ACCUEIL > QUESTION D'ACTU > Journée de l'orgasme : ne pas confondre avec le plaisir

Sexualité

Journée de l'orgasme : ne pas confondre avec le plaisir

Par Julian Prial avec Melanie Gomez

A l'occasion de la journée de l'orgasme, retour sur notre entretien avec Sylvain Mimoun, gynécologue et sexologue, pour tenter de faire voler en éclat les idées reçues autour du point culminant du plaisir. 

West Coast Surfer / Moo/REX/SIPA

Aujourd'hui est un jour particulier pour tous les couples ! Comme chaque 21 décembre, c'est la journée mondiale de l'orgasme. Cet état recherché par  les hommes et les femmes lors d'un rapport sexuel est en réalité la réponse physiologique qui a lieu au maximum de la phase d’excitation sexuelle. Il est généralement associé, chez l’homme, à l’éjaculation. Chez la femme, il est synonyme de contractions musculaires rythmiques des muscles du périnée, d'une rétraction du clitoris, et de contractions musculaires rythmiques périnéales et intra-vaginales. Enfin, l'orgasme libère également deux protéines neurologiques, l'ocytocine et la prolactine, qui provoquent une profonde sensation de bien-être. Alors pour célèbrer ce jour comme il se doit, pourquoidocteur revient sur notre entretien avec le Dr Sylvain Mimoun, dans lequel ce gynécologue et sexologue tentait de faire voler en éclat les idées reçues autour du point culminant du plaisir. 

Entretien réalisé le 12/08/13 avec le Dr Sylvain Mimoun, gynécologue et spécialiste de la sexualité. Il vient de publier aux éditions First « La masturbation rend sourd - 300 idées reçues sur le sexe » (1) 


Pourquoi Docteur : L’orgasme de la femme est-il moins intense que celui de l’homme ?

Dr Sylvain Mimoun : Non, parfois même, il peut être plus intense, si tant est que cette femme apprend à lâcher prise, à accompagner son orgasme. On dit habituellement que l’homme a plus facilement du plaisir que la femme, mais c’est pour cela qu’on pourrait penser que c’est moins intense pour elle. En effet, par nature, un homme peut plus facilement avoir une éjaculation et accompagnée ou non d’orgasme. Et le fait que cela vienne facilement, du coup, il ne se casse plus la tête, et il sait comment cela marche, et il a facilement son orgasme répétitivement, chaque fois qu’il le souhaite.

 

« Lâcher prise », qu’est-ce que cela signifie?

Dr Sylvain Mimoun : Cela signifie se concentrer sur ce qu’on veut ressentir plutôt qu’être avec toutes les pensées parasites : « Il faut que j’achète le pain, il faut que je fasse à manger, il faut que je m’occupe des enfants… ». Ce n’est pas le meilleur moment pour penser à cela. Donc à partir de là, elles disent : « Il faut que je lâche prise ». Ce que je réponds à ces femmes-là : « Ne cherchez pas à lâcher prise, parce que ce n’est pas si simple que cela, lâcher prise. Votre blocage, il est là ». Si votre excitation est au-dessus de ce blocage, cela marchera beaucoup plus que de se dire : « Il faut que ma tension intérieure baisse de plus en plus, que je me bloque de moins en moins ». Si une femme se dit : « Il faut que je me bloque moins », elle va se bloquer.

 

 

Que ce soit pour les hommes ou les femmes, est-ce que l’orgasme est meilleur lorsque l’on se masturbe ?

Dr Sylvain Mimoun : Oui et non. Avec la masturbation on peut, plus directement, se concentrer sur soi-même, et donc sur la montée du plaisir. Mais si jamais on est complice avec l’autre, en général, le plaisir est beaucoup plus intense. La difficulté aujourd’hui, c’est que malheureusement, la masturbation est soutenue par des images érotiques, voire pornographiques. Donc on se masturbe avec des images très stimulantes. Et le fait d’avoir ces images-là, cela fait qu’il y a, et la stimulation mécanique, manuelle, et la stimulation visuelle. Du coup, il y a une surexcitation qui est loin de l’excitation habituelle lors du rapport sexuel. Et si on compare cela à un rapport sexuel, en effet, le rapport sexuel paraît assez « plan-plan », beaucoup moins intéressant, etc. 

 

Une femme qui n’a jamais d’orgasme, est-elle une femme frigide ?

Dr Sylvain Mimoun : Maintenant, les sexologues n’emploient plus le mot « frigide », mais on sépare la femme qui n’a pas envie, de la femme qui n’a pas d’orgasme, de la femme qui a des douleurs, et en fonction du symptôme mis en avant, on va plutôt essayer de traiter tel ou tel symptôme. Donc cette femme, si elle n’a pas de plaisir, d’orgasme, d’aucune façon, en effet, le but du jeu, c’est de l’aider à y parvenir. Et c’est clair que si cette femme apprend à découvrir son corps et parvient justement à avoir un orgasme, c’est cet orgasme répétitif-là qui va la remettre en confiance, non seulement psychologiquement, mais aussi physiologiquement. Concrètement, la mémoire du corps va se remettre à fonctionner de mieux en mieux.

 

L’orgasme féminin est-il toujours clitoridien, ou est-ce que le fameux point G existe vraiment ?

Dr Sylvain Mimoun : Oui, le point G existe. Il n’en demeure pas moins que 80 % des femmes sont d’abord clitoridiennes. C’est-à-dire qu’elles sont stimulées par le clitoris. Encore faut-il qu’elles l’acceptent. Beaucoup de femmes ne réagissent pas au clitoris parce qu'elles n’ont pas appris à le faire. Et malgré tout, le plaisir et la sexualité en général, c’est aussi une affaire d’apprentissage, ce n’est pas 1ère leçon, 2e leçon, 3eleçon, mais c’est savoir comment on fonctionne. Et pour ça, il faut faire des gammes.  Il y a beaucoup de femmes, par exemple, qui découvrent à 30 ans que c’est par la masturbation qu’elles peuvent découvrir leur plaisir. Et si leur interdit éducationnel fait que c’est impossible qu’il y ait masturbation, elles espèrent toujours que ce soit le partenaire qui le fasse. 

 

Puisque le point G existe, expliquez-nous où il se situe précisément?

Dr Sylvain Mimoun : On peut le repérer très clairement, il est à 2,5-3 cm à l’entrée du vagin. Si un homme introduit un doigt courbé, cela lui fait 2 phalanges de doigt et il est sur le point G. Cela ne veut pas dire que toutes les femmes vont réagir à ce point G. Là aussi, si on compare les femmes qui ont l’habitude d’avoir le point G stimulé, ou stimulé par elles-mêmes, à ce moment-là, elles vont réagir beaucoup plus fortement. Là, aujourd’hui, on vend des sex-toys courbés pour toucher le point G. Cela peut les aider, cela ne veut pas dire que lorsqu’on y touche la 1ère fois, elles ont un orgasme. L’erreur que l’on fait par rapport au point G, c’est de croire que point G = orgasme. Point G = zone hyper sensualisable et sexualisable, et du coup, c’est une vraie zone érotique qui va les stimuler beaucoup plus fortement. 

 

Pour finir parlons des hommes, l’éjaculation est-elle toujours synonyme d’orgasme ?

Dr Sylvain Mimoun : Contrairement à ce que beaucoup de gens pensent, non, ce n’est pas synonyme. Mais si on se met du côté des physiologistes, ceux qui font des courbes, mettent des électrodes pour essayer de repérer cela, on sait qu’il y a quelques millisecondes entre les 2 phénomènes. On sait que les yogis tantriques apprennent à mieux gérer leur corps. Ils arrivent très bien à avoir ce qu'on appelle un orgasme « sec », c’est-à-dire où il n’y a pas d’éjaculation. Quel est l’intérêt? Quand un homme a un orgasme sec, c’est-à-dire qu’il a la jouissance sans l’éjaculation, il peut recommencer beaucoup plus facilement. Alors que la plupart du temps, les hommes ont une période réfractaire et ne peuvent pas suivre les femmes multi-orgasmiques. On peut donc avoir un orgasme sans éjaculation, c’est plus rare, et il faut apprendre à le faire…

(1) La masturbation rend sourd - 300 idées reçues sur le sexe » Ed. First, 253 p. 17,95 €