- En février 1999, Audrey décède d’une méningite foudroyante à seulement 12 ans.
- Son père Jimmy raconte comment s’est déroulé le drame et l’engagement associatif qui a suivi.
- En 2023, 560 cas de méningite ont été déclarés en France, soit une augmentation de 72 % par rapport à 2022.
"Apprendre son décès nous a littéralement coupé les jambes, on n’avait plus de force. C’est comme si le ciel nous était tombé sur la tête." En février 1999, Jimmy a perdu sa fille Audrey, victime à seulement 12 ans d’une méningite C* foudroyante.
"Tout s’est joué en 24 heures. Quand elle est partie de chez nous, elle était en pleine forme. Elle a commencé à se sentir mal en fin de matinée au collège, où elle n’a pas été correctement prise en charge", se désole le père de famille.
Méningite : "Au collège, personne ne nous a appelés pour nous prévenir de l’état d’Audrey"
Fatiguée, légèrement fiévreuse et de plus en plus gênée par la lumière, Audrey est envoyée à l’infirmerie en début de matinée. Elle se rend ensuite à la cantine, puis, trop faible pour reprendre les cours, retourne à l’infirmerie. Elle tente ensuite de faire du sport avec ses camarades, sans succès. "Elle est restée assise contre un mur. Les professeurs l’ont donc une fois encore conduite à l’infirmerie, puis l’ont laissée rentrer toute seule en bus. Aucun membre de son établissement ne nous a appelés pour nous prévenir de son état", déplore Jimmy.
Une fois chez elle, la jeune fille monte se coucher dans sa chambre, les volets fermés. "Cela nous a surpris, mais comme on était en pleine épidémie de grippe, nous avons pensé que c’était cela, et nous avons pris rendez-vous avec notre médecin de famille pour le lendemain matin. Ma femme a bien vu quelques petites taches violacées sur le corps d’Audrey, mais elle n’a malheureusement pas fait le lien avec la méningite", raconte le vitrailliste.
Lorsque ses parents tentent de la réveiller le lendemain matin, l’adolescente a déjà sombré dans un profond coma. Elle décèdera quelques heures plus tard à l’hôpital. "Notre généraliste est arrivé très vite et a tout de suite vu que c’était une méningite. Il a donc très rapidement appelé les pompiers, mais c’était trop tard", regrette Jimmy.
Méningite : "25 ans après, c’est toujours là, on n’oublie pas"
Encore aujourd’hui, l’émotion de Jimmy est vive lorsqu’il évoque la disparition tragique de sa fille, dont le décès a aussi traumatisé les autres membres de la famille. "La sœur aînée d’Audrey a réussi à prendre le dessus, mais son petit frère a subitement arrêté de travailler à l’école. Il a un jour fini par formuler à une infirmière qu’il ne souhaitait plus progresser car il ne voulait pas grandir et mourir comme sa sœur", se remémore le sexagénaire.
"25 ans après, c’est toujours là, on n’oublie pas. Personnellement, j’ai aussi ressenti de l’injustice et de la colère vis-vis de la directrice du collège, qui ne s’est pas du tout montrée à notre écoute et n’a pas fait un rapport honnête sur le déroulement des événements", ajoute Jimmy. "Elle a fait des erreurs assez graves concernant notre dossier et a d’ailleurs été mutée par la suite. Nous avons par exemple appris par le biais de l’enquête menée par la gendarmerie à la suite de la plainte que nous avions déposée avec ma femme que l’espace du collège appelé « infirmerie » n’était en fait qu’une salle de repos où travaillait une lingère en blouse blanche. La vraie infirmière scolaire n’était vraiment là qu’une demi-journée par semaine et était en charge de 17 établissements à la fois", indique-t-il.
De la mort de sa fille naîtra l’association de patients Audrey. "Nous avons finalement décidé avec le procureur du Maine-et-Loire de ne pas donner suite à l’enquête, mais en échange, nous avons demandé aux autorités et à l’Education nationale de nous aider à créer une association. Elle a vu le jour un an après le début de nos démarches", rapporte le militant. "Nous voulions d’abord rendre hommage à notre fille perdue et continuer à la faire vivre parmi nous. Nous souhaitions aussi informer sur la méningite et la vaccination en nous appuyant sur des professionnels de santé, car si nous avions été mieux renseignés sur cette maladie, Audrey serait encore de ce monde", estime-t-il.
Méningite : quels symptômes doivent alerter ?
En 2023, 560 cas de méningite ont été déclarés en France, soit une augmentation de 72 % par rapport à 2022. Parmi eux, 44 % étaient liés au sérogroupe B, 29 % au sérogroupe W et 24 % au sérogroupe Y.
Les symptômes d’une méningite associent une fièvre parfois élevée à des frissons. D'autres manifestations de la maladie peuvent aussi apparaître, telles que :
- des maux de tête intenses (céphalées) ;
- une intolérance à la lumière (photophobie) ou au bruit (la phonophobie) ;
- des nausées ou des vomissements ;
- une raideur de la nuque (l'arrière du cou est douloureux lors des mouvements) ;
- un teint gris ou marbré (taches violacées) ;
- des courbatures importantes ;
- une grande fatigue ;
- des symptômes neurologiques (somnolence, confusion, paralysie oculaire, convulsions).
"Si vous identifiez un ou plusieurs de ces symptômes sur vous-même ou sur un membre de votre entourage, il faut réagir le plus vite possible. En effet, plus la méningite est prise tôt, plus les chances de s’en sortir sans séquelles sont grandes. Les 5 premières heures sont les plus importantes", insiste Jimmy.
"Je vous invite également à appeler rapidement votre médecin traitant, afin qu’il contacte lui-même les pompiers ou le Samu pour accélérer le processus de prise en charge. Si vous vous rendez directement aux urgences, la mise en place des soins peut en effet être très longue et ainsi engendrer le décès. Pas plus tard qu’en ce début d’année, une personne est morte d’une méningite sur un brancard", rappelle-t-il.
"Lorsque vous appelez le médecin pour une potentielle méningite, il ne faut pas non plus hésiter à dramatiser les symptômes constatés. Car comme il y a très peu de cas, les généralistes n’y pensent pas systématiquement et peuvent passer à côté, ce qui là aussi retarde les traitements", recommande-t-il également.
Élargissement de la vaccination contre la méningite : "Nous sommes très contents"
Que pense-t-il pour finir du récent élargissement souhaité par la HAS (Haute Autorité de Santé) de la vaccination contre la méningite ? "Cela fait 25 ans que nous nous battons pour inclure les méningocoques A, B, W et Y, nous sommes donc très contents de cette avancée, c’est un grand pas en avant pour la prévention !", se félicite Jimmy. "Nous espérons juste que l’injection sera bien remboursée immédiatement, car la HAS est encore floue sur ce point. Nous aimerions aussi que la vaccination contre la méningite soit obligatoire pour les adolescents", conclut Jimmy.
*Il existe cinq types de méningite.
*En France, la vaccination contre la méningite n'est actuellement obligatoire que chez les moins d'un an pour les méningocoques du groupe C.