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E-cigarette : ce que l'Europe pourrait décider

Sous pression du Parlement, l'Europe devrait accepter de ne pas assimiler la e-cigarette à un médicaments. Taux de nicotine, arômes, étiquetage, le reste de la législation va être dévoilé aujourd'hui.

E-cigarette : ce que l'Europe pourrait décider VARELA/20MINUTES/SIPA




Légiférer sur la cigarette électronique en Europe est-il une tâche impossible ? C'est en tout cas la question que l'on se pose aux vues des difficultés qu'ont rencontré lundi dernier l'Europe et les Etats membres pour trouver un accord sur le sujet. Cet éventuel accord, qui doit encadrer le marché de la cigarette électronique, devrait finalement voir le jour ce mercredi.
« Beaucoup de bruit, pour pas grand chose », confie pour sa part le Pr Bertrand Dautzenberg, auteur du premier rapport français sur la cigarette électronique, contacté par pourquoidocteur. Selon lui, « nul besoin d'encadrer ce produit de façon aussi drastique car le produit est largement moins dangereux que la cigarette classique. » 

Ecoutez le Pr Bertrand Dautzenberg : « Au nom du principe de précaution, il faudrait mettre partout la e-cigarette. Et enfermer au maximum la cigarette...»


Limiter le nombre  d'arômes

Pourtant, parmi les points qui cristallisaient encore les désaccords entre les institutions européennes lundi après-midi, figure en premier lieu la question épineuse des arômes. Le Conseil des ministres aimerait pour sa part restreindre la palette actuelle des goûts disponibles. Celle-ci va de piña colada à barbapapa en passant par les Energy Drink.  
« Des arômes attractifs, notamment pour les plus jeunes », pense le Conseil. Attirés par ces saveurs, les plus pessimistes y voient déjà pour les ados, « une porte d'entrée vers la tabac et vers la dépendance à la nicotine. »
Pour cette raison, le Conseil aimerait restreindre la liste des arômes disponibles à celle autorisée pour les produits de sevrage tabagique. Autrement dit, très peu d'arômes resteraient dans le commerce (tabac, menthe). Une solution inenvisageable pour d'autres. Pour les médecins français, « cette attractivité », c'est justement une éventuelle porte de sortie vers le tabac et ses risques majorés comparé à la e-cigarette.

Le statut de médicament presque tranché
Par ailleurs, le statut de médicament, un temps envisagé pour la e-cigarette, semble à présent ne plus poser problème. Désiré par certains États membres dont le Royaume-Uni, mais refusé par le Parlement européen, c'est finalement une solution intermédiaire qui risque de voir le jour.
Ainsi, au-delà d'une concentration en nicotine de 20 mg/ml, le produit serait considéré comme un médicament et sa commercialisation serait donc réservée aux pharmacies, comme c'est déjà le cas pour les substituts nicotiniques. « Le fabricant devra dans ce cas respecter une procédure de demande d'autorisation de mise sur le marché (AMM), longue et coûteuse », explique cependant le Pr Bertrand Dautzenberg.
En deçà de ce dosage, le e-cigarette resterait un produit de consommation courante. Ce qui n'empêcherait toutefois pas chaque pays d'en faire un produit dérivé du tabac s'il le souhaite. Et dans un second temps, d'en réserver la vente aux buralistes.

A ce titre, le tribunal de commerce de Toulouse a ordonné récemment à un vendeur de e-cigarette français de cesser la commercialisation de ses produits, jugeant qu'il s'agissait d'une violation du « monopole d'Etat sur la vente du tabac ». Ces produits de substituion relèvent, selon le jugement, de la législation sur le tabac. Les gérants de la boutique ont d'ores et déjà annoncé leur intention de faire appel.


Un taux de nicotine bas pour éviter la dépendance 

En outre, le Conseil des ministres espère obtenir également des mesures réduisant l'attractivité des cigarettes électroniques. Les États membres avaient donc souhaité début décembre limiter la concentration en nicotine des produits de recharge à 5 mg/ml. Ce plafond est depuis le début jugé insuffisant pour répondre aux besoins des anciens gros fumeurs, selon certains médecins tabacologues.
Au final, il semblerait que l'on s'oriente vers une concentration maximale de 20 mg/ml, et une dose plafond de 10 mg par recharge, d'après les derniers bruits de couloir venus de Bruxelles.

Un meilleur étiquetage réclamé de tous  
De plus, ce mercredi, tous attendent de l'Europe des mesures pour un meilleur étiquetage de ces produits. Dans son magazine de septembre, l'Institut national de la consommation (INC) dévoilait une enquête selon laquelle les e-cigarettes « ne sont pas aussi inoffensives » que le disent leurs fabricants et « peuvent émettre des composés potentiellement cancérigènes. »
Ces substances nocives sont sans danger car en doses minimes, ont aussitôt répondu plusieurs experts français. Malgré tout,  le doute subsiste et les consommateurs réclament aujourd'hui plus transparence.

« Améliorer l'information sur l'e-cigarette », c'est d'ailleurs le chantier que vient de lancer il y a quelques jours l'Institut national de la consommation, avec des représentants des utilisateurs et des vendeurs de e-cigarettes. Et cette réflexion pourrait dans un futur proche faire office de laboratoire, devenir une « référence à l’échelle européenne », estiment ces acteurs. Sur ce sujet encore, le Pr Bertrand Dautzenberg espère voir des avancées de l'Europe dans la journée.

Ecoutez le Pr Bertrand Dautzenberg : « Tout le monde souhaite qu'il y ait une information claire et homogène sur l'étiquetage des e-cigarettes. C'est unanime, du producteur au consommateur, en passant par le médecin...»


Les quotas de cigarettes européens revus à la hausse
Enfin, en conclusion, le Pr Bernard Dautzenberg prévoit que cet accord ne bouleversera pas l'avenir de la cigarette électronique en France. « Les Etats seront très certainement invités à faire ce qu'ils veulent pour le moment. Et le prochain rendez-vous sera dans quelques années. En attendant, Bruxelles pinaille sur des détails », rajoute-il.

En comparaison, ce tabacologue souligne que le tabac inquiète beaucoup moins les instances européennes. La preuve avec les derniers quotas européens sur la cigarette votés il y a quelques jours au sein du Parlement. Désormais, un Français aura la possibilité de ramener non plus cinq mais dix cartouches d'un pays de l'Union. La mesure qui va entrer en vigueur dès le 1er janvier prochain a suscité l'ire de la ministre de la Santé, Marisol Touraine. « C'est l'autorisation de milliers de mg de nicotine » conclut avec ironie, le Pr Bertrand Dautzenberg.

Ecoutez le Pr Bertrand Dautzenberg : « On peut passer librement les frontières européennes avec 25 000 mg de nicotine. Et là, on discute sur des flacons avec 200 mg...»





 

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