• CONTACT

QUESTION D'ACTU

La Santé en Questions

Vaccin à ARNm et cancer : un nouveau chapitre dans l'histoire de la médecine ?

Bouclier efficace contre le virus responsable de la pandémie de Covid-19, la technique de l’ARN messager ouvre aussi de nouvelles perspectives dans le traitement des cancers. Elle permet en effet de disposer de traitements personnalisés comme le montre un essai de phase 3 en cours contre le mélanome.

Vaccin à ARNm et cancer : un nouveau chapitre dans l'histoire de la médecine ? iStock/BackyardProduction




L'ESSENTIEL
  • La pandémie de Covid-19 a popularisé le vaccin à ARN messager.
  • Cette technique a d'abord été étudiée pour améliorer le traitement de cancers.
  • Dans le mélanome, le vaccin à ARNm en adjuvant combiné à la chirurgie et à l'immunothérapie donne d'excellents résultats.

"Arriver à faire reconnaître comme étranger quelque chose qui s’est développé à partir de nous-mêmes, c’est ce qui a manqué au départ". Tout l’intérêt de la recherche sur le vaccin ARNm contre le mélanome est ainsi résumé par le Pr Céleste Lebbé, professeur de dermatologie et responsable du centre de traitement des cancers cutanés à l’hôpital Saint-Louis, invitée de l’émission "La Santé en Questions" sur Fréquence Médicale et Pourquoi Docteur et interrogée par le Dr Jean-Paul Marre et le Pr Jean-François Bergmann.

Après être apparue pour le grand public lors de la crise sanitaire du Covid-19, la technique du vaccin à ARN messager, un temps détournée de son objectif initial, le traitement des cancers, réinvestit le champ de l’oncologie. Et notamment dans la prise en charge du mélanome, le cancer de la peau le plus grave. Avec des résultats spectaculaires dans un essai de phase 3 en cours comme adjuvant combiné à la chirurgie et à l’immunothérapie.

"Une survie à 5 ans de plus de 50% dans le mélanome métastatique"

"Le mélanome, c’est le plus grave des cancers de la peau parce qu’il métastase et qu’il est insensible à la radiothérapie et à la chimiothérapie", rappelle le Pr Céleste Lebbé. Une première avancée essentielle a eu lieu il y a quelques années avec les thérapies ciblées et l’immunothérapie : "On arrive aujourd’hui à une survie incroyable à 5 ans de plus de 50% dans le mélanome métastatique alors que 15 ans plus tôt, cette survie n’excédait pas 6 à 8 mois", annonce le professeur de dermatologie.

Et cette première victoire contre un cancer "qui se camoufle et modifie son environnement" a amené les chercheurs à réfléchir à des traitements adjuvants permettant d’éviter les rechutes. L’objectif : "Se servir de la tumeur en place comme d’une sorte de vaccin qui aide l’immunothérapie à agir", explique Céleste Lebbé.

"Contourner les mécanismes de résistance de la tumeur"

D’où les travaux sur la technique de l’ARN messager permettant de cibler les antigènes fabriqués par la tumeur elle-même, d’éduquer le système immunitaire pour contourner les mécanismes de résistance de la tumeur. "La difficulté est de vacciner contre quelque chose que l’on fabrique soi-même, de trouver la solution pour reconnaître les gènes de la tumeur comme étrangers pour déclencher la réponse immunitaire", souligne le Pr Lebbé.

Pour y parvenir, les chercheurs ont bénéficié de nouveaux outils, notamment les avancées dans le séquençage du génome, permettant de trouver les meilleurs antigènes pour stimuler le système immunitaire. Dans l’essai de phase 3 en cours sur l’utilisation de la technique de l’ARNm dans le mélanome, deux groupes ont été comparés : un groupe de patients traités par chirurgie et immunothérapie classique et un autre groupe de patients traités par une combinaison chirurgie et immunothérapie plus vaccin ARNm personnalisé pour attaquer les cellules cancéreuses restantes. Résultats, une diminution de 50% des récidives dans ce second groupe.

https://www.pourquoidocteur.fr/MaladiesPkoidoc/923-Melanome-l-exposition-au-soleil-est-le-principal-facteur-de-risque

"Le vaccin ARNm va être le deuxième gros progrès thérapeutique après l'immunothérapie"

Concrètement, l’utilisation de ce vaccin en traitement adjuvant consiste en une dizaine d’injections, une toutes les trois semaines. Avec des effets secondaires limités à un risque d’auto-immunité et au développement d’un syndrome grippal. "Mais comme les patients comprennent que l’on utilise un vaccin produit à partir d’eux-mêmes, cela les met en confiance", précise Céleste Lebbé.

Alors, à partir de ces travaux sur l’utilisation de l’ARNm dans le traitement du mélanome, se dirige-t-on vers une arme fatale contre ce cancer et d’autres ? "Je suis optimiste sur le fait que cet essai de phase 3 dans le mélanome va faire ses preuves et que le vaccin ARNm va être le deuxième gros progrès thérapeutique après l’immunothérapie", estime le Pr Lebbé. En ajoutant que les avancées de la recherche dans cette technique vont être "exponentielles", notamment grâce aux innovations permettant de réaliser des études pré-cliniques plus pertinentes.

"De vrais moment de plaisir face à des rémissions complètes dans le mélanome"

Reste la question du coût -élevé- de tels traitements personnalisés. "Mais lorsque l’on parvient à prolonger considérablement la survie pour 50% des patients, cela donne autant de gens qui vivent, qui travaillent. Si l’ARNm en adjuvant dans la prise en charge du mélanome sauve des vies, c’est une façon de diminuer son coût, d’où l’intérêt de ce vaccin en termes de santé publique", relativise Céleste Lebbé. Mais au-delà de tout, elle ajoute que les avancées en cours dans cette technique de l’ARNm procurent "de vrais moments de plaisir face à des rémissions complètes dans le mélanome métastatique… c’est pour cela que l’on fait médecine !".

Vous aimez cet article ? Abonnez-vous à la newsletter !

EN DIRECT

LES MALADIES

J'AI MAL

Bras et mains Bras et mains Tête et cou Torse et haut du dos Jambes et pied

SYMPTÔMES