Opal Sandy n’avait jamais perçu les sons. À 18 mois, la petite fille britannique peut désormais entendre ses parents. Elle est la première patiente à avoir bénéficié d’une thérapie génique dans le cadre d’un essai mondial. Administré à ses 11 mois, le traitement lui a permis de recouvrer l’audition. Les Hôpitaux universitaires de Cambridge racontent son histoire dans un communiqué paru jeudi 9 mai.
La fillette est née complètement sourde en raison d'une maladie génétique rare : la neuropathie auditive, causée par la perturbation de l'influx nerveux allant de l'oreille interne au cerveau. Cette maladie peut être la conséquence d’une variation sur le gène OTOF. Dans l'organisme, il produit une protéine appelée otoferline, nécessaire pour permettre aux cellules ciliées internes de l'oreille de communiquer avec le nerf auditif. Des tests permettent de repérer les mutations de ce gène et de détecter la pathologie. Dans le cas d’Opal, il a été réalisé lorsqu’elle avait trois semaines, car elle était considérée à risque, comme sa grande sœur souffre de la pathologie.
Neuropathie auditive : une seule perfusion de thérapie génique pour retrouver l'ouïe
En 2023, la fillette a participé à l’essai CHORD : il a pour objectif de tester l’efficacité de la thérapie génique pour améliorer l’audition des enfants nés avec une neuropathie auditive. Dans ce cadre, Opal Sandy a reçu une perfusion contenant un virus inoffensif (AAV1), capable de délivrer une copie "de travail" du gène OTOF. L’injection a été réalisée dans la cochlée, la zone de l’oreille interne contenant des terminaisons des nerfs auditifs, sous anesthésie générale. Les chirurgiens ont également posé un implant cochléaire dans l’oreille gauche de la petite fille. Cet appareil permet d’améliorer l’ouïe des personnes souffrant de troubles de l’audition.
"Quatre semaines après avoir reçu la perfusion de thérapie génique dans son oreille droite, Opal a répondu au son, même avec l'implant cochléaire de son oreille gauche éteint", notent les auteurs de l’essai dans un communiqué. Dans les semaines suivantes, les scientifiques ont observé une "amélioration continue" de son audition. 24 semaines après l’injection, ils ont constaté qu'Opal avait des niveaux d'audition proches de la normale pour les sons faibles, comme les chuchotements, dans son oreille traitée.
Thérapie génique : un espoir pour la prise en charge des pertes auditives
Aujourd’hui, Opal a 18 mois et elle parvient à répondre à la voix de ses parents. "Quand Opal a pu nous entendre applaudir pour la première fois, c'était époustouflant, confie sa mère Jo Sandy. Nous étions si heureux lorsque l'équipe clinique a confirmé à 24 semaines que son audition captait également des sons et des paroles plus doux." Même les scientifiques ont été surpris. "Ces résultats sont spectaculaires et meilleurs que ce à quoi je m’attendais, développe le professeur Manohar Bance du Département de neurosciences cliniques de l'Université de Cambridge et auteur principal de cet essai. La thérapie génique représente l'avenir de l'otologie et de l'audiologie depuis de nombreuses années (…). Nous espérons que c'est le début d'une nouvelle ère pour les thérapies géniques pour l'oreille interne et pour de nombreux autres types de perte auditive." Selon les chercheurs, 20.000 personnes sont atteintes de la même mutation génétique au Royaume-Uni, en Allemagne, en France, en Espagne et en Italie.