- La consommation de drogues en milieu carcéral dépasse "sensiblement" les niveaux observés dans la population générale, selon une enquête de l’Observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT) menée en 2023 auprès de 1.094 détenus.
- Le tabagisme quotidien en milieu carcéral atteint ainsi 63 %, soit 2,5 fois plus qu’à l’extérieur. De même, 26 % des détenus consomment chaque jour du cannabis – une prévalence 8 fois plus élevée que dans le reste de la population.
- La consommation d’autres substances psychoactives est en revanche plus "marginale". Les prévalences d'usage (au moins une fois au cours de la détention) pour la cocaïne, le crack, la MDMA et l'héroïne s'élèvent respectivement à 13 %, 6,2 %, 5,4 % et 5,1 %.
La consommation de drogues en milieu carcéral dépasse "sensiblement" les niveaux observés dans la population générale. C’est ce qui ressort en substance de l’Enquête sur la santé et les substances en prison (ESSPRI), réalisée l’an dernier par l’Observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT) et publiée dans le dernier numéro de la revue Tendances.
Dans le cadre de cette étude, 1.094 hommes majeurs incarcérés depuis plus de trois mois en France métropolitaine ont été interrogés entre avril et juin 2023, toutes durées de peine, tous types d’établissements et tous statuts pénaux confondus. Les détenus, "représentatifs de la population carcérale", ont répondu sur leur usage de sept substances psychoactives : le tabac, l'alcool, le cannabis, la cocaïne, le crack, la MDMA (ou ecstasy) et l'héroïne. "Près de quatre détenus sur cinq (77 %) ont déjà consommé au moins une fois l’un de ces produits au cours de leur détention", peut-on lire dans un communiqué.
Un quart des hommes incarcérés consomment du cannabis au quotidien
Par ordre décroissant, les substances les plus consommées quotidiennement en prison sont le tabac (toléré entre les murs), le cannabis et l’alcool (prohibés), alors qu’il s’agit du tabac, de l’alcool et du cannabis dans la population générale. Le tabagisme quotidien en milieu carcéral atteint ainsi 63 %, soit 2,5 fois plus qu’à l’extérieur. De même, 26 % des détenus consomment chaque jour du cannabis – une prévalence 8 fois plus élevée que dans le reste de la population – sachant qu’une large majorité en fumaient déjà beaucoup avant leur incarcération. L’usage de l’alcool, quant à lui, est nettement plus faible en prison qu’hors les murs : seulement 16 % des répondants s’y sont essayés au moins une fois au cours du mois précédant l’enquête.
Des chiffres qui s’expliquent notamment par l’accessibilité, variable selon les drogues : 51 % des détenus admettent que trouver du cannabis en prison est "facile", contre 27 % pour l’alcool. Et pour cause, selon une précédente enquête menée par l’OFDT : cela dépend "de la capacité des détenus à importer des produits de l’extérieur et de l’existence de réseaux spécialisés dans la revente illégale" à l’intérieur même des prisons. Or, s’il existe de nombreux moyens de faire passer du cannabis (via les murs d’enceinte, les parloirs, le courrier, des complices parmi les surveillants...), "la taille des bouteilles et son indivisibilité" rendent la circulation et le trafic d’alcool plus difficile.
A noter qu’un tiers des hommes incarcérés (32 %) ne consomment "véritablement aucune des trois substances", même de manière occasionnelle, en particulier les plus âgés (35 ans et plus) à 42 %, contre seulement 25 % des 18-34 ans.
Cocaïne, MDMA, crack et héroïne : environ un détenu sur dix concerné
La consommation d’autres substances psychoactives est en revanche plus "marginale" et concerne en moyenne "un détenu sur dix", révèle l’enquête. Dans le détail, les prévalences d'usage (au moins une fois) pour la cocaïne, le crack, la MDMA et l'héroïne s'élèvent respectivement à 13 %, 6,2 %, 5,4 % et 5,1 %, "sans différence selon la classe d'âge". Une majorité des usagers déclaraient déjà des consommations importantes avant leur incarcération. L’étude rapporte que 3,5 % des détenus ont eu recours à l’injection d’une de ces drogues, ne serait-ce qu’une seule fois.
Si cette enquête s’est cantonnée à la population carcérale masculine, le second volet, prévu en 2025, prévoit d’étendre son champ d’investigation aux femmes détenues, qui représentent moins de 4 % de la population carcérale. Quant aux territoires d’Outre-mer, ils devraient faire l’objet d’une étude spécifique cette année.