“Le diagnostic a été fait à ses 4 mois, après une visite chez le médecin généraliste et environ 3 semaines d’hospitalisation en néonatalogie”, nous raconte Alice, la maman de Lucie. À la naissance, la petite fille présentait un torticolis, mais les examens de sortie de maternité n’avaient pas alerté les soignants. Cependant, malgré les soins du médecin traitant pour remettre son cou dans l’axe, aucune amélioration n’a été constatée au fil des semaines. “Concrètement, Lucie n’arrivait pas à garder sa tête dans l’axe lorsqu’elle était allongée sur le dos, elle laissait la tête du même côté.”
L’amyotrophie spinale de type 1, une maladie neuromusculaire génétique rare
Lors d’une consultation auprès d’une pédiatre de l’hôpital qui constate une hypotonie générale, le nourrisson est placé en observation pour commencer une kinésithérapie intensive et passer une batterie d’examens : scanner, électroencéphalogramme, tests biologiques… “La prise de sang a révélé l’anomalie génétique de l’amyotrophie spinale de type 1.”
L’amyotrophie spinale (SMA) est une maladie neuromusculaire génétique rare qui se caractérise par une faiblesse musculaire progressive. Son incidence est d’un cas pour 6.000 naissances selon la Haute Autorité de Santé, soit environ 80 à 100 cas par an en France, ce qui fait de cette maladie de transmission autosomique récessive de l’enfant la plus fréquente après la mucoviscidose. Celle-ci est provoquée par une mutation du gène SMN1 qui impacte la production d’une protéine indispensable à la survie des motoneurones. Il existe cinq sous-types de cette pathologie ; le type 1 correspond à la forme évoluant chez les nourrissons de moins de 6 mois.
SMN1: “Grâce à un gène de synthèse, elle peut désormais produire cette fameuse protéine”
“Mais heureusement, Lucie a reçu le traitement de thérapie génique développé par l’AFM-Téléthon, nous explique la maman. Grâce à un gène de synthèse, elle peut désormais produire cette fameuse protéine. En revanche, les motoneurones qui ont dégénéré sont perdus et ne peuvent plus être réactivés. Il y a donc des séquelles d’avant l’injection. La maladie a été stoppée mais a eu le temps de faire des dégâts.”
Ce traitement a sauvé la vie de la petite qui a pu fêter ses 3 ans début février. “C’est une super victoire car au moment du diagnostic, on nous informait que sans traitement, l’espérance de vie ne dépassait pas les 2 ans… La thérapie génique est une vraie potion magique, comme on aime l’appeler avec d’autres parents !” La “potion magique” s'appelle le Zolgensma® et montre en effet des résultats spectaculaires : “En seulement 15 jours, lors d’une visite chez la pédiatre, Lucie a montré une station assise de 5 secondes. C’était vraiment incroyable et fort en émotion”, se remémore Alice.
“Depuis, cela fait presque deux ans et demi, les résultats sont considérables et les progrès sont constants. Bien sûr, il y a des phases un peu plus stagnantes mais elle continue de progresser sur le plan moteur. Par chance, nous ne sommes pas trop embêtés par des problèmes respiratoires.” Et pour cause, la faiblesse des muscles respiratoires peut rendre la respiration et la toux difficiles, avec un risque d’infection respiratoire mettant en jeu le pronostic vital.
SMA : “Cela demande des adaptations et plus elle grandit, plus nous nous en rendons compte”
Pleine de vie, la petite fille n’a qu’une hâte : aller à l’école. “Je suis pressée d’aller à l’école avec les copains, dit-elle à ses parents. Vivement septembre !” En attendant la rentrée scolaire, les journées sont tout de même déjà bien remplies. Au programme : rééducation continue pour apprendre les mouvements non acquis aux âges traditionnels, découvrir certains muscles dont elle n’a pas conscience et essayer de muscler les plus fragiles. “Les journées sont rythmées avec au minimum un rendez-vous de kinésithérapie, d’ergothérapie, de psychomotricité, de balnéothérapie ou encore d’orthophoniste. On doit également faire une séance de 20 minutes avec l’appareil respiratoire pour augmenter son volume pulmonaire et développer ses muscles respiratoires, et des étirements pour éviter l’enraidissement des articulations.”
Lucie se déplace avec un fauteuil roulant, porte un corset garchois pour limiter les déformations du rachis, un corset et des attelles de nuit. “En tant que parents, cela demande des adaptations et plus elle grandit, plus nous nous en rendons compte. Nous avons fait construire une maison adaptée aux difficultés de notre fille, de plain pied, avec des portes plus larges, des espaces plus grands, des toilettes aux normes PMR [Personne à Mobilité Réduite, NDLR]. De mon côté, j’ai arrêté mon activité professionnelle pour m’en occuper pleinement.”
“C'est une enfant qui reste fragile au niveau respiratoire et le moindre virus ou petit rhume peut s’aggraver”
Actuellement, les parents n’ont pas d’indication sur l’espérance de vie de leur fille. ”Malgré le traitement, c'est une enfant qui reste fragile au niveau respiratoire et le moindre virus ou petit rhume peut s’aggraver. Il n’y pas de recul non plus sur la durée d’efficacité du traitement. Est-ce-que le gène de synthèse va rester en place pour toujours ? C’est ce que nous espérons !” Parents et soignants espèrent également que la maladie n’a pas eu le temps d’engendrer des dégâts trop importants sur les muscles vitaux. “Lucie a eu la chance d’être prise en charge et diagnostiquée relativement tôt, mais il y a tout de même des marqueurs de la maladie bien présents. Elle a été sauvée par la thérapie génique, mais une injection plus tôt lui aurait sûrement permis de courir dans la cour de récréation avec ses copains.” La maman reste tout de même très positive et ajoute : "Les médecins nous avaient annoncé un port de tête et une station assise grâce à la thérapie génique. Mais aujourd’hui, les progrès de Lucie vont bien au-delà de ça ! Elle se tient debout avec un appui et a envie d’avancer. On continue de travailler en ce sens et ne perdons pas espoir de la voir un jour se déplacer, debout, seule."