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Coagulation

Des chenilles pourraient aider à stopper les saignements en quelques secondes

Par Sophie Raffin

En étudiant les capacités de coagulation des chenilles, des chercheurs ouvrent la porte à de nouveaux traitements et médicaments pour les humains.

Wirestock/istock
L'hémolymphe est l’équivalent du sang chez les insectes. Mais, il a une composition très différente.
Il a notamment la propriété chez les chenilles de stopper les "saignements" en quelques secondes.
Une meilleure connaissance de l'hémolymphe des chenilles pourrait aider à développer de nouveaux médicaments pour les humains, selon les chercheurs.

L’hémolymphe – l’équivalent du sang chez les insectes – a une composition particulière étant dépourvue entre autres de globules rouges, d’hémoglobine et de plaquettes. En revanche, il a une particularité qui intéresse les chercheurs : il coagule très vite.

Des chercheurs ont voulu comprendre les mécanismes de ce phénomène. Leur découverte, présentée dans la revue Frontiers in Soft Matter le 27 mars 2024, pourrait avoir des applications pour la médecine humaine.

Coagulation : des "saignements" stoppés en quelques secondes chez les chenilles

"Nous montrons ici que les chenilles du Sphinx du tabac (ou Manduca sexta), peuvent refermer leurs blessures en une minute. Elles le font en deux étapes : premièrement, en quelques secondes, leur hémolymphe fine et aqueuse (semblable à de l’eau) devient “viscoélastique” (ou visqueuse), puis elle se rétracte vers la plaie", explique l'auteur principal, le Dr Konstantin Kornev de l'Université de Clemson. "Ensuite, les hémocytes (cellule du système immunitaire présente chez les invertébrés, NDLR) s'agrègent, en partant de la surface de la plaie et en remontant pour embrasser le film hémolymphique qui finit par devenir une croûte scellant la plaie."

Les chercheurs ont étudié plus en détail les propriétés d'écoulement de l'hémolymphe en plaçant une nanotige de nickel de 10 micromètres de long dans une gouttelette d'hémolymphe fraîche. Ils ont remarqué que la substance passe d’un état peu visqueux à un fluide viscoélastique en quelques secondes.

En observant l’hémolymphe de plusieurs insectes au microscope, les chercheurs ont remarqué des différences entre celle riche en hémocytes des chenilles et des blattes d'une part, et celles des papillons qui en contiennent peu. Si les gouttelettes s'étiraient pour former des ponts pour les deux premiers animaux, ce n’était pas le cas pour le dernier.

"La transformation de l'hémolymphe en un fluide viscoélastique semble aider les chenilles et les blattes à arrêter tout saignement, en rétractant les gouttelettes dégoulinantes vers la plaie en quelques secondes", indique l’expert. "Nous concluons que leur hémolymphe a une capacité extraordinaire à modifier instantanément ses propriétés matérielles. Contrairement aux insectes producteurs de soie et aux araignées, qui possèdent un organe spécial pour fabriquer des fibres, ces insectes peuvent produire des filaments d’hémolymphe à n’importe quel endroit lorsqu’ils sont blessés."

Hémolymphe : une inspiration pour développer des produits stoppant les saignements

Avoir une meilleure compréhension des mécanismes de coagulation chez les insectes pourrait être bénéfique pour la santé humaine en participant au développement de nouveaux médicaments, selon l’équipe de chercheurs.

"Nos découvertes ouvrent la porte à la conception d’épaississants rapides du sang humain. Nous n'avons pas nécessairement besoin de copier la biochimie exacte, mais nous devrions nous concentrer sur la conception de médicaments capables de transformer le sang en un matériau viscoélastique qui arrête le saignement. Nous espérons que nos résultats aideront à accomplir cette tâche dans un avenir proche", conclut le Dr Konstantin Kornev dans un communiqué.