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Dépendance au tabac

Pour aider les fumeurs à arrêter la cigarette, il faudrait miser sur la gratitude

Par Sophie Raffin

La gratitude est un outil efficace pour réduire l’envie de cigarettes des fumeurs et les encourager à s’inscrire dans des programmes d’arrêt du tabac, selon une nouvelle étude.

Jacob Wackerhausen/istock
Susciter des sentiments de gratitude chez les fumeurs aide à réduire leur envie de fumer et augmente leurs chances de s'inscrire à un programme d'arrêt du tabac.
En revanche, le fait d'évoquer la tristesse augmente le désir de fumer, selon les chercheurs.
L'équipe préconise l'utilisation d'émotions positives, et en particulier la gratitude, dans les messages de prévention contre le tabac.

Le tabagisme reste la première cause évitable de décès prématuré. Bien qu’ayant conscience de ce fait, les fumeurs ont bien des difficultés à arrêter. Selon une étude de l’université Harvard, publiée dans la revue Proceedings of the National Academy of Science (PNAS), la gratitude peut réduire leur envie de fumer et augmenter leurs chances de s'inscrire à un programme pour se défaire de leur dépendance au tabac.

Dépendance : plus d'adhésion aux programmes d’arrêt du tabac avec la gratitude

En reprenant l’ensemble des études menées sur le tabagisme ou encore le lien entre les émotions et les comportements à risque ces dernières années, les chercheurs ont découvert que susciter un sentiment de gratitude était associé à des taux moindres de comportement tabagique. Cette émotion entraînait aussi un taux d'adhésion plus important à des programmes d’arrêt du tabac en ligne.

"Des enquêtes représentatives à l'échelle nationale aux États-Unis et sur un échantillon mondial ont révélé que des niveaux de gratitude plus élevés étaient corrélés à une probabilité plus faible de fumer, même après avoir pris en compte d'autres facteurs connus du tabagisme. Des études expérimentales ont en outre démontré la causalité", notent les auteurs dans leur communiqué.

Si la reconnaissance avait un impact sur les fumeurs adultes, la compassion et la tristesse n'avaient pas d’effets bénéfiques sur leur mauvaise habitude selon les scientifiques. C’était même l’inverse concernant la tristesse. Des recherches antérieures menées par l'équipe avaient démontré que cette émotion négative augmentait en réalité le désir de fumer.

"La sagesse conventionnelle dans ce domaine était de susciter des émotions négatives dans les campagnes anti-tabac. Nos travaux suggèrent que de telles campagnes devraient envisager d’induire la gratitude, une émotion positive qui déclenche des effets positifs en cascade", conclut le chercheur principal Ke Wang.

Campagne anti-tabac : la gratitude doit être au centre des messages

Pourquoi la gratitude semble être l’outil le plus efficace contre la dépendance ? Les chercheurs avancent une hypothèse : "contrairement à d'autres émotions positives (par exemple, le bonheur, la compassion et l'espoir), la gratitude a la particularité de rendre les gens moins enclins à la gratification immédiate et plus concentrés sur les relations et la santé à long terme".

Observant que la plupart des campagnes anti-tabac s'appuient principalement sur la sympathie, la tristesse et la compassion (trois émotions qui se révèlent moins efficaces pour réduire les comportements tabagiques), les chercheurs pensent que les pouvoirs publics ont tout intérêt à repenser leurs communications.

Pour avoir "un plus grand impact sur la réduction des taux de tabagisme et d’autres comportements à risque pour la santé", l’équipe préconise de développer des messages induisant plus efficacement la gratitude.

"Comparées aux sommes dépensées par les compagnies de tabac en publicité, les campagnes de santé publique disposent de budgets dérisoires. Ils doivent tirer le meilleur parti de chaque dollar", selon le professeur Jennifer Lerner. "Le cadre théorique et testé empiriquement présenté ici aidera, espérons-le, les responsables de la santé publique à concevoir des campagnes médiatiques publiques plus efficaces sur un large éventail de comportements à risque qui ont des composantes émotionnelles sous-jacentes."