La mémoire est aussi impactée par le temps. Avec les années, il est parfois plus difficile de retenir ou de se souvenir de certaines choses. Comme pour le reste du corps, cette fonction aussi est impactée par notre mode de vie et nos bonnes - ou mauvaises - habitudes.
Dans un article pour la BCC, le professeur Charan Ranganath, neuroscientifique et directeur du laboratoire de mémoire dynamique de l'université de Californie, aux États-Unis, délivre ses conseils.
Mémoire : le sommeil pour nettoyer le cerveau
Le premier conseil est de bien dormir, c’est-à-dire suffisamment longtemps et sans réveils nocturnes. “Nous savons aujourd'hui que le cerveau possède un système qui draine les toxines qui s'y accumulent, dont la protéine amyloïde, impliquée dans l'apparition de la maladie d'Alzheimer, explique le professeur Charan Ranganath. Ce système se met en marche la nuit.”
En effet, les personnes atteintes d’Alzheimer ont deux types de lésions dans le cerveau : les dépôts amyloïdes et les dégénérescences neurofibrillaires, selon l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm). Chaque lésion est associée à une protéine : le peptide bêta amyloïde (ß‑amyloïde) pour les dépôts amyloïdes, et la protéine tau phosphorylée pour les dégénérescences neurofibrillaires. Dormir aide donc à se débarrasser de ces éléments néfastes, mais ce n’est pas tout.
“Pendant le sommeil, la mémoire est réactivée et c'est à cela que beaucoup attribuent l'origine des rêves (...). Dormir facilite la rétention des informations que nous avons apprises, poursuit le neuroscientifique. Si une personne ne dort pas suffisamment, la fonction frontale du cerveau est réduite, tout comme son niveau de tolérance au stress, et elle n'est donc pas en mesure de se concentrer correctement.”
Pour bien dormir, il est recommandé de ne pas boire de boissons excitantes avant le coucher - comme l’alcool ou le café - éviter les écrans, ne pas trop manger et pratiquer une activité physique régulière, mais pas trop tard.
La deuxième habitude qui peut impacter la mémoire est de faire plusieurs choses en même temps. “Le cortex préfrontal nous aide à nous concentrer sur ce que nous devons faire pour atteindre nos objectifs, mais cette merveilleuse capacité s'enraye si nous passons continuellement d'un objectif à l'autre", indique le professeur Charan Ranganath. Mais attention, cette règle n’est pas valable si les deux tâches ont un lien, comme lorsque l’on suit une recette de cuisine.
Le neuroscientifique prend un exemple concret : écouter un cours et ouvrir ses mails. Selon lui, le résultat sera forcément négatif, ce qui signifie que vous ne retiendrez pas le cours. “Lorsque vous changez de cible (vous commencez à consulter vos courriels), vos neurones sont distraits et enregistrent des souvenirs fragmentaires du cours, car vous utilisez beaucoup de fonctions exécutives pour gérer le passage d'une activité à l'autre, ce qui rend difficile la formation d'un souvenir durable.”
Pour éviter cette mauvaise habitude, l’idéal est de terminer une activité avant d’en commencer une autre, de faire de vraies pauses et d’éteindre toutes les sources de distractions possibles comme, par exemple, le téléphone portable.
Troisième mauvaise habitude : la routine. En effet, ce sont les émotions - bonheur, désir, colère, etc - qui sécrètent des substances chimiques bénéfiques pour la plasticité du cerveau et la mémoire. “La plasticité du cerveau nous aide à effectuer des tâches, en particulier des tâches répétitives, de manière plus efficace”, indique le professeur Charan Ranganath.
Et pour stimuler le cerveau, pas besoin de se lancer dans des défis extrêmes. Le neuroscientifique recommande de petits changements tels que le changement régulier des mots de passe. “Lorsque vous changez le mot de passe, les neurones qui ont stocké l'ancien mot de passe se battent avec les neurones qui ont le nouveau mot de passe.”
Comment ne pas passer à côté d’une perte de mémoire ?
“Les gens pensent que leur mémoire est très bonne jusqu'à ce qu'ils réalisent, à un moment donné de leur vie, qu'elle ne l'est pas, souligne le professeur Charan Ranganath. Le but de la mémoire n'est pas de se souvenir du passé, bien qu'elle puisse le faire, mais d'extraire du passé les informations importantes dont nous avons besoin pour comprendre le présent et préparer l'avenir.”
Il ne faut pas surestimer sa mémoire et la tester de temps en temps. “Quelques minutes après avoir été présenté à une personne, testez-vous et essayez de dire son nom, conseille-t-il. Et au fur et à mesure de la conversation, recommencez. Plus ces tentatives sont espacées, mieux c'est.”
Enfin, l’alimentation et l’exercice physique sont aussi très importants pour la mémoire et la santé en général. Dès le plus jeune âge, ces deux éléments sont à prendre en considération pour réduire le risque de maladies neurodégénératives.
D’ici 2050, le nombre de personnes atteintes de démence en Europe doublera presque, passant à 14.298.671 dans l’Union européenne et à 18.846.286 dans l’ensemble de l’Europe, selon les prévisions d’Alzheimer Europe.