Pesticides, bactéries coliformes, polluants éternels, traitements de purification interdits... D’après une expertise réalisée en octobre 2023 pour le compte de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation (Anses) et révélée par les médias France Info et Le Monde, la qualité des eaux minérales naturelles vendues par le groupe Nestlé (Perrier, Vittel, Contrex...), en théorie préservées de toute pollution, ne serait aujourd’hui "pas garantie".
Des eaux minérales polluées par des bactéries, des pesticides et des polluants éternels
Le rapport, commandé par les autorités après le signalement d’un lanceur d’alerte en 2021, alerte sur "la survenue a priori transitoire, de contaminations microbiologiques d’origine fécale dans certaines ressources servant à la production d’eaux minérales naturelles embouteillées" dans les usines des Vosges et du Gard. Les experts notent ainsi la présence de bactéries coliformes, d’Escherichia coli, d’entérocoques ou encore de Pseudomonas aeruginosa sur de nombreux sites.
Est également pointée du doigt la présence de traces de "polluants éternels", ces substances chimiques per- et polyfluoroalkylées (PFAS), ainsi que d’autres micropolluants comme des métabolites de pesticides, parfois au-delà du seuil réglementaire de 0,1 microgramme par litre. Des résidus d’engrais de synthèse azotés et phosphorés sont aussi fréquemment détectés.
Des traitements de purification de l’eau interdits par la réglementation
Autant de non-conformités qui attestent d’un "niveau de confiance insuffisant" pour "garantir la qualité sanitaire" des eaux commercialisées par le groupe, et qui justifient la mise en place d’un "plan de surveillance renforcé" et notamment une vigilance accrue sur le "risque sanitaire virologique". Selon les experts du Laboratoire d’hydrologie de Nancy (LHN) mandatés par l’Anses, les forages contaminés ne devraient plus être exploités en vue de "la production d’eaux embouteillées". Interrogé par la presse, le ministère de la Santé n'a pas souhaité faire de commentaire, "la justice étant saisie du dossier".
En janvier dernier, le quotidien Le Monde et la cellule d’investigation de Radio France avaient déjà dénoncé une tromperie de grande ampleur : au moins 30 % des marques d’eau en bouteille vendue comme "de source" ou "minérale naturelle" avaient en réalité recours à des traitements de purification de l’eau interdits par la réglementation (ultraviolets et filtres à charbon actif), dont la totalité des marques exploitées par Nestlé. Le groupe avait reconnu le recours à ce type de traitements prohibés en arguant que c’était pour la bonne cause, à savoir "garantir la sécurité alimentaire" des eaux.