“La tuberculose reste une maladie infectieuse de première importance au niveau mondial, avec plus de 10 millions de cas, entraînant 1,4 million de morts chaque année”, indique l’Institut Pasteur. Elle est causée par une bactérie, la Mycobacterium tuberculosis, plus connue sous le nom de bacilles de Koch, et se transmet par voie aérienne.
Dans une nouvelle recherche qui sera présentée au congrès mondial ESCMID (anciennement ECCMID) à Barcelone, en Espagne, des scientifiques montrent que même les patients traités avec succès contre cette maladie gardent des séquelles toute leur vie.
Tuberculose : 155 millions de survivants dans le monde
Depuis le Covid-19, le nombre de nouveaux diagnostics de la tuberculose a augmenté, avec quelque 7,5 millions d’individus diagnostiqués dans le monde en 2022, soit le chiffre le plus élevé depuis le début de la surveillance en 1995, selon le rapport mondial 2023 de l’OMS sur la tuberculose. En cause ? Une forte diminution de l’accès aux soins antituberculeux en 2020, qui ne s’est que partiellement rétabli en 2022, ouvrant la voie aux bactéries pour se propager. Si l’Afrique subsaharienne et l’Asie du Sud-Est sont les régions les plus touchées, on retrouve également une hausse des diagnostics dans les pays à faible incidence comme le Royaume-Uni. Selon les données provisoires de la UK Health Security Agency, il y a eu 4.850 nouveaux diagnostics en Angleterre en 2023, soit une augmentation de plus de 10 % par rapport à 2022 qui comptait 4.380 diagnostics. La France n’est pas moins épargnée avec 4.728 cas recensés l’année dernière contre 4.306 en 2021, soit une hausse de 9,8 %, selon Santé publique France.
À ce jour, les scientifiques estiment qu’environ 155 millions de personnes sont en vie grâce au diagnostic et au traitement réussis de l’infection bactérienne. Pour le chercheur principal de ces nouveaux travaux, le Dr Sharenja Ratnakumar, de St George's Université de Londres, il est clair que “les maladies pulmonaires post-tuberculeuses constituent un défi mondial sous-estimé”. “Jusqu'à présent, l’accent a été mis sur le traitement de la tuberculose aiguë, mais même lorsque le traitement réussit, les individus peuvent se retrouver avec des lésions pulmonaires importantes”, ajoute-t-il.
Post-tuberculose : "un risque accru de maladies cardiovasculaires et respiratoires"
Dans une récente méta-analyse, le Dr Sharenja Ratnakumar et ses collègues ont regroupé les données 75.631 personnes provenant de 15 études menées dans 17 pays avec différents niveaux d’incidence de la tuberculose. Parmi elles, il y avait 7.377 survivants de la tuberculose, âgés de 11 à 65 ans. Quatre mesures de la fonction pulmonaire ont été utilisées ici :
- la capacité vitale forcée (CVF), c’est-à-dire le volume d’air qui peut être expiré avec force en une seule respiration ;
- le volume expiratoire forcé en 1 seconde (VEMS) ;
- le rapport VEMS/CVF ;
- le CVF en pourcentage de la valeur prédite, qui compare le volume à celui de la moyenne d’une personne en bonne santé du même âge, sexe et taille.
Cela a permis de révéler que par rapport aux sujets sains, les survivants de la tuberculose ont des résultats significativement inférieurs, surtout pour celui du volume expiratoire forcé en 1 seconde. “Le VEMS était inférieur de 230 millilitres à celui des témoins sains et la CVF était inférieure de 140 millilitres, précise le médecin-chercheur. Une diminution du VEMS de 100 millilitres est considérée comme cliniquement significative et est associée à un risque accru de maladies cardiovasculaires et respiratoires.”
Un risque d'obstruction des voies respiratoires 65 % plus élevé après une tuberculose
L’ensemble de ces résultats indique que les personnes ayant survécu à la tuberculose ont des poumons plus petits et des voies respiratoires plus étroites avec un débit d’air plus lent. En clair, ces personnes prennent des plus petites inspirations à chaque fois qu’elles respirent, et ont donc plus de difficultés à répondre aux demandes ventilatoires accrues, comme pendant une séance de sport. Ces personnes ont ainsi un risque d'obstruction des voies respiratoires 65 % plus élevé que les autres.
“Cet héritage de la tuberculose a été négligé pendant trop longtemps et il est essentiel qu’il soit reconnu”, affirme l’expert. Cela peut provoquer un essoufflement qui peut affecter la capacité à travailler, à vaquer aux occupations quotidiennes [ce qui peut] réduire la qualité de vie.”
"Notre étude fournit également des preuves irréfutables selon lesquelles les soins à long terme aux personnes atteintes d’une maladie pulmonaire post-tuberculeuse devraient être une composante explicite de la stratégie de l’OMS pour mettre fin à la tuberculose", conclut-il.