La bonne nouvelle, c’est qu’on se déshabitue peu à peu du sucre. L’habitante de la Nouvelle-Aquitaine est bien placée pour le dire. A force d’en manger moins, certains aliments faibles en sucre lui paraissent finalement plus sucrés qu’avant, et donc plus savoureux sous le palais. "Aujourd’hui, par exemple, je ne mange plus que du chocolat noir à 70 % de cacao minimum, et ça me convient. Avant, j’aurais plutôt mangé une tablette entière de chocolat au lait... A terme, il faudra que je bannisse totalement le sucre de mon alimentation. Je vais y arriver !"
"Mon foie a perdu 4 cm de gras en trois ans"
Heureusement, les efforts finissent toujours par payer – "J’en suis la preuve vivante, et c’est ça qui me booste !", se réjouit Sandra. Non seulement sa stéatose hépatique non alcoolique n’a pas évolué en NASH, une forme aggravée de la maladie, mais sa dernière échographie a surtout révélé que son foie avait "perdu 4 centimètres de gras" depuis trois ans. "J’ai bon espoir de guérir totalement de ma stéatose dans les prochaines années !" Le tout sans aucun traitement médicamenteux, en misant simplement sur la nutrition et l’activité physique.
Et, points bonus, cette nouvelle hygiène de vie n’a pas eu que des effets sur la maladie : "J’ai aujourd’hui une meilleure peau, je n’ai plus de boutons ni d’acné. Au niveau du corps, je ne me sens plus gonflée, lourde comme après un gros repas. Je constate également que je suis moins fatiguée qu’avant... J’ai clairement gagné en qualité de vie." Des bienfaits santé dûment remarqués par toute sa famille, et qui la "poussent à continuer sur le long terme"...
"Car cette maladie du foie gras est aussi le cancer de demain. Ma gastro-entérologue avait lâché le mot : ‘Si vous ne faites rien et que la maladie évolue, c’est la cirrhose du foie, voire le cancer.’ Et les gens qui mangent très mal sont à risque, il faut le savoir." Sandra conseille donc à tout le monde de consulter son médecin traitant en cas de signes, et de se renseigner sur les sites d’associations spécialisées sur la stéatose hépatique non alcoolique : "Il y a aujourd’hui de plus en plus de livres, d’émissions, de réseaux sociaux dédiés pour savoir comment prendre soin de soi, pour être autonome. L’information est là, les gens commencent à comprendre à quel point l’industrie nous empoisonne. Bien se nourrir, c’est une éducation, cela s’apprend. Pour l’avoir moi-même vécu, je sais que c’est difficile, mais la vie est tellement précieuse."