“À l’époque j’avais 22 ans et je travaillais comme assistant directeur artistique à Paris”, se remémore Arnaud lorsque l’on discute de l’apparition de sa sclérose en plaques. Le jeune homme passe son temps à travailler pendant de longues journées que lui impose son statut, de 9h à 20h, et garde un peu de temps libre pour faire la fête, comme n’importe quel jeune de son âge. “Je me suis levé un dimanche matin et je me suis rendu compte que j’avais des problèmes d’équilibre, c’était comme si j’étais ivre, et bizarrement, la veille, je n'étais pas sorti parce que je me trouvais fatigué… J’avais aussi des fourmillements un peu dans le visage et dans la main, donc j’ai tout de suite senti qu’il y avait un problème.”
Depuis ma première poussée, je ne peux plus courir.
Accompagné de ses parents, Arnaud se rend aux Urgences de la Pitié Salpêtrière. “J’y suis resté trois semaines sans avoir de réponse. Je n’ai reçu le diagnostic de la sclérose en plaques que trois mois plus tard lors d’une deuxième IRM, car à l’époque c’était un peu plus long qu’aujourd’hui pour l’établir.”
Plus soulagé de mettre un mot sur sa maladie qu’inquiet par ce qu’elle représente, Arnaud souhaite surtout reprendre sa vie comme si de rien n’était. “Je me suis dit, ‘c’est cool, donnez-moi un médicament pour que je puisse reprendre mon métier que j’adore’. Mais je n’étais pas non plus dans le déni, je vivais ma vie de jeune parisien malgré cette maladie qui n’est pas facile au quotidien et qui me fatigue beaucoup. En plus, depuis ma première poussée, je ne peux plus courir, ni marcher très longtemps. J’ai également eu plusieurs autres poussées qui m’ont conduit chaque fois à l’hôpital pour prendre de la cortisone… Mais au moins, j’ai pu reprendre mon travail !” Arnaud enchaîne alors les agences de publicité pendant les 10 années suivant le diagnostic. “Je réussissais mes missions, je gagnais bien ma vie. Mais un jour, il y a eu un plan de restructuration et de fusion d’agences de publicités. Ils demandaient des volontaires pour partir et j’ai levé la main.”
Notre Sclérose : “On ne parle pas juste de la maladie, on montre comment vivre avec”
Avec sa compagne Sandy, Arnaud quitte la vie trépidante de la capitale, aux trottoirs inaccessibles aux poussettes et fauteuils roulants, pour une vie plus ressourçante à Nantes. Là-bas ils y élèvent leur fille : “J’ai pu en profiter à 100 %, j’ai pu avoir un rôle de papa incroyable, inestimable je pense grâce à ce temps gagné.” En parallèle, le père de famille monte en 2007 l’association Notre Sclérose. “Je me suis servi de ce que je savais faire en agence de publicité, mais pour l’intérêt général, et pour une cause qui m’était évidemment très proche. Aujourd’hui, sur notre site internet notresclerose.org, nous avons 50.000 visiteurs uniques par mois et 820 témoignages. C’est une base de données énorme et aussi une source d’information pour les jeunes patients. On ne parle pas juste de la maladie, on montre comment vivre avec. C’est important parce que quand j’ai appris pour ma sclérose en plaques, je trouvais des informations très médicales, mais très peu sur le quotidien des malades. Et depuis deux ans, on donne tous les dons des particuliers à l’Inserm de Nantes qui est une équipe spécialisée dans la sclérose en plaques et qui fait un travail exceptionnel !”
Il faut avoir la faculté de s'adapter. S’adapter à son nouveau corps, s’adapter aux problématiques.
Fort de ce succès, Arnaud a également créé l’application “Ma vie avec la sclérose en plaques”, avec l’aide de son voisin développeur qui a une femme également touchée par la sclérose en plaques, et en collaboration avec de nombreux patients et professionnels de santé du CHU de Nantes. “C’est une base de données énorme et une source d’information pour les jeunes patients, pour leur montrer comment on vit avec la maladie.” Accessible gratuitement, l’application a récemment dépassé les 10.000 téléchargements.
Son conseil aux nouveaux malades ? “Il faut avoir la faculté de s'adapter. S’adapter à son nouveau corps, s’adapter aux problématiques. Évidemment c'est délicat, et ce n’est pas facile tous les jours parce qu’il faut aussi s’adapter à avoir moins d'argent, moins de vie sociale… Et 80 % des symptômes c’est de la fatigue. Mais pour autant, il faut continuer à faire les choses qu’on aime faire, même si on les fait différemment, il faut les faire !”
Arnaud Gautelier a également écrit un livre témoignage en 2006 : J’te plaque ma sclérose, aux éditions Philippe Rey ; et un roman graphique en 2012 : Des fourmis dans les jambes, aux éditions Emmanuel Proust.