“L’endométriose est une maladie inflammatoire chronique, génétiquement déterminée et également environnementale, notamment à cause des perturbateurs endocriniens dont la prévalence augmente régulièrement”, nous explique en premier lieu le médecin radiologue et expert de l’endométriose, Dr Érick Petit.
Comment se manifeste l’endométriose ?
Lorsqu’une femme souffre d’endométriose, du tissu semblable à la muqueuse utérine se développe en dehors de la cavité utérine. “Ces cellules semblables à l’endomètre se trouvent par exemple dans le muscle utérin, c’est ce qu’on appelle officiellement l’adénomyose, ajoute le président du réseau ville-hôpital endométriose RESENDO. Les cellules refluent également par les trompes et peuvent coloniser d’autres organes dans la cavité péritonéale, l’ensemble de la cavité pelvienne peut être concerné en dehors de l’utérus, notamment les ovaires, les trompes, le tissu digestif, le rectum, la sphère urinaire, la vessie, etc.” Dans 95 % des cas, cette contagion reste localisée à la cavité pelvienne, mais dans 5 % des cas, il y a des localisations que l’on appelle extra-péritonéale, et on peut retrouver ces cellules dans tout l’organisme.
Une errance diagnostique de 10 ans pour ces femmes
“C’est une maladie qui est plus générale qu’uniquement pelvienne, parce qu’il y a un retentissement important en termes de douleurs sur l’ensemble de l’organisme. Il y a aussi des situations très particulières qui expliquent d’ailleurs en grande partie l’errance diagnostique qui est, je le rappelle, de 10 ans encore, souligne le fondateur et responsable du Centre de l'endométriose du groupe hospitalier Paris Saint-Joseph. C’est pour cela qu’il est toujours très important de sensibiliser l’ensemble du public et des professeurs de santé à la présence de cette maladie qui est encore très et trop tardivement diagnostiquée, avec une incidence, un impact important sur la qualité de vie des patientes et leur éventuelle fertilité.”
Pour le Dr Érick Petit, il est nécessaire de diagnostiquer l’endométriose le plus tôt possible, dès l’adolescence. “Il y a un certain nombre de symptômes très caractéristiques. Donc il faut déclencher l’alerte et la consultation rapidement, avec des techniques d’imagerie qui permettent de prouver que l’endométriose est bien présente en corrélation avec les données cliniques.”
10 à 15 % des femmes en âge de procréer seraient touchées par cette maladie. “C'est plus que les 5 à 10 % traditionnels. Il y a même des études parcellaires qui nous font penser qu’on est plus proche de 20 % que de 10 %.”
“Il y a plusieurs mécanismes” qui affectent la fertilité
“Comme toujours dans cette maladie, c’est multifactoriel, il y a plusieurs mécanismes qui peuvent perturber la fertilité”, note l’expert qui souhaite tout de même tempérer les choses : “Il faut rappeler quand même en préambule que l’endométriose ne rend pas stérile, sauf cas archi exceptionnel (hypofertilité ou dysfertilité).” La prévalence de ces hypofertilités est de l’ordre de 30 à 40 % chez les patientes. “Donc, cela n'est pas systématique, insiste le médecin. La plupart des femmes qui ont une endométriose peuvent être enceintes naturellement !”
Parmi les mécanismes pouvant entraîner des troubles de la fertilité, on trouve le phénomène inflammatoire global pelvien “qui crée des adhérences, des obstacles mécaniques à la rencontre entre l’ovocyte et le spermatozoïde”. L'inflammation, avec la cytotoxicité qui en émane, peut également altérer la qualité ovocytaire et la réserve ovarienne folliculaire.
Cette pathologie peut également avoir une incidence directe sur les trompes de Fallope qui peuvent être obstruées, ce qui entraîne une accumulation de liquide à l’intérieur et une dilatation : “c’est ce qu’on appelle l’hydrosalpinx, voire l’hématosalpinx quand cela saigne à l’intérieur”.
Des kystes endométriosiques ovariens peuvent aussi fortement impacter les chances de concevoir naturellement, “surtout quand ils sont volumineux et bilatéraux”.
Enfin, quand l’adénomyose est conséquente, elle peut perturber l’implantation. “Il y a des troubles implantatoires de la nidation et cela favorise également des fausses couches spontanées.”
L’interview complète du Dr Érick Petit dans Question aux Experts est à retrouver sur notre chaîne YouTube :