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INRA/ Ecole nationale vétérinaire de Toulouse

Creutzfeldt-Jakob : la transmission par le sang confirmée

Par Julian Prial

Pour la première fois, des chercheurs français ont réussi à démontrer la présence d’infectiosité dans le sang de patients atteints par la maladie de Creutzfeldt-Jakob. 

VALINCO/SIPA

Les craintes étaient là depuis longtemps et se confirment aujourd'hui. Le sang des patients touchés par la maladie de Creutzfeldt-Jakob (MCJ) est porteur d’infectiosité. Cette confirmation de la transmissibilité par le sang de la maladie a été amenée par une équipe de scientifiques de l’Inra (1) et de l’Ecole Nationale Vétérinaire de Toulouse. Des résultats inédits publiés il y a quelques jours dans le journal Emerging Infectious Diseases.


Des soupçons de longue date

On se souvient de la maladie de Creutzfeldt-Jakob qui, il y a plusieurs années avait fait 200 morts dont 25 en France. Due à un agent pathogène, le prion, la maladie de la vache folle peut se transmettre à l’homme par voie alimentaire. Cette maladie neurodégénérative existe en effet sous plusieurs formes. Une forme familiale (d’origine génétique), une forme sporadique (d’origine inconnue) et une forme dite ‘variante’, apparue en 1996 et causée par une exposition alimentaire à l’agent responsable de l’encéphalopathie spongiforme bovine (ESB ou « maladie de la vache folle »). 
Plusieurs pays (France, Royaume Uni, USA, Japon ...) ont rapporté que l'usage d'une hormone de croissance ou de greffe de méninge, issue de donneurs atteints ou en incubation de la maladie, ont été responsables de la transmission inter-humaine de la MCJ. Et en Grande Bretagne, dans au moins quatre cas de transmission, la responsabilité de transfusions sanguines a été suspectée à l'issue d'enquêtes épidémiologiques.    

Les transfusions sanguines à haut risque
C'est pour cette dernière raison que des scientifiques français ont mené l'enquête en collaboration avec des partenaires européens. Ils se sont intéressés à la présence potentielle et à la distribution des agents responsables de MCJ (forme sporadique et variante) dans le sang. Ils ont pour cela quantifié les niveaux d’infectiosité associés à différentes fractions sanguines issues de patients atteints de MCJ. Par la suite, ils ont inoculé dans le cerveau de souris modèles des fractions sanguines de patients atteints.
Résultat, les cellules sanguines (globules blancs et rouges) et le plasma issus d’un patient atteint par le variant de MCJ sont apparus tous trois porteurs d’infectiosité. Pour la MCJ sporadique, la présence d’infectiosité a pu être détectée dans le plasma de deux des quatre cas testés.
Conclusion des chercheurs, « ces résultats démontrent pour la première fois la présence d’infectiosité dans le sang de malades atteints de MCJ. Ils confirment aussi l’existence d’un danger de transmission de ces maladies par voie transfusionnelle ou par les médicaments dérivés du sang. »

Un Britannique sur 2000 porteur de la protéine responsable de la maladie
Enfin, on peut d'ores et déjà penser que cette découverte va faire parler de l'autre côté de la Manche. En effet, d'après une étude publiée en octobre dans le British medical journal, la fréquence de l’infection par la protéine prion dans la population britannique est plus importante qu'on ne l'imaginait. Un Britannique sur 2000 serait ainsi porteur de la protéine prion anormale responsable de la maladie neurodégénérative de Creutzfeldt-Jakob. Cependant, il est impossible de prévoir combien de porteurs risquent de développer la maladie.

Mais pour se protéger face à ce risque, des mesures draconiennes en matière de transfusion sanguine et de don de greffe ont été prises en France suite à l'affaire du sang contaminée. Ainsi, les donneurs potentiels ayant résidé plus de deux semaines au Royaume-Uni entre 1986 et 1996 sont écartés, et tous les dons de sang collectés sont traités de façon à en retirer les globules blancs.

(1) Institut national de la recherche agronomique