Souffrant de migraines chroniques aiguës que les traitements médicamenteux conventionnels ne soulageaient pas, Marine a mis fin à ses jours le 5 novembre 2021. Elle avait 26 ans. Ses proches ont raconté pour la première fois son parcours tourmenté dans les colonnes du Parisien.
Migraines chroniques : faute du remboursement de son traitement, elle se suicide
Les maux de tête de la jeune femme ont commencé lorsqu’elle avait 8 ans et étaient liées à son adénomyose, une forme d’endométriose, confie son mari Nicolas. Prise en charge par une neurologue, Marine intègre en 2020 un essai clinique pour un traitement qui divise ses migraines réfractaires "par deux, voire trois", lui permettant de "revivre normalement". Mais l’essai s’arrête et la jeune malade se retrouve sans "aucune solution", explique la présidente de l’association La Voix des migraineux, Sabine Debremaeker, relayant la parole de Nicolas sur LinkedIn. En effet, si le médicament est disponible dans les pays limitrophes, son coût (500 euros par mois) est trop élevé pour Marine. Alors que l’Assurance Maladie lui refuse toute aide financière en octobre 2021, la jeune femme se donne la mort deux semaines plus tard.
L’histoire de Marine n’est pas isolée. On estime que 15 % des personnes atteintes de migraines réfractaires ont déjà pensé à se suicider, un chiffre qui monte même à 43 % durant la crise de céphalée, d’après une enquête réalisée en 2020 par l’association La Voix des migraineux. En cause : la douleur et l’impasse thérapeutique, liée parfois au coût prohibitif de certains traitements – comme ce fut le cas ici.
Vendus en pharmacie "entre 245 et 270 euros" sur prescription d’un neurologue, "les traitements anti-CGRP [des anticorps qui bloquent les douleurs migraineuses réfractaires, ndlr] ne sont toujours pas remboursés par l’Assurance Maladie, alors qu’ils le sont dans 23 pays d’Europe", regrette la présidence de l’association, Sabine Debremaeker. La prise en charge des mutuelles est de son côté très variable, et il faut s’armer de "patience". Dans un autre sondage réalisé en 2022 par la même association, plus d’un patient migraineux sur trois qualifiait ainsi son parcours de soins de "parcours du combattant", et un sur cinq de "quête du Graal".
Pour la moitié des migraineux chroniques, la maladie "gâche toute leur vie"
"La migraine est la première maladie au monde sous l’âge de 50 ans", rappelle l’enquête de 2020 de La Voix des migraineux. Au-delà des idées noires qu’elles génèrent, les céphalées chroniques affectent concrètement le quotidien des malades. 45 % d’entre eux ont l’impression que la pathologie "gâche toute leur vie", avec notamment un quart (24 %) qui n’arrivent pas à assumer les tâches du quotidien (courses, repas, ménage...). Au bout du compte, seulement 7 % des migraineux disent ne rencontrer aucune difficulté à s’occuper des enfants. Et, alors que les céphalées ont un impact négatif sur les activités de couple (33 %) ou la sexualité (39 %), près de la moitié des malades (45 %) estime que leur conjoint "ne comprend pas" la pathologie.
Sans surprise, la vie professionnelle des patients s’en trouve également affectée : 51 % doivent s’absenter régulièrement de leur poste à cause de leurs migraines, et 13 % ont même renoncé à travailler. "Les congés maladies sont très encadrés et la migraine n’est pas encore réellement considérée comme justifiant un congé maladie", rappelle l’association. De même, seuls 5,5 % et 2,4 % des migraineux sont reconnus handicapés et invalides.