"Les premiers symptômes sont survenus en 2018. Tout a commencé au niveau de mes pieds. Je sentais que j’étais moins stable et je tombais souvent. Lors de mes footings, j’avais l’impression que mes chevilles étaient cassées. À chaque course, je me disais qu’il fallait que j’achète de nouvelles baskets", se souvient Leah Stavenhagen, âgée de 25 ans à l’époque. En octobre, elle décide de consulter un médecin généraliste, car elle estime avoir besoin de faire quelques séances de kinésithérapie. "Elle a voulu tester mes réflexes au niveau des genoux. On s’est rapidement rendu compte qu’après avoir tapé mon genou avec un petit marteau, il n’y avait aucune réaction." Inquiète, la praticienne l’oriente vers une neurologue à la Pitié-Salpêtrière. "Je ne comprenais pas pourquoi je devais aller voir cette spécialiste, car je me disais que le problème provenait de mes pieds et non de mon cerveau !"
SLA : "Dans mon cas, la maladie sortait donc de nulle part, elle est sporadique"
En 2019, elle se rend chez la neurologue en question. "Je n’étais vraiment pas convaincue. J’y suis allée en traînant des pieds. La spécialiste n’était pas très aimable, j’avais l’impression de lui faire perdre son temps. Elle m’a demandé de faire plusieurs tests, comme me mettre sur la pointe des pieds, et m’a donné une ordonnance pour que je fasse une prise de sang. J’ai laissé traîner ça pendant un certain temps avant que ma famille insiste et me pousse à faire les analyses." Une fois les résultats reçus, la jeune diplômée d’un master est retournée voir l’experte. "Elle m’a annoncé que j’étais atteinte de la sclérose latérale amyotrophique (SLA). Je n’avais pas d’antécédents familiaux. Dans mon cas, la maladie sortait donc de nulle part, elle est sporadique."
"Je n’en avais jamais entendu parler." La neurologue lui a expliqué que cette affection, connue par le grand public sous le nom de "maladie de Charcot", était une pathologie neurodégénérative grave et handicapante. Cette maladie se traduit par une paralysie progressive des muscles impliqués dans la motricité volontaire. Elle affecte également la parole, la déglutition et la respiration. "La professionnelle de santé, qui était bizarrement devenue plus aimable, m’a précisé qu’il n’y avait pas grand-chose à faire contre cette maladie, car il n'existe pas de traitement curatif et que l’espérance de vie des malades est en moyenne de trois à cinq ans."
Difficultés à marcher, diaphragme faible : "Cela peut faire peur d’être face à la mort"
N’ayant pas encore bien assimilé toutes ces informations, Leah lui demande si elle doit annuler ses prochaines vacances avec ses copines. "Elle m’a conseillé de le faire. Ce jour-là, j’ai, pour la première fois, compris que c’était grave." En rentrant, la vingtenaire fait des recherches sur la maladie de Charcot sur Internet lors de son trajet en métro. Elle découvre que cette pathologie touche des personnes plus âgées, entre 50 et 70 ans, et trouve des photos de célébrités qui en ont souffert. "En voyant et lisant tout ça, j’ai commencé à comprendre que cette maladie n’était pas si rare et qu’elle peut toucher tout le monde. J’ai aussi pris conscience de sa gravité et commencé à penser à ma vie en fauteuil roulant." Cependant, la Parisienne essaye de rester positive.
En 2020, alors qu’elle occupe le poste de consultante en stratégie, elle est arrêtée et ne peut plus exercer d’activité professionnelle. "Ma maladie a évolué très rapidement. Une gêne s’était installée dans mes mains et mes bras. J’ai commencé à avoir des problèmes pour marcher. Mon diaphragme est devenu très faible, donc j’étais obligée d’être sous ventilation. Même si je m’estimais chanceuse de pouvoir encore m’exprimer à l’oral et manger, je me rendais compte que ma langue était de plus en plus lourde", explique la jeune femme franco-américaine qui est aujourd’hui âgée de 31 ans et en chaise roulante. "C’était difficile à accepter, car cela peut faire peur d’être face à la mort, mais heureusement j’étais bien entourée. Ma famille, mes amis et mon mari étaient présents pour moi. Je ne me suis jamais sentie délaissée", ajoute la patiente qui a été suivie par un psychologue au début de la maladie.
Maladie de Charcot : "la première patiente à bénéficier d’injections de cellules souches T-reg tous les mois"
Face à ses différents symptômes qui étaient de plus en plus handicapants, le père de Leah, chercheur dans l'univers pharmaceutique, décide de passer à la vitesse supérieure et de la mettre en contact avec un neurologue réputé à New York. Après la première rencontre, tout est allé très vite. "Le docteur américain m’a proposé d’expérimenter un nouveau traitement à base de cellules souches T-reg à titre compassionnel. Je n’ai bien évidemment pas refusé, je m’estimais vraiment très chanceuse d’être la première patiente à bénéficier d’injections tous les mois." Le but du traitement ? Freiner la progression de la sclérose latérale amyotrophique.
En 2022, "c’était malheureusement la fin du traitement qui a commencé en juin 2020. À ce jour, on ne sait pas s’il a été efficace. Un essai clinique est en cours pour permettre d’en savoir plus. Cependant, j’ai l’impression que le traitement expérimental a ralenti la progression de la maladie, qui est maintenant plutôt stable. J’espère qu’un jour, tous les patients pourront y avoir accès", s’exclame la patiente qui insiste sur l’importance de soutenir la recherche et qui a créé son association destinée aux jeunes femmes souffrant de la maladie de Charcot.